La délégation tunisienne, conduite à Washington, lundi 3 mai 2021, par Ali Kooli et Marouane Abassi, respectivement ministre des Finances et Gouverneur de la BCT, ne s’est pas déplacée sans un programme de réformes à soumettre au FMI afin de le convaincre d’un nouvel accord pour un prêt de 4 milliards dollars américains à la Tunisie.
Un plan de 26 points dont l’optimisation du recouvrement des créances fiscales, à savoir les créances constatées et les créances faisant l’objet de contentieux judiciaires afin d’augmenter les recettes du budget de l’État, l’élargissement de l’assiette fiscale et l’optimisation des contrôles fiscaux à travers l’adoption d’une série de mesures ainsi que la généralisation de la TVA à un maximum de produits et de contribuables.
Mais aussi la négociation de mesures innovantes visant l’allègement de la masse salariale à travers la baisse des effectifs par la mise en place d’un programme de départs volontaires permettant aux fonctionnaires de conserver 25% de leur salaire net plus les cotisations sociales et se consacrer à une autre occupation y compris une activité rémunérée autre que dans le secteur public et les entreprises publiques.
Ainsi que l’adoption d’un nouveau programme de départs anticipés à la retraite avec une prise en charge par l’État du différentiel de pension payé à l’âge légal de la retraite, et l’incitation au travail partiel à 50% du temps du travail ou 1 jour par semaine contre une partie équivalente du salaire.
Rappelons que la masse salariale s’élève à plus de 19 milliards de dinars en 2020, soit l’équivalent de 60,6 % des ressources budgétaires (hors dons et emprunts) contre une moyenne de 52,2 % durant la période 2010-2019.
Dans le plan de réforme figure également la réduction du coût de la Caisse générale de compensation qui pèse de plus en plus lourd sur le budget de l’État. Un budget hors énergie qui n’a cessé d’augmenter depuis une dizaine d’années. Il est passé de 730 millions de dinars (MDT) et 1,2 % du PIB en 2010 à respectivement 2,722 milliards de dinars et 2,3 % du PIB en 2020.
L’objectif de cette réforme est de passer de la subvention des prix à la compensation des revenus, de mieux cibler les dépenses sociales et de réduire le déficit budgétaire.
L’UGTT menace déjà
Tout cela est bien beau si ce n’est que les staliniens de l’UGTT ont déjà commencé à opposer des niet irrévocables à toute velléité de la part de l’Etat à comprimer les salaires ou à toucher n’importe quel privilège du secteur public.
Il n’est donc pas évident que le FMI accorde le prêt de 4 milliards de dollars sollicité par la Tunisie d’autant plus que sa première condition est que la masse salariale ne dépasse pas les 15% du Budget de l’Etat. Ceci sans oublier les réformes structurelles de la compensation et des Caisses sociales que le gouvernement en poste aujourd’hui est d’une faiblesse telle qu’il sera incapable de les appliquer.
Le Fonds monétaire international exige également l’approbation des partenaires sociaux, l’UGTT en prime, pour s’engager avec la Tunisie. Ce n’est donc pas donné. D’ailleurs, Noureddine Taboubi aurait refusé d’accompagner la délégation tunisienne à Washington comme Samir Majoul, président de l’UTICA, pour ne pas avoir à s’engager sur des mesures impopulaires qui le mettraient en porte à faux avec son organisation.
Aucune certitude quant à une issue positive dans une Tunisie où l’Etat se soumet dès qu’on enclenche des grèves et signe les accords d’augmentation de salaires à chaque fois qu’on le lui demande parce qu’incapable de neutraliser le coût de la vie et avec pour seul souci se maintenir en place.
Affaire à suivre.
A.B.A