Quelles implications de la technologie sur l’avenir du travail ? La question ne se posait pas avec autant d’insistance avant la pandémie Covid-19. Le confinement imposé pour des raisons sanitaires a forcé le pays, les entreprises et les travailleurs à adopter de nouveaux réflexes, notamment le télétravail, la visioconférences et les réunions à distance.
En Tunisie cette pandémie a permis d’accélérer certaines lois, entre autres celles relatives à l’identifiant unique et aux déclarations fiscales à distance. Mais est-ce suffisant ?
Réponses de Mustapha Mezghani, ingénieur concepteur en informatique, expert en TIC et en économie du numérique et fondateur et organisateur d’Outsourcing & IT Solutions.
«C’est vrai, il n’y a pas eu d’usage de l’identifiant unique et de la facture électronique. Le premier a buté sur nombre d’entraves. Sans la Covid-19 et l’impératif social, il n’aurait peut-être pas vu le jour. C’est un sujet à polémique se rapportant entre autres à la protection des données personnelles», indique Mustapha Mezghani.
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Mais il attribue ce retard «à la lenteur du processus au niveau de l’ARP. Parmi les textes de lois s’y rapportant, celui sur la protection des données personnelles, la mise en conformité avec le RGPD européen (Règlement général sur la protection des données personnelles) ».
Ceci étant, «… un autre problème d’ordre culturel se pose dans notre pays : le fait de considérer que “l’administration est vierge de tout soupçon et incapable de commettre des erreurs alors que le secteur privé en est capable“.
Mustapha Mezghani poursuit en indiquant que « … ces pratiques sont plus dangereuses à cause de la tendance qui pousse à croire que l’administration est infaillible. Nous pouvons d’ailleurs le voir à travers le texte promulgué dans le décret 310/2020 concernant l’échange des données entre administrations touchant les entreprises. Toutes les entreprises publiques peuvent accéder aux données de toutes les entreprises, mais l’inverse n’est pas possible. Le fait est qu’il y a des entreprises publiques qui rendent un service public et d’autres qui ne le font pas».
Par la suite, il évoque les projets de numérisation réalisés, ceux en cours et ceux qui sont importants pour cette transition mais bloqués. « Beaucoup de projets sont en cours, à l’instar de celui de la carte de soins magnétique “Labess“ qui vient d’être réactivé par la CNAM. Cependant, elle n’est pas opérationnelle, et c’est une erreur, car les carnets ont été supprimés alors que nous n’étions pas tout à fait prêts pour la carte de soins, laquelle n’a pas été intégrée dans les systèmes d’information des structures publiques »…
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A la question de savoir “pourquoi n’arrivons-nous pas à élaborer un projet de numérisation cohérent, applicable et lisible ?“, Mezghani répond : «Parce que tout projet numérique dans notre pays est généralement ramené à la simplification du travail de l’administration, en ignorant les autres intervenants. C’est le cas des déclarations d’impôts : le processus de certification électronique a été dématérialisé, tout a été fait dans le respect des normes internationales. Les concernés n’ont pas à se déplacer pour être identifiés et retirer le DIGIGO .
Maintenant, puisque le DIGIGO est rattaché à l’entreprise, le responsable est obligé de fournir un certain nombre de documents. Mais si la signature est personnelle, et si je suis gérant de 3 entreprises, je dois signer pour trois entreprises, donc il faut un dossier pour chaque entreprise. Ce qui se passe aujourd’hui est que la signature, étant personnelle, doit porter sur une seule entreprise.
Ensuite, quand vous faites votre demande pour rattacher votre dossier à la demande, vous devez présenter une copie du RNE (Registre national des entreprises), une copie de la certification du matricule fiscal, et de la CIN. Alors, pourquoi exiger le RNE et le certificat du matricule fiscal. Si nous voulons dématérialiser le processus, il faut le faire de bout en bout, éliminer le réflexe des “documents en papier“ ».
En résumé, il affirme que « le processus de transformation numérique manque de cohérence et de logique ».