Eviter l’austérité serait la première démarche à entreprendre pour rebondir dans un contexte de crise économique et sociale due au Covid-19, selon une tribune publiée sur le site de l’Institut Tunisien de la Compétitivité et des Etudes Quantitatives (ITCEQ).
Selon l’auteur de cette analyse, Imed Ben Rabah (Direction Centrale des Etudes Sociales de l’ITCEQ), une politique qui vise à augmenter les taxes ou à réduire les dépenses, ne fera que freiner le retour à la normale de l’activité économique.
“L’Etat ne doit adopter une politique d’austérité (en vue de rembourser rapidement sa dette), que lorsque la croissance économique et l’emploi sont assez résistants pour contrebalancer les effets néfastes sur l’économie”. Ben Rabah recommande aussi, de booster l’économie par l’investissement public, d’assouplir le cadre juridique régissant le marché du travail et de miser sur le secteur de l’agriculture, en procédant à une réforme foncière.
Booster l’économie par l’investissement public
“Dans cette situation d’incertitude où les ménages sont très prudents dans leurs dépenses et les entreprises n’investissent pas, la dynamique de productivité peine à se relancer et partant la capacité à repartir de l’économie tunisienne est beaucoup plus limitée que par le passé”.
“Dans cet environnement, le gouvernement aura un rôle majeur dans la phase de reprise, notamment en boostant l’investissement public pour créer une impulsion sur l’ensemble de l’économie”, souligne-t-il.
Réduire les cotisations sociales des employeurs de 1% du PIB
Ben Rabah plaide également, pour une réduction des cotisations sociales qui pourrait alléger le fardeau sur les entreprises et faire face à la baisse d’activité.
Evaluant, l’impact d’une diminution des cotisations sociales de 1% du PIB sur les entreprises, il a montré qu’une baisse des cotisations sociales des employeurs de 1% du PIB, se traduit principalement, par une baisse du coût salarial de 0, 77%, une augmentation de l’investissement global de 0,11% et des exportations de 0,05%, pendant la première année.
Cette mesure aura également, pour effets une diminution du taux de chômage de 0,1%, ainsi qu’une augmentation de 4580 emplois salariés et de la consommation des ménages de 0,38%.
Assouplir le cadre juridique régissant le marché du travail
Toujours selon l’auteur de cette tribune, le code du travail tunisien constitue une contrainte en matière d’embauche, de licenciement, de formes de contrats de travail et en matière d’adaptabilité face aux aléas du marché.
La recherche de la flexibilité est, selon lui, indispensable à deux niveaux, à savoir le temps de travail et les réglementations liées aux formes des contrats du travail, de l’embauche et du licenciement.
S’agissant du temps de travail, le système horaire en Tunisie est annualisé et il est fixé par un accord collectif entre les partenaires sociaux. Cet accord ne prend pas en compte les aléas du marché et les spécificités sectorielles.
Le cas le plus flexible est celui du Royaume-Uni où l’Etat a légiféré en faveur d’une politique de réduction et d’aménagement du temps de travail, pour relancer l’emploi. Pour cela, deux grandes réformes ont été lancées, la première consiste à favoriser les emplois à temps partiel.
La deuxième consiste à inciter les entreprises à adopter les politiques de temps flexible, pour faire face aux fluctuations du marché. En ce qui concerne les réglementations liées aux formes des contrats du travail, de l’embauche et du licenciement, l’auteur pense que le caractère dissuasif du licenciement imposé par le code du travail tunisien présente, implicitement, un frein à l’embauche.
En effet, cette rigidité constitue un poids sérieux, essentiellement, au moment de la prise de décision de recruter de nouveaux employés, vu que les entreprises ne souhaitent pas subir des répercussions financières, à cause de la résiliation du contrat de travail.
Miser sur le secteur de l’agriculture
La crise a démontré que le secteur de l’agriculture semble le plus résilient face aux chocs. Ce secteur occupe une place importante dans l’économie nationale, de par son rôle déterminant dans la dynamique de croissance et son rôle social de par sa contribution à l’emploi (16% de la population active).
Ainsi, Ben Rabah pense qu’il est temps de s’intéresser davantage à ce secteur, en lui facilitant l’accès aux crédits bancaires. Aussi, une réforme foncière est nécessaire pour une utilisation plus fiable des terres disponibles.
Il appelle, enfin, à prendre des mesures pour faciliter aux agriculteurs l’accès aux marchés, en favorisant les circuits courts qui maintiennent un lien entre agriculteurs et consommateurs. Ceci permettrait également, de lutter contre la spéculation, la fraude et les situations de rente.