Les investissements énergétiques engagés et prévus dans les Perspectives 2020-2024 d’APICORP s’élèvent à 792 milliards de dollars, soit une baisse de 173 millions de dollars par rapport aux 965 milliards USD investis en 2019-2023. Ce déclin est largement imputable aux trois crises survenues en 2020 : crise de la Covid‑19, crise pétrolière et crise financière imminente.
Ces engagements sont tirés principalement par des investissements en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis (EAU), en Irak et en Égypte.
En 2020, la part du secteur privé dans les investissements énergétiques est ramenée à 19% contre 22% en 2019. En 2020 et 2021, le prix du baril de Brent devrait s’établir à 30-40 dollars en moyenne, pour refléter ensuite un marché plus équilibré.
Les coûts d’investissement dans le secteur de l’énergie ont diminué d’au moins 20%, en particulier dans le secteur pétrolier et gazier, ce qui pourrait entraîner une vague de fusions-acquisitions.
APICORP (Arab Petroleum Investments Corporation), une institution financière multilatérale de développement, a procédé à des estimations selon lesquelles les investissements prévus et engagés dans la région MENA dépasseront 792 milliards USD au cours des cinq prochaines années (2020–2024).
Malgré ces circonstances difficiles, les investissements engagés dans la région du CCG (Conseil de coopération du Golfe) ont augmenté de 2,3% contre une baisse globale de 6% dans l’ensemble de la région MENA, ce qui témoigne d’un taux d’exécution des projets plus élevé dans la région CCG.
Impacts de la triple crise de 2020
À la fin du premier trimestre 2020, la plupart des pays se sont trouvés confrontés au même dilemme s’agissant de la réponse à apporter à la crise sanitaire de la Covid-19: choisir entre le maintien normal de l’activé et prendre le risque d’une mortalité massive, ou imposer un confinement strict pour contenir l’épidémie. Cette alternative difficile a conduit à des compromis non coordonnés d’un pays à l’autre. Toutefois, la reprise des déplacements et des échanges commerciaux exigera une coordination internationale.
En ce qui concerne la chute des prix du pétrole, conséquence d’une offre excédentaire aggravée par une contraction historique de la demande due à la pandémie de Covid-19, APICORP pense que cette situation devrait conduire à une restructuration du secteur pétrolier et du secteur connexe du gaz, à l’accélération de la fermeture des installations les moins efficaces, et à des fusions-acquisitions.
Quant à une éventuelle crise financière, elle se manifeste par une crise mondiale des liquidités qui se confirme peu à peu, parallèlement à la perte de valeur d’un nombre croissant d’actifs financiers. Et le fait que les Banques centrales et les institutions financières multilatérales redoublent d’efforts fait naître la crainte que ces plans de relance massifs ne créent d’énormes surendettements improductifs qui ralentiront la croissance économique.
Ahmed Ali Attiga, PDG d’APICORP, a déclaré : « L’impact de la pandémie de Covid-19 s’avère déjà plus profond et plus durable que les récessions passées. En effet, la nature de cette triple crise et la profonde restructuration du secteur pétrolier et gazier qui s’ensuivra affecteront les investissements énergétiques pendant une période potentiellement longue, ce qui pourra engendrer une pénurie de l’offre et la volatilité des prix… Il est donc essentiel que les secteurs privé et public collaborent à l’échelle internationale pour remédier aux déficits d’investissement qui s’annoncent. Dans ce contexte, APICORP continuera à jouer un rôle de premier plan en tant que partenaire financier de confiance du secteur énergétique de la région».
Leila R. Benali, économiste en chef, directrice stratégie, économie énergétique et durabilité chez APICORP, a expliqué: «L’impact de la triple crise a pour conséquence une réduction drastique des dépenses en capital et des restrictions affectant les projets et les chaînes d’approvisionnement. En outre, la crise met à l’ordre du jour une éventuelle restructuration du secteur pétrolier et gazier, l’accélération de l’abandon des installations les moins efficaces des unités de production, et une tendance aux fusions-acquisitions. Comme nous le mentionnons dans nos Perspectives, nous nous attendons à une restructuration de la chaîne de valeur, ce qui placera les pays et les entreprises les plus solides – en termes de coût total et d’endettement – en bonne position pour préserver leur proposition de valeur et le rendement à long terme pour leurs actionnaires respectifs».
