Dans son allocution lors de la cérémonie de passation de pouvoir, jeudi 3 septembre 2020, le chef du gouvernement sortant, Elyès Fakhfakh, a mis en garde contre le délitement de l’Etat, gangrené selon lui par la corruption, le corporatisme et les intérêts étriqués.
” La Tunisie est menacée par le corporatisme et par les intérêts étriqués qu’ils soient personnels ou régionaux. Elle est gangrenée par la corruption qui s’est tellement mêlée à la politique qu’on nous dit aujourd’hui que l’Etat corrompu va survivre, qu’il va oser, qu’il va défier “, a-t-il lâché.
” Après cette courte expérience au pouvoir, j’ai désormais la certitude qu’on ne peut pas résoudre les problèmes de l’économie, du développement, de la pauvreté, du chômage, du déséquilibre régional et de la marginalisation, tant qu’on n’a pas rationalisé et moralisé la vie politique “.
Il a également fait observer que le pays a sombré encore une fois dans la spirale de l’instabilité et des tiraillements politiques au moment où il traverse une période délicate aux niveaux social, économique et sécuritaire.
Fakhfakh est revenu, lors de son allocution, sur les circonstances ayant mené à la chute de son gouvernement. A cet effet, il a expliqué qu’après avoir maîtrisé la pandémie du Covid 19, son gouvernement s’est attelé à mettre en place à partir du mois de mai un plan économique et social de sauvetage et pris en charge les dossiers prioritaires avec la même volonté, l’abnégation et l’audace qui ont prévalu dans la gestion de la crise sanitaire.
” Au moment où nous étions occupés à appliquer ce plan pour faire sortir le pays de la crise, d’autres manigançaient pour faire tomber le gouvernement, à le dénigrer et à torpiller les bonnes volontés, a-t-il dénoncé.
Si nous tenons compte du résultat, nous pouvons admettre qu’ils ont réussi leur coup. Nous avons perdu encore une fois l’occasion historique d’entreprendre les réformes tant voulues et attendues”, a-t-il regretté.
Selon lui, la Tunisie est aujourd’hui au cœur de la tempête. empêtrée dans une bataille vitale et décisive, où l’Etat, la paix civile et les aspirations des jeunes, sont visés.
” La Tunisie souffre d’un manque criant de confiance, d’on ne peut plus de frustration, et de perte d’espoir. Elle lutte pour préserver sa souveraineté et se bat pour débarrasser son économie du système de la rente et des personnes omnipotentes “.
Fakhfakh a exprimé ses craintes vis-à-vis de la scène politique où les lobbies financiers ont investi dans les institutions démocratiques fragiles, à savoir le parlement, les médias, les instances indépendantes, l’administration, les partis et les associations.
” Ils ont transformé le rêve démocratique en un danger qui pèse sur l’Etat et ses acquis “, a-t-il alerté.
Selon lui, ce qui fait peur dans cette scène politique marquée par une ” omnipotence suspecte “, ” c’est l’ingérence de parties étrangères capables d’influer sur la scène nationale à travers des instruments et des individus à leur solde “.
Une cérémonie officielle de passation de pouvoirs entre le gouvernement sortant d’Elyès Fakhfakh et le gouvernement de Hichem Mechichi s’est déroulée jeudi, à Dar Dhiafa à Carthage.
La cérémonie a vu la présence des présidents des partis politiques représentés à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), les présidents des instances et organisations nationales, le président de l’ARP, Rached Ghannouchi, les vice-présidents de l’ARP, les présidents des groupes parlementaires, les anciens chefs de gouvernement ainsi que des personnalités nationales.