Quarante-quatre groupes environnementaux tunisiens, italiens, européens et internationaux ont demandé, au Premier ministre italien, Mario Draghi, et au commissaire européen chargé de l’Environnement, des Affaires maritimes et de la Pêche, Virginijus Sinkeviius, de ne plus retarder le retour immédiat des déchets municipaux italiens illégalement expédiés vers la Tunisie en 2020.
Selon ces acteurs de la société civile internationale, dont le Réseau Tunisie Verte, le réseau international GAIA (Global Alliance for Incinerator Alternatives), le réseau d’action de Bâle (Basel Action Network) et Zero Waste Europe, le droit environnemental européen et international, indique clairement, que l’Italie aurait dû récupérer ses déchets il y a au moins trois mois.
Le communiqué revient sur les péripéties de ce scandale avec l’exportation illégalement, en 2020, par la Société italienne Sviluppo Risorse Ambientali de 282 conteneurs de déchets municipaux mixtes vers la Tunisie, sous des allégations trompeuses, selon lesquelles les déchets étaient traités et seraient recyclés.
Il s’agissait de déchets municipaux mixtes, avec peu de chances de recyclage.
Ce scandale, qui a révélé la compromission de hauts fonctionnaires tunisiens dans cette affaire, a “coûté son poste à l’ancien ministre de l’Environnement et entraîné des poursuites et plusieurs détentions.
Selon les termes de la Convention de Bâle, de la Convention de Bamako, du Protocole d’Izmir et de la Convention de Barcelone, l’exportation de déchets ménagers de l’Italie vers la Tunisie était un trafic illégal et un acte criminel.
En outre, l’Italie est tenue de rapatrier les déchets dans les 30 jours suivant la découverte d’un trafic illégal, rappelle communiqué. Mais, plus de trois mois après la date limite du 8 janvier 2021, pour la réexpédition des conteneurs les autorités nationales italiennes n’ont toujours pas rapatrié les déchets, comme l’exige la Convention de Bâle.
Le 3 mars 2021, les organisations Réseau Tunisie Verte, le réseau international GAIA, le réseau d’action de Bâle et Zero Waste Europe ont publié un bref rapport sur la légalité de ces envois et ont appelé à leur rapatriement. Suite à une absence totale d’action du côté de Rome, des groupes tunisiens ont manifesté devant l’ambassade d’Italie le 1er avril 2021, exigeant la récupération des déchets par ce pays.
Le 29 mars 2021, les eurodéputés italiens Piernicola Pedicini et Rosa D’Amato (Verts / Alliance libre européenne) ont demandé à la Commission européenne, des comptes sur les moyens d’assurer la conformité du gouvernement italien à ses obligations dans le cadre de la Convention de Bâle et de garantir que cela ne se reproduira plus.
Un tribunal de Rome a tranché en référé interdisant l’utilisation de la garantie financière que l’exportateur italien avait fournie pour les expéditions, alors qu’une décision quant au fond est attendue pour le 15 juin. Entre temps rien ne prouve que le gouvernement national italien ait agi pour éliminer les déchets comme requis, selon les organisations signataires du communiqué.
“Les querelles judiciaires entre l’exportateur italien, la compagnie d’assurance et les autorités gouvernementales n’ont aucun rapport avec l’obligation de rapatrier”, a déclaré Sirine Rached de l’Alliance mondiale pour les alternatives aux incinérateurs, dont les propos sont cités dans le communiqué. “Les autorités nationales italiennes doivent assumer les frais immédiats dès maintenant et rester libres de recouvrer les frais des coupables plus tard.”, a-t-elle dit.
“Le rapatriement reporté augmente le risque de préjudice que les Tunisiens subissent de ces expéditions illégales, alors que le mélange toxique d’ordures italiennes continue de pourrir dans le port de Sousse”, a déclaré de son coté Hamdi Châabane du Réseau Tunisie Verte. “Nous ne comprenons pas pourquoi le gouvernement italien croise les bras dans cette affaire. Et nous ne pouvons pas comprendre comment la Commission européenne permet à l’Italie de croiser ses bras. La loi est claire, les expéditions étaient illégales et l’Italie doit en porter la responsabilité initiale “, s’est insurgée Semia Gharbi de Réseau Tunisie Verte.
Rappelons que le ministre des Affaires locales et de l’Environnement, Kamel Doukh, avait déclaré, le 5 avril 2021, que la Tunisie a constitué un dossier juridique sur les déchets italiens importés afin de le porter devant la justice internationale. Le ministre avait fait savoir que la Tunisie est actuellement, en train d’œuvrer avec l’Italie afin de réexpédier les conteneurs de déchets italiens vers leur pays d’origine, indiquant que les tribunaux italiens avaient déjà statué dans cette affaire, en sommant l’entreprise italienne exportatrice à récupérer ses déchets.
Les déchets ménagers italiens, dont l’exportation est interdite par la législation tunisienne et par les conventions internationales, se trouvent, au port de Sousse depuis l’été 2020.Des poursuites judiciaires ont été engagées contre 26 personnes en Tunisie, dont l’ancien ministre de l’Environnement, Mustapha Aroui, et des cadres de la douane dans le cadre de cette affaire qui a entraîné l’arrestation au début de huit autres personnes, dont certaines ont été libérées par la suite.
Par ailleurs, le gérant de la société tunisienne importatrice est toujours en fuite.