La présidente du Syndicat des magistrats tunisiens (SMT), Amira Amri, a déclaré que ” les mauvaises conditions dans lesquelles travaillent les magistrats ainsi que les pressions dont ils font l’objet, outre leur marginalisation sont de facteurs ayant conduit à un grand mécontentement dans le secteur “.
” Les magistrats peuvent en arriver à une décision de grève, à la suspension du travail et même à une démission collective afin que l’Etat prenne ses responsabilités pour un soutien effectif du pouvoir judiciaire “, a-t-elle averti.
Lors d’une conférence de presse du SMT, mercredi, au Palais de Justice à Tunis, Amri a indiqué que ” l’indépendance de la justice ne peut être concrétisée tant que la dignité des magistrats est bafouée et que l’on se permet de leur porter atteinte en raison des décisions judiciaires rendues”.
Faire pression sur la justice et tenter de l’orienter et de l’assujettir à des intérêts spécifiques et des conflits sectoriels affecte non seulement le statut des magistrats et leur indépendance, mais porte aussi préjudice au droit de la défense d’une partie aux dépens d’une autre “.
Evoquant l’incident survenu au Tribunal de première instance de Ben Arous, la présidente du SMT a fait savoir que le juge d’instruction s’est saisi du dossier en tant que conflit personnel entre deux parties, ce qui explique l’absence d’un mandat de représentation par un avocat.
“Les sécuritaires ont été, quant à eux, présents en masse en tenue civile et en uniforme”, a-t-elle dit, estimant qu’il s’agissait d’une tentative de faire pression sur le juge.
Et de préciser ” nous ne sommes pas face à un conflit entre avocats et magistrats tel qu’il est présenté. Nous sommes partenaires dans la justice. Un partenariat qui requiert le respect mutuel “.
L’affaire remonte au 4 août dernier, lorsque l’avocate Nesrine Karnah avait informé l’Ordre des avocats avoir été malmenée, frappée et séquestrée à l’intérieur d’un bureau du poste de police d’El Mourouj V par le chef du poste de police et son adjoint, alors qu’elle accompagnait son client pour qu’il soit entendu comme victime.
Un différend juridique avait opposé Nesrine Karnah au chef du commissariat, qui a viré à l’agression contre l’avocate et à la réquisition de sa carte professionnelle.
La Brigade centrale d’investigations à l’Aouina s’est chargée de l’enquête et a clôturé ses investigations avant de renvoyer le dossier de l’affaire au parquet du Tribunal de première instance de Ben Arous.
L’affaire en question a pris cette semaine un tournant important suite au sit-in des avocats observé mardi et mercredi dernier au siège dudit Tribunal, pour dénoncer le renvoi de l’affaire devant le parquet. Ce dernier avait diligenté une enquête contre le chef du poste de police pour détention d’une personne sans autorisation légale et agression contre un fonctionnaire sans motif légal conformément aux dispositions de l’article 101 du code pénal. Le principal accusé avait été présenté devant le juge d’instruction, lequel avait décidé à une heure tardive vendredi, de laisser l’accusé en liberté.
Plusieurs sécuritaires appartenant aux différents corps se sont réunis en grand nombre devant le siège du tribunal, parallèlement à un rassemblement d’avocats à l’intérieur de l’édifice. Plusieurs observateurs estiment que cette présence de part et d’autre, vise à mettre la pression et influencer le cours de la justice.