Créée en 2008 pour être le noyau d’un écosystème de biotechnologie, la Biotechpole de Sidi Thabet vient d’être relancée par l’effet de la pandémie de la Covid-19 et en prévision de l’arrivée d’autres épidémies.
Abou SARRA
Des laboratoires, bailleurs de fonds et investisseurs locaux et étrangers auraient manifesté, ces derniers temps, un vif intérêt, soit pour accélérer leur implantation dans cette technopole, soit pour financer des unités de bioproduction dans la Biotechpole de Sidi Thabet.
A la croisée des chemins entre recherche scientifique et esprit d’entreprenariat (bioproduction à haute valeur marchande), cette structure va gagner en visibilité en «offrant, entre autres, une structure d’appui dédiée aux startups de produits et services de santé », selon son PDG, Hamadi Ayadi.
Hachemi Louzir, membre du Comité scientifique de lutte contre le coronavirus et directeur général de l’Institut Pasteur de Tunis -institution qui détient 35% du capital de la société qui gère la biotechnopole-, est particulièrement enthousiaste pour la relance de cette structure.
L’Institut Pasteur a besoin de la biotechnopole
A maintes reprises, Louzir se réfère à cette biotechnopole et évoquer les enjeux pour la Tunisie d’intensifier ses investissements dans la bioproduction.
Au plan macroéconomique, il estime que « le secteur de la santé est perçu à tort comme un secteur consommateur alors qu’il a tous les atouts pour être aussi générateur et créateur de richesses et de croissance ».
Pour étayer ses dires, il cite quelques créneaux qu’il pense porteurs : l’industrie pharmaceutique et la biotechnologie et leur corollaire, la fabrication de médicaments à la portée de la Tunisie, s’agissant de médicaments contre le cancer, de vaccins, de molécules…
Il évoque, également, l’exportation des soins et la formation dans le domaine biomédical, des prothèses… Tous ces créneaux peuvent constituer des sources de création richesses. « Mieux, on peut développer ces créneaux avec nos propres moyens », dit-il.
Dans cet ordre d’idées, Hachemi Louzir a annoncé la signature d’un accord entre la Tunisie et la Grande-Bretagne visant à développer les industries biotechnologiques dans le domaine des médicaments en Tunisie.
Cet accord vise à produire des vaccins et à fabriquer des médicaments, tels que ceux utilisés pour traiter le cancer et les médicaments chimiques issus des biotechnologies. Les études relatives à cet accord seront lancées au cours du deuxième trimestre de 2021.
Il a ajouté que cet accord comprend un programme à moyen et long terme, financé et supervisé par le Royaume-Uni, qui permettra d’exporter des industries biotechnologiques vers l’Afrique grâce aux compétences et expertises de la Tunisie.
Dans une interview accordée à un magazine de la place, Louzir révèle par ailleurs un gros projet qui sera réalisé par la technopole en partenariat avec des bailleurs de fonds européens et la Caisse des dépôts et de consignations (CDC). «Une fois réalisé, ce projet prévoit de produire des vaccins avec des facilités de production différentes de ce qu’on est en train de faire», indique-t-il. Car, les scientifiques appellent ce qui se fait actuellement en Tunisie, de «la formulation». Le process technologique utilisé consiste à acheter d’abord, en vrac, le vaccin concentré, à le diluer, ensuite, et à le mettre, enfin, dans des seringues ou dans des flacons pour sa commercialisation.
Une logistique adaptée commence à se mettre en place
Pour être complet sur ce sujet, rappelons que la Biotechnopole de Sidi Thabet dispose, depuis octobre 2018, d’une pépinière d’entreprises spécialisées dans la biotechnologie.
Cette pépinière, dont la mise en place a coûté 3 millions de dinars (MDT) fournis sous forme de prêt de la Banque européenne d’investissement (BEI), a entamé ses activités par l’hébergement de huit startups -6 tunisiennes, une française (Novalix) et une canadienne- lesquelles ont investi pour leur part 4 MDT environ.
Ces entreprises innovantes sont actives dans les produits et services de santé. Il s’agit particulièrement de shampoings sans sulfate, de soins à la kératine et d’astaxanthine -un pigment couramment utilisé pour son pouvoir antioxydant et fabriqué à partir de la culture de microalgues…
Au final, nous pensons que, pour avoir le succès requis, la Biotechnopole de Sidi Thabet doit inciter les universités tunisiennes à accompagner cette réalisation et à lui fournir de biologistes et autres chercheurs formés dans les métiers demandés.
La Tunisie peut relever ce challenge de bioproduction. Pour ce faire, elle peut s’inspirer des expertises développées avec succès à l’international par des petits pays (par la superficie) comme la Suisse, Cuba et la Corée du sud.