Le secteur de la santé est le premier à figurer sur la “Short list“ de TICAD 8. Une stratégie d’expansion à l’international s’ouvre à lui.
Ce mercredi 26 courant a été donné au siège de l’UTICA le coup d’envoi de la Tokyo International Conference on African Development “TICAD 8“ en ce qui concerne sa phase exploratoire. L’événement était suivi à distance à partir de Tokyo. Ce premier round s’est tenu avec la filière de la santé, de l’industrie pharmaceutique et du bien-être, entendez par-là la thalasso et la balnéothérapie.
En route pour le livre blanc
Tokyo International Conference on African Development à sa 8ème édition (TICAD 8) se tiendra à Tunis à la fin du mois d’août 2022. En bref, la TICAD se propose de ficeler des partenariats d’affaires entre opérateurs japonais et tunisiens pour opérer sur le reste du continent. Cette initiative, laquelle aborde à présent sa phase de réalisation, se propose de cibler les secteurs économiques pour lesquels la Tunisie possède des avantages comparatifs confirmés.
De même que le rappelait Hédi Ben Abbès, président de la Chambre tuniso-japonaise, c’est sur la base de ces traits de compétitivité que seront identifiés les partenaires japonais qui embarqueront dans cette aventure. Et la triangularité avec l’Afrique a des exigences de haut niveau. Les organisateurs et les opérateurs y voient un gage de succès pour l’initiative dans son ensemble.
Et Shinsuke SHIMIZU, ambassadeur du Japon en Tunisie, évoquera le cas d’un partenariat monté avec la Tanzanie concernant une unité de fabrication de vaccins contre la malaria. L’opération s’est soldée par une success story. La barre étant mise très haut et cela fait que la partie japonaise a ce souci permanent de succès éclatant pour chaque opération qui sera montée dans le cadre de la TICAD.
Toutes les parties prenantes sont sensibles à cet aspect. Les briefings avec les divers secteurs seront assurés avec le concours des fédérations nationales de l’UTICA. Le calendrier prévoit une rencontre lors du mois de juin prochain avec la filière IT et intelligence artificielle. Cela se fera à Novation City, le technopark de Sousse. Suivra au mois de septembre le secteur des énergies renouvelables et de l’environnement.
Au mois d’octobre ce sera au tour du secteur des composants automobiles. Pour terminer au mois de novembre avec celui de l’agrobusiness. Et si dans l’intervalle d’autres filières manifestaient un intérêt pour l’opération, elles pourraient intégrer le cycle de ces travaux préparatoires/probatoires.
En fin de parcours, il sera rédigé un “livre blanc“ constitué de fiches de projets, secteur par secteur. Ce catalogue aidera les entreprises japonaises à conclure le matching avec les entreprises tunisiennes concernées. Et c’est à l’issue de cela que se tiendra alors TICAD 8 à proprement parler et que se présenteront les bailleurs de fonds.
L’état des lieux sur le continent
Le secteur de la santé sur le continent est en dynamique de développement. Cependant, il progresse à petits pas et ses avancées le laisse toujours en dessous des objectifs du développement du millénaire des Nations unies (ODD). En effet, l’Afrique porte 17,2% de la population mondiale mais ses dépenses de santé ne représentent que 1,3% de l’enveloppe mondiale des dépenses de santé. Cela laisse de la marge et présente des opportunités d’affaires considérables.
L’Afrique du Nord, pour sa part, serait mieux lotie que le reste du continent avec un total de dépenses de santé par habitant de 221 $ US contre 82 $ pour les Etats de l’Afrique de l’Ouest par exemple.
Rappelons que la moyenne continentale est de 77 $, contre une moyenne européenne de 2 900 $ US. Ce qui est révoltant, c’est que l’Afrique a connu lors des dix dernières années un taux moyen de croissance de 5%. A priori cela ne justifie pas ce gap. On comprend ce retard quand on voit que 37% des dépenses de santé sur le continent sont autofinancées par les ménages. Il y a par conséquent une tare structurelle largement répandue dans les systèmes de financement des soins. Et il convient de contribuer à aider à relever ce défi.
Le check Up avec l’industrie de la santé
En Tunisie, l’on dénombre plus de 40 unités industrielles qui fabriquent des génériques mais aussi de produits sous licence. Certains opérateurs ont investi en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Cameroun et en Algérie. L’objectif pour la filière est d’arriver à exporter, à horizon 2025, 40% de sa production, ce qui est hautement probable. La profession est assez avancée au plan scientifique et il est probable qu’une agence nationale des médicaments soit mise sur pied à horizon proche avec la possibilité d’aller vers des procédures régionales d’AMM (Autorisation de Mise sur le Marché). Ce serait un acte d’affranchissement par rapport à la politique de Big Pharma, le consortium mondial le plus influent dans le métier.
En résumé l’on dira donc que le secteur dispose d’une expérience réussie dans le domaine de l’exportation et de la sous-traitance pour l’exportation.
Par ailleurs, dans le domaine du bien-être, c’est-à-dire le tourisme médical, d’accueil des seniors et de thalassothérapie, la Tunisie se prévaut de termes de références de qualité. Le pays est l’un des pionniers en thalasso car il s’est lancé dans la filière depuis 1997. Il dispute la première place à la France en région méditerranéenne. La Tunisie est première destination de santé sur le continent loin devant le Maroc et l’Afrique du Sud. En 2020, ils étaient 500 000 à venir se soigner en Tunisie. En 2017, les recettes du tourisme de santé se montaient à 2,5 milliards de dinars contre 2,8 pour le reste des produits touristiques et contre 1,4 milliard de dinars pour le secteur des phosphates.
En outre, les cliniques privées ont fait une percée remarquable en termes d’équipements médicaux avancés et que le système de formation possède un standing développé et reconnu pour ses exigences pédagogiques.
Quant à la sphère pharmaceutique, elle s’est dotée de l’étage supérieur, à savoir le CRO – soit le compartiment d’essais cliniques. Ces essais valident la qualité des médicaments. Le budget mondial des essais avoisine les 150 milliards $ US, mais le continent africain n’en capte que 3,2 %. Cela laisse de la marge.
Le pari de l’espoir
TICAD 8 survient à un moment où la Tunisie doute d’elle-même. Et voilà comme par enchantement nait l’espoir d’une relance. Et d’un redéploiement à l’international avec un compagnon de route de bonne fortune. L’Afrique sera-t-elle l’Eldorado pour la Tunisie, du moins pour le secteur de la santé l’espoir est permis ? Si l’économie survit à la pandémie de Covid-19 et que TICAD se confirme, le pays pourrait renouer avec le dynamisme économique. Et cela aura un goût étrange venu d’ailleurs.