Qu’est-ce qui tire les investissements énergétiques dans la région MENA ?
Le rapport MENA Energy Investments Outlook 2020 indique que les investissements énergétiques sont stimulés principalement par certains pays : les investissements de l’Arabie saoudite dans les secteurs du gaz et de l’électricité (39 milliards USD et 41 milliards USD, respectivement) ; les efforts de reconstruction et la conversion du gaz en électricité en Irak (33 milliards USD) ; la maximisation des capacités pétrolières des EAU (45 milliards USD) ; et la nouvelle dynamique pétrochimique en Égypte (38 milliards USD). En particulier, APICORP a porté la part du secteur privé dans les investissements en faveur de projets énergétiques à 19%, après l’avoir augmentée de 22% dans ses Perspectives de l’an dernier.
Principaux développements dans les secteurs du gaz, de la pétrochimie et de l’électricité
En termes d’investissements planifiés, les gains les plus importants ont été enregistrés dans la chaîne de valeur du gaz, qui a engrangé 28 milliards USD, soit un bond de 13% par rapport aux précédentes Perspectives. Cette augmentation témoigne du développement du gaz non conventionnel dans la région CCG, notamment dans les champs gaziers de Jafura et de Hail en Arabie saoudite et de Ghasha dans les EAU, ainsi que de l’augmentation des capacités de production au Qatar, en Égypte et à Oman.
Dans le secteur pétrochimique, APICORP attend des pays qu’ils renforcent leurs stratégies respectives en vue d’accroître la monétisation et la maximisation de la valeur des hydrocarbures qu’ils produisent. Les principaux investissements dans ce secteur concernent les sites de Duqm (8,67 milliards USD) et de Sur (6,73 milliards USD) à Oman ; Al-Zor (6,5 milliards USD) au Koweït ; SATORP Amiral (6,34 milliards USD) en Arabie saoudite et le complexe QCHEM (4,5 milliards USD) de Ras Laffan au Qatar.
Dans le secteur de l’électricité, une baisse des investissements de 114 milliards USD a été enregistrée, en raison de la mise en service de plusieurs projets en 2019 en Égypte, aux Émirats arabes unis et en Arabie saoudite. Cependant, à l’échelle mondiale et dans la région, les cours des actions des services publics n’ont pas autant baissé que deux du secteur pétrolier et gazier. Cela s’explique par un déclin relativement plus faible de la demande d’électricité et par les subventions publiques octroyées aux services dans certains pays.
Bien que le secteur de l’énergie n’ait pas connu de problèmes de crédit majeurs jusqu’à présent, l’impact de la crise sur les investissements a été plus lourd en 2020. Les investissements dans les projets d’énergies renouvelables et les réseaux de transport et de distribution (T&D) ont été réduits en raison de retards dans le développement des projets, des diverses restrictions imposées par les autorités et des prévisions de baisse de la demande. Cependant, selon les Perspectives, la région MENA ne semble pas avoir été affectée à ce jour dans la mesure où les enchères d’énergies renouvelables sont restées stables ‑ à savoir le programme saoudien du REPDO (Renewable Energy Development Office).
Par rapport aux chiffres initiaux de 2020, les dépenses en amont prévues ont été réduites de 20 à 30% en moyenne par les grandes entreprises pétrolières privées, les entreprises pétrolières nationales publiques et les grandes entreprises indépendantes en raison de la baisse des prix du pétrole et du gaz, et de l’écroulement sans précédent de la demande. Toutefois, les projets liés au gaz non conventionnel et non liés au gaz destinés à la consommation intérieure, ainsi que le positionnement stratégique de parts de marché aux fins de l’exportation devraient compenser l’impact sur le secteur en amont dans la région MENA par rapport au reste du monde.