La Tunisie est devenue, au cours des 10 dernières années, un pays attractif pour les Sub-Sahariens, que ce soit pour ceux qui ont quitté la Libye après la chute de Moammar Khaddafi, ou pour ceux qui viennent par voie aérienne par petits groupes. Mais pour des raisons différentes.
Ils seraient aujourd’hui, selon certaines ONG, plus de 21 000 immigrés Sub-Sahariens, mais dont 95% sont en situation irrégulière. Et pou la plupart d’entre eux, la Tunisie n’est pas une finalité mais constitue une “escale”, une “étape” vers l’Europe, voir l’Amérique.
La Tunisie a souvent attiré les étudiants d’Afrique au Sud du Sahara. Leur nombre était estimé, en 2010 au moment de la chute de Ben Ali, à 18 000 ; chiffre qui serait passé aujourd’hui à 8 000 étudiants. Cette chute s’expliquerait par l’instabilité politique en Tunisie et l’image renvoyée par la Tunisie qualifiée désormais de “pays dangereux“, “peu sûr“ et “instable“. Et les attentats terroristes commis dans le pays n’ont fait renforcer cette image négative.
Certains étudiants qui poursuivent leurs études en Tunisie choisissent de prolonger leur séjour, en profitant de stages professionnels –très rares il faut l’admettre-, ou en exerçant pendant 1 à 2 ans, le temps d’acquérir une expérience.
Toutefois, la législation du travail et les conditions de séjour sont compliquées, voire décourageantes, ce qui ne permet à la Tunisie de profiter de cette expertise et de cette richesse humaine, notamment pour les filières fortement demandées comme celle du digital.
En contrepartie, certains Africains du Sud du Sahara profitent de l’accès en Tunisie sans visa (Maliens, Ivoiriens, Nigériens, Béninois, Burkinabé, entre autres) pour venir s’installer en Tunisie et travailler clandestinement.
Cette main-d’œuvre est très demandée car “très bon marché“ les entreprises tunisiennes. Cette demande s’explique par le refus de plus en plus de jeunes tunisiens, pourtant chômeurs, de travailler dans l’agriculture, le bâtiment, la restauration, d’une manière générale dans les travaux manuels.
Par contre, les Subsahariens sont “dociles“, “disciplinés“ et souvent fortement productifs… avec les tracasseries administratives en moins.
Où les trouve-t-on en Tunisie ? Tout d’abord à Sfax, notamment dans l’oléiculture, secteur qui enregistre chaque année un déficit d’ouvriers agricoles. Ensuite à Tunis, dans le secteur du bâtiment, mais aussi dans celui des services (cafés, restauration, lavages, etc.).
En outre, aujourd’hui plusieurs centaines d’africaines sont employées, par des familles aisées, comme “gouvernantes“, “femmes de ménage“ ou “garde d’enfants“.
Cette affluence de travailleurs Subsahariens -qui ne sont majoritairement pas couverts par la sécurité sociale, ne jouissent pas de leurs droits- est à mettre en parallèle avec l’absence de certaines expertises et spécialités pour les entreprises tunisiennes.
En effet, malgré la disponibilité de plus de 300 000 chômeurs en Tunisie, une récente étude de l’IACE a montré qu’il y a plus de 31 000 postes disponibles actuellement en Tunisie mais non couverts. Soit par absence d’expertise, soit par le refus des demandeurs d’emplois les offres existantes. C’est le cas notamment dans l’agriculture, le bâtiment, l’industrie, les services.
Il est certain que les mauvais messages envoyés par les différents gouvernements depuis 2011, avec des emplois fictifs dans les sociétés de jardinage ou d’environnement et même dans les administrations et les entreprises publiques, font que les demandeurs d’emplois déclinent les postes offerts, d’où l’appel à la main-d’œuvre subsaharienne, la plupart du temps “clandestine“.
Il est temps de régulariser leurs séjours et de leur délivrer des autorisations de travail et d’organiser cette immigration bien réelle.
Maarouf