Entre parenthèses et sans citer de noms de personnes qui sont tellement négligeables, que les nommer, leur donnerait un grain importance : l’art, la création et la culture au delà de toute expression, sont la quintessence d’une expérience humaine qui dépasse souvent l’entendement.
Ses manifestations se situent au niveau du vécu et du penser humain. Plus particulièrement, le théâtre réfère au vécu, renvoie à la conscience et tend à produire à chaque fois une nouvelle conception. Le théâtre tunisien a connu ses heures de gloire avant de devenir stérile, désert, aride, nauséabond et dépravé, sombrant dans une désolation affligeante.
Peut-on espérer le voir un jour renaître et renouer avec les grands arts de la scène, l’orfèvrerie des mots, l’ébénisterie des textes, la beauté des échanges, cousus mains, telles des œuvres de haute couture et exécutés dans un jeu subtil par des acteurs talentueux, livrant des tirades brillantes et vigoureuses. En somme, reprendre des couleurs flamboyantes et des lumières scintillantes ?
Les consultations et les tractations du chef de gouvernement pour la formation de son équipe, un gouvernement de la dernière chance comme je l’ai déjà qualifié, s’étalent et s’éternisent même s’il est encore dans les délais fixés par la constitution, sauf qu’on n’a pas la même échelle émotionnelle et temporelle, tant les attentes de la majorité des gens, avachis mais grommellants, de voir remettre le pays à flot, sont longues, pénibles et les nerfs sont à vif.
Ô combien j’ai la certitude qu’il obtiendra haut la main, le vote de confiance des députés, tant ces derniers sont hantés par le spectre de la dissolution de l’Assemblée et, tenaces comme des morpions, ils s’accrochent à leur immunité parlementaire, qui préserve bon nombre d’entre eux, de l’ouverture d’instruction et d’une comparution devant les juges pour divers délits.
Par contre, pouvoir travailler en toute sérénité pour assainir et faire avancer des projets de réforme est moins évident car des députés vont agir en thromboses ! En effet, ce gouvernement va se heurter aux finasseries du groupe islamiste, aux petitesses de leurs succursales et à l’hypocrisie et félonies des démocrates de service ; un ensemble d’attitudes qui relèvent de la bêtise humaine dans toute sa monstruosité.
Si encore on avait prévu dans la Constitution un équivalent de l’article 49.3 de la constitution française, appelé communément “passage au forceps” ! N’ayant pas les obligations d’un constitutionnaliste, je me contente de rappeler qu’il s’agit d’une procédure à laquelle le chef de gouvernement peut recourir et qui lui donne la possibilité, après délibération du Conseil des ministres, d’engager la responsabilité du gouvernement sur le vote d’un projet ou d’une proposition de loi en débat à l’Assemblée. La décision d’y recourir entraîne la suspension immédiate de la discussion du projet de loi. Il est considéré comme adopté, sans être soumis au vote sauf si, des conditions sont réunies telles que, le dépôt d’une motion de censure dans certains délais …
Le président de la République doit prendre toute la mesure de la gravité de la situation et proclamer l’état d’exception
Le scénario d’un ergotage bête à perte de vue entraînant un blocage systématique, étant fort plausible car déjà évoqué par certains députés, je pense que le président de la République doit alors prendre toute la mesure de la gravité de la situation pour proclamer l’état d’exception et mettre fin à la mascarade qu’on vit depuis 2011. Si l’on vient à faillir à ce devoir alors, la seule issue de sortie pour le peuple serait d’être capable de fournir un effort d’intelligence collective élémentaire pour prôner la désobéissance civile, un acte fort auquel on peut recourir comme ultime et radicale forme de résistance.
Justice, équité et liberté. Comment les ordonner par ordre d’importance ? Peut-on encore réaliser l’un de ces concepts sans les deux restants ? Notre cher président s’est donné encore une fois et à cœur joie, à son exercice favori et redondant de présenter devant un parterre d’invités dont beaucoup de femmes, sa vision du modèle sociétal tunisien et son approche de questions essentielles car engageant notre avenir, touchant l’islam et l’État, le statut de la femme, l’égalité successorale … tant de thèmes qui ont alimenté beaucoup de débats passionnés et passionnels. Une exhibition, se voulant drastique mais frisant la mégalomanie, soporifique malgré un effort louable de pédagogie et où, on flaire une grossière manœuvre pour éreinter la confrérie.
Nul besoin d’avoir l’esprit prompt et comprendre à demi-mot pour s’apercevoir qu’il s’est mélangé les pinceaux et s’est maladroitement empêtré dans des contradictions flagrantes surtout en insistant sur le non sens de la religion de l’État mais oublie qu’il en est le premier et digne représentant pour enchaîner avec des citations de son calife fétiche et multiplier les références et exégèses coraniques.
Faut-il s’astreindre à une lecture littérale, exiguë et figée du texte coranique ?
Opposant et privilégiant la parenté à la citoyenneté, il s’est montré farouchement opposé à l’égalité successorale. C’est certes son droit mais, doit l’assumer pleinement et dans ce sens, il aurait dû expliquer aux femmes agricoles besogneuses rencontrées le matin aux fonds des champs qui, faisant le voyage à l’arrière d’un camion comme du bétail et triment de l’aube au soir, qu’il ne voit pas l’obligation de leur accorder le droit de posséder leurs propres lopins de terre dans les domaines familiaux pour y travailler à leurs propres comptes, dignement !
Sans l’ombre d’un doute, je le vois baigner confortablement dans un paradigme solidement ancré dans le conservatisme islamique, hautement discriminatoire et tristement rétrograde
Les lois coraniques, leurs interférences dans la Constitution et leur implication dans la gestion des affaires de la cité, suscitent depuis toujours des controverses. Faut-il s’astreindre à une lecture littérale, exiguë et figée du texte coranique ou plutôt, oser aller bien au-delà vers une approche actualisée, éclairée et une conceptualisation de l’ensemble des intentions et des visées du Coran ?
En particulier, la question épineuse de la répartition de l’héritage … Est-ce la raison pour laquelle Bourguiba au moment de la rédaction du code du statut personnel, n’a pas voulu y toucher, la laissant en suspens ? Feu Béji, dans une volonté mégalomaniaque de marquer l’Histoire et d’entrer dans les éphémérides de la fête de la femme, s’y ai essayé avec la commission COLIBE dont on connaît la suite …
Je pense que ces sujets et bien d’autres sur lesquels, on est loin de réunir un consensus, doivent faire l’objet d’un large débat national, impliquant des spécialistes de tous bords et soumis par référendum à la volonté du peuple et le législateur se verra dans l’obligation de faire accomplir la volonté publique par la présentation d’une loi dont elle sera l’expression !
En attendant, il y a d’autres avancées remarquables à accomplir pour les femmes comme, la chasse à l’exploitation sexuelle surtout des mineures, la répression sans appel des violences et la prise au sérieux des plaintes déposées pour de tels délits, la fin de la discrimination sexuelle et la parité totale dans tous les secteurs y compris au gouvernement.
Bien évidemment, on ne peut contenter tout le monde et son père mais, entre le traditionnel carcan patriarcal, archaïque et oppressant dont il faut s’affranchir et le radicalisme des courants néo-féministes qu’il faudrait tempérer, il y a un long chemin à parcourir et un équilibre stable à atteindre pour une société plus juste et résiliente.