Le spécialiste en droit public et expert auprès de l’organisation “Democracy Reporting International (DRI), Amine Thabet, estime que si le chef de l’Etat renvoie au Parlement le projet de loi amendant et complétant la loi organique relative à la Cour constitutionnelle, ou le conteste devant l’Instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de loi (IPCCPL), “ce serait pour des raisons politiques et non pour des raisons juridiques”.
Dans une déclaration aux médias en marge d’un forum de dialogue tenu mercredi, à Tunis, sur l’instauration de la Cour constitutionnelle, Thabet a fait observer que le président de la République peut, en vertu de ses prérogatives constitutionnelles, contester ledit projet de loi ou le renvoyer au Parlement pour une deuxième lecture s’il juge qu’il pose un problème d’ordre juridique ou des réserves constitutionnelles.
Selon lui, le projet de loi en question, adopté le 25 mars courant par l’Assemblée des représentants du peuple, “ne comprend aucune violation constitutionnelle claire, ni ambiguïté juridique “.
“Les amendements apportés au projet de loi sur la Cour constitutionnelle constituent une avancée positive pour hâter l’installation de la Cour constitutionnelle, notamment après avoir retiré le mot “respectivement” du texte de l’article qui, dans sa version initiale, prévoit que les membres de la Cour constitutionnelle sont désignés respectivement par l’Assemblée des représentants du peuple, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et le président de la République”, a-t-il soutenu.
Amine Thabet a, dans ce sens, appelé le CSM à accélérer le choix de ses quatre candidats pour la Cour constitutionnelle, eu égard notamment “aux tiraillements entre les Conseils qui le composent” (judiciaire, financier et administratif).
Pour sa part, le professeur de droit constitutionnel Chafik Sarsar a souligné que si le président de la République décide de renvoyer ce projet de loi pour une deuxième lecture, le Parlement aura besoin d’une majorité renforcée (131 voix) pour son approbation.
Constitutionnellement, le président de la République dispose d’un délai de quatre jours pour décider de renvoyer le projet de loi devant le Parlement, et ce à compter de ce mercredi, date d’expiration des délais de contestation de la constitutionnalité du projet devant l’IPCCPL, a-t-il précisé. “Si le chef de l’Etat décide de renvoyer le projet de loi au parlement, il doit motiver sa décision”.
De son coté, Sami Jerbi, membre de l’IPCCPL, a fait savoir qu’aucun recours concernant le projet de loi amendant et complétant la loi organique sur la Cour constitutionnelle n’a été déposé devant l’Instance, rappelant que les délais expirent ce mercredi à 18h.
Au cours de ce forum de dialogue, organisé par l’organisation DRI et l’Union des magistrats de la Cour des comptes, sur les effets de l’absence de la Cour constitutionnelle et sur le conflit de compétences entre les deux têtes de l’Exécutif, les intervenants ont mis l’accent sur la nécessité d’instaurer la Cour constitutionnelle qui, selon la Constitution, devait se faire en un délai d’un an après les élections législatives de 2014.
Ils ont unanimement souligné l’importance des amendements apportés au projet de loi concerné, et qui, selon eux, permettront de surmonter les difficultés qui entravent le processus d’instauration de la Cour constitutionnelle.
L’Assemblée des représentants du peuple avait adopté, le 25 mars, le projet de loi amendant et complétant la loi organique n° 2015-50 relative à la Cour Constitutionnelle par 111 voix pour, 8 abstentions et sans aucune objection.
Les amendements proposés par le gouvernement concernent principalement les articles 10, 11 et 12 de la loi organique relative à la Cour constitutionnelle.
Le premier président de la Cour des comptes, le bâtonnier de l’Ordre national des avocats de Tunisie, le premier président du Tribunal administratif, le président de la Commission parlementaire de la législation générale ainsi que des spécialistes en droit ont participé à ce Forum.