Paradoxalement, la Tunisie, qui est à la traîne en matière d’énergies renouvelables (EnRs), a non seulement des atouts naturels pour développer, avec succès, ce créneau porteur, mais dispose en plus de possibilités énormes pour accéder à des financements internationaux substantiels à des taux préférentiels.

Abou SARRA

De nos jours, la conjoncture internationale est très favorable aux financements des investissements des EnRs.

Outre la disponibilité des fonds de la COP 21 (Convention des Nations unies sur les changements climatiques), quelque 100 milliards de dollars à partir de 2020, des crédits fournisseurs japonais et allemands, des bailleurs de fonds (Union européenne, BERD, Banque mondiale, BAD, BEI, AFD, KfW) ne ratent aucune occasion pour rappeler au gouvernement tunisien leur disposition à financer sans limites les projets de développement des énergies vertes. La seule condition exigée des gouvernants tunisiens est de concocter des projets viables.

Pour mémoire, la Tunisie, qui projette de porter, à l’horizon de 2030, la part des EnRs dans le mix énergétique à 30%, aura besoin pour atteindre cet objectif de 7 milliards de dollars (plus de 16 milliards de dinars), selon les estimations de l’ancien ministre de l’Energie, Mongi Marzouk.

Un tel investissement paraît certes énorme mais il pourrait réduire la dépendance du pays de l’étranger en matière d’énergie et de respecter l’écosystème.

Les apports de la Banque mondiale et de la BERD

Par ailleurs, en dépit des tergiversations et de la léthargie des gouvernants tunisiens en matière de de développement des énergies vertes, les représentants de la Banque mondiale et de la BERD en Tunisie rivalisent d’ingéniosité pour encourager notre pays à intensifier ses investissements dans les EnRs.

Citons l’initiative la plus récente, à savoir la décision de la Banque mondiale d’accorder à la Tunisie un don de 12 millions de dollars, pour financer l’étude faisabilité technique de la partie sous-marine du projet d’interconnexion électrique entre la Tunisie et l’Italie. Ce mégaprojet géostratégique, dont le coût s’élève à 600 millions d’euros, permettra à la Tunisie de produire 600 mégawatts supplémentaires à partir d’énergies renouvelables.

Autre financement dédié par la Banque mondiale, un crédit de 151 millions de dollars devant cofinancer le renforcement du réseau de transport d’électricité de la Société tunisienne de l’électricité et du gaz (STEG), avec l’objectif de faciliter l’intégration des EnRs produites localement.

Outre ces deux financements dédiés aux énergies vertes, «la Banque mondiale poursuivra son appui à la Tunisie dans le domaine de l’énergie et des énergies renouvelables», c’est ce qu’a déclaré, le 27 octobre 2020, le représentant-résident de la BM en Tunisie, Tony Verheijen, à l’issue d’une entrevue avec la ministre de l’Industrie, de l’Energie et des Mines, Salwa Sghaier.

La BERD, pour sa part, ne ménage aucun effort pour sensibiliser les responsables tunisiens aux avantages multiformes qu’ils peuvent tirer d’une intensification des investissements dans les EnRs. Dans cette perspective, elle est en train de travailler sur un programme de 250 millions d’euros avec la STEG.

Cette entreprise publique est appelée, à travers ce programme de restructuration, particulièrement dans le domaine d’exploitation des énergies renouvelables, à cohabiter avec des développeurs privés.

Il s’agit d’un projet sur lequel la BERD a beaucoup travaillé avec le ministère de l’Energie, sachant que des expertises similaires ont été développées avec succès en Jordanie et en Egypte.

Plaidoyer pour la création de mécanismes de finance verte

Toujours au rayon du financement, les experts réunis le 24 septembre 2020 à Tozeur, à l’initiative de la Banque mondiale et du PNUD, pour débattre des problèmes qui se posent aux EnRs en Tunisie, ont proposé la création, à l’échelle locale, de mécanismes de “finance verte“.

Ils suggèrent également, pour le développement de projets dans le régime d’autoconsommation, de créer un “club de banques“ stratégiquement intéressées par le secteur et de mettre en place un fonds d’investissement qui soit rentable pour perpétuer son activité  et attirer des investisseurs. Selon les mêmes experts, ce fonds pourrait cibler en priorité les projets d’autoproduction avec des compagnies solides où l’exit est envisageable et facile. C’est à ce prix qu’on peut attirer des ressources, notent-ils.

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