La Tunisie compte environ 2700 espèces végétales. Mais les données sur ces plantes se font rares et sont à accès difficile au commun des citoyens.
Dans cette optique, un projet de numérisation de l’herbier de l’Institut National Agronomique de Tunisie (INAT) a été entamé depuis avril 2019.
Il s’agit d’un projet financé par le Programme de Micro Financements du Fonds pour l’Environnement Mondial (PMF/FEM) et relevant du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD).
Il est mis en œuvre dans le cadre d’une collaboration entre l’Association de développement durable “la Recherche en Action (REACT) “, Tunisia Ecotourism Network (TEN), l’Institut National Agronomique de Tunisie (INAT), la Faculté des Sciences de Tunis (FST) et le WWF-Afrique du Nord.
” Les actions entreprises consistent à la réhabilitation de plus de 6000 planches de l’herbier de l’INAT représentant 2400 taxons (espèces, sous-espèces et variétés) provenant de collectes anciennes effectuées à travers tout le pays avant 1956 ou récentes, l’élaboration d’une base de données renfermant pour chaque taxon sa nomenclature actualisée conformément aux appellations reconnues à l’échelle mondiale, le lieu et la date de sa collecte, ainsi que le nom du collecteur, et aussi l’aménagement de la salle de l’herbier selon les normes internationales de conservation et de sauvegarde des planches d’herbier ” a déclaré à TAP, Madame Ghrabi-Gammar Zeineb, vice-présidente de REACT et Professeure de Botanique à l’INAT.
” Vu la quantité massive de données et l’absence d’un Data center à l’INAT, ” Une convention est en cours d’élaboration avec l’IRESA pour le stockage des données collectées des scans des planches tout en garantissant une consultation en ligne libre et gratuite pour toute personne intéressée par ces scans et les informations qui lui sont liées”, a encore indiqué Mme Ghrabi-Gammar.
D’après elle, cet herbier de l’INAT, une fois numérisé, sera un outil de recherche très utile pour accéder aux connaissances botaniques sur la flore de Tunisie.
Cet herbier numérisé a un rôle dans le développement de la recherche scientifique en botanique, et plus particulièrement en systématique, en biologie végétale, en écologie… Il permettra aussi de promouvoir plusieurs secteurs d’activités, notamment la recherche de phytocomposés actifs à valoriser, en agriculture biologique, en phytothérapie, en phytoremédiation…, a-t-elle encore expliqué.
La technologie au service de la botanique
L’idée est née suite à une action d’inventaire de la flore du Parc national de Oued Zen, situé dans la délégation d’Aïn Draham.
” Nous avons besoin de connaître les plantes qui existent en Tunisie, leurs spécificités, leurs usages “, avait expliqué Majdi Calboussi, vice-président fondateur de TEN (Tunisia Ecotourism Network), lors du démarrage du projet.
Selon Mme Ghrabi-Gammar Z., l’acquisition de la pièce maîtresse du projet, le scanner 3D dédié à la botanique (numérisation, dans leurs moindres détails, des spécimens archivés) a été effectuée, et celle des disques durs à forte capacité est en cours. Ils permettront de démarrer le scan des spécimens de l’herbier de l’INAT qui représente une tâche colossale. Pour cela, Mme Ghrabi-Gammar Z. a indiqué à TAP, que le bénévolat est souhaité et serait bien reçu, pour finaliser ce projet de grande envergure.
Un herbier numérisé servira, entre autres, à pallier le manque cruel en botanistes et experts de la flore en Tunisie, puisqu’il sera accessible à tout le monde.
La numérisation en vue de créer des modèles d’adaptation aux changements climatiques
La numérisation des herbiers ouvre la voie, selon les climatologues, à l’utilisation de l’intelligence artificielle pour caractériser le développement de centaines de milliers d’espèces végétales recensées de par le monde. L’analyse de leurs données pourrait permettre de créer un modèle d’anticipation des changements climatiques.
Techniquement, chaque nouvelle plante découverte est systématiquement cataloguée dans des herbiers. Des millions de spécimens représentatifs d’espèces végétales sont ainsi archivés dans quelques milliers d’herbiers. La numérisation de ces spécimens les transforme progressivement en outils modernes de recherche. Les informations permettent notamment d’étudier la dynamique de leur développement en fonction des variations saisonnières du climat.
Scientifiquement, en accédant à des herbiers connus, modernes et fiables, il serait alors
possible d’avoir des données sur des échelles géographiques et temporelles très importantes pour développer ensuite, des modèles phénologiques capables de prédire le comportement des plantes vis-à-vis des changements climatiques actuels.