Le chef du gouvernement, Elyès Fakhfakh, a décidé de vendre ses actions dans une société faisant partie d’un groupement d’entreprises qui traite directement avec l’Etat tunisien pour éviter tout conflit d’intérêt. C’est ce qu’a annoncé Mohamed Abbou, ministre d’Etat auprès du chef du gouvernement chargé de la Fonction publique, de la Gouvernance et de la Lutte contre la corruption.
Au cours de son audition, lundi 22 juin 2020, par la Commission de la réforme administrative, de la bonne gouvernance, de la lutte contre la corruption et de contrôle de la gestion de l’argent public (commission spéciale), Abbou a indiqué que le chef du gouvernement a cédé ses actions et les a confiées à une autre personne pour la gestion, conformément à l’article 18 de la loi n° 2018-46 du 1er août 2018, portant déclaration des biens et des intérêts, de la lutte contre l’enrichissement illicite et le conflit d’intérêt dans le secteur public.
“Cette décision a été prise pour clore définitivement ce dossier”, a-t-il déclaré, précisant que Fakhfakh l’a chargé d’annoncer la cession de ses actions et d’éclairer l’opinion publique à ce sujet.
Le ministre a fait part de la disposition d’ouvrir une enquête sur cette affaire en cas de suspicion de corruption, estimant que “le conflit d’intérêts en soi n’est pas considéré de la corruption même si cela peut être en effet le cas”.
Et de souligner “la volonté du chef du gouvernement et des membres de son cabinet de gagner en crédibilité à travers l’application et le respect de la loi”.
Pour sa part, Badreddine Gammoudi, président de la Commission de la réforme administrative, a déclaré, à l’issue de la séance d’audition de Abbou, que les membres de la commission se sont engagés à faire le suivi du dossier du chef du gouvernement concernant le conflit d’intérêts.
Elyes Fakhfakh avait déclaré, dimanche 14 juin, dans une interview diffusée en direct par la chaîne privée Attessia, qu’il avait des actions à hauteur de 20% dans une entreprise opérant dans le secteur de l’environnement, ayant un contrat avec l’Etat, estimant que posséder des titres dans cette société ne relève pas d’un conflit d’intérêts.
Les déclarations de Fakhfakh avaient suscité une polémique dans la mesure où garder ses actions dans la société est assimilé à un conflit d’intérêts et constitue une violation des articles 18 et 20 de la loi n°2018-46 portant déclaration des biens et des intérêts, de la lutte contre l’enrichissement illicite et le conflit d’intérêt dans le secteur public.
Le président de l’Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC), Chawki Tabib avait annoncé avoir reçu une notification de la part du député Yassine Ayari sur une suspicion de corruption et un conflit d’intérêts contre le chef du gouvernement.
Il a annoncé l’ouverture d’une enquête à cet effet, soulignant que Fakhfakh devrait céder ses actions dans l’entreprise.
De son côté, Ayachi Hammami, ministre des droits de l’Homme, des Instances constitutionnelles et de la société civile avait déclaré, le 19 juin, dans une déclaration médiatique que le chef du gouvernement a engagé les procédures pour la cession de ses actions.
Fakhfakh avait fait une déclaration de ses biens le 27 février dernier, auprès de l’INLUCC tout en gardant ses actions dans la société en question.
Maintenant trois questions méritent d’être posées: Elyès Fakhfakh a-t-il vendu ses parts dans l’entreprise avant l’éclatement de l’affaire au grand jour? Si oui, l’a-t-il faut auprès de l’Instance nationale de lutte contre la corruption? Et si ce n’est pas le cas, le ministre de la “Bonne gouvernance” qui se targuait pendant les campagnes électorales (législatives et présidentielle) a-t-il alerté à qui de droit? Alors, anguille sous roche.
Affaire à suivre.