Ces derniers jours, les autorités tunisiennes ont annoncé le lancement d’importants projets en matière de développement des énergies vertes. Les experts y ont perçu une nette détermination du gouvernement à accélérer les investissements dans ce secteur porteur et à passer à la vitesse supérieure. Pour preuve.
Par Abou SARRA
La commission technique de la production privée d’électricité au sein du gouvernement, future structure indépendante pour gérer les énergies renouvelables, semble-t-il, a accordé, le 19 mars 2021, une concession pour la réalisation de projets de production d’électricité à partir de l’énergie solaire, d’une capacité de 500 mégawatts.
L’heure est aux concessions
Auparavant, les autorisations concernaient deux régimes de petite dimension : l’autoproduction et les petits projets de 1 à 10 mégawatts. Jusqu’à ce jour, une cinquantaine de projets de cette dimension ont été approuvés. Ce qui a porté la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité à 3%.
Selon des experts, ce mégaprojet, une composante de 3 800 mégawatts, soit 30% des besoins en électricité que le pays compte installer, d’ici 2030, ouvre officiellement de nouveaux horizons aux énergies renouvelables.
Le projet aura pour avantage de réduire la pression sur le budget de l’Etat et de réduire le coût de subvention de l’électricité de 200 millimes à 80 millimes le kilowattheure. Il permettra, aussi, de réduire de 6% le coût de l’importation du gaz destiné à la production d’électricité, soit l’équivalent de 130 millions dinars, du budget de l’Etat.
Le marché reste ouvert aux petits développeurs
Le 26 mars 2021, parallèlement à ce mégaprojet qui serait, d’après nos informations, un test pour le lancement d’autres projets de plus de 500 mégawatts, la même Commission technique de la production privée de l’électricité a approuvé 16 nouveaux projets de production d’électricité à partir des énergies renouvelables (ER). Il s’agit de six projets d’une capacité de 10 mégawatts (MW) et de 10 projets d’une capacité de 1 MW chacun.
Les prix proposés seraient compétitifs, toujours d’après les experts, car les projets de la catégorie 10 MW proposent des tarifs variant entre 114,9 à 121 millimes le kilowattheure (kwh), tandis que les projets de 1 MW ont été proposés à un tarif variant entre 176 et 186 millimes le kwh.
Pour sa part, l’Agence nationale pour la maîtrise de l’énergie (ANME) a décidé, le 27 mars 2021, de réduire la prime destinée aux équipements d’autoproduction d’électricité. Ainsi, à compter du 1er avril 2021, la prime destinée aux équipements de capacité installée supérieure à 1,5 kW passera à 500 dinars/kW installé au lieu de 1 200 dinars.
Cela pour dire que les autorités tunisiennes semblent déterminées à agir sur les trois régimes d’autorisation (autoproduction, petits projets, concession) pour développer les énergies renouvelables.
Quid de la STEG ?
Il semble aussi que la Société tunisienne de l’électricité et du gaz (STEG) ne s’oppose plus à la production privée d’électricité à partir des énergies vertes. Pour deux raisons principales.
La première concerne les négociations en cours pour résoudre la problématique des surcoûts générés à ses dépens par le transport d’électricité produite à partir des énergies vertes.
La deuxième porte sur la possibilité fournie par les bailleurs de fonds de lui accorder directement des crédits (une bouffée d’oxygène en ces temps difficiles) pour peu qu’elle accepte de cohabiter, dans le domaine d’exploitation des énergies renouvelables, avec des développeurs privés.
Cela pour dire au final que de nombreuses conditions favorables sont désormais réunies pour promouvoir, sur de nouvelles bases, les énergies vertes en Tunisie. L’objectif de la stratégie de transition énergétique qui vise à réduire de 30% la consommation d’énergie primaire et d’augmenter la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité à 30% à l’horizon 2030 est réalisable.
Un pays comme l’Allemagne, qui a entamé sa transition énergétique avec une part de 6% des énergies renouvelables dans la production de ses besoins en électricité, est aujourd’hui à 60%. Certes l’Allemagne n’est pas la Tunisie, mais c’est possible…