L’ampleur de la crise de la pandémie sanitaire s’est approfondie pour inclure des franges de la population plus larges, avec des expressions devenues plus sévères et violentes au cours du mois de mai 2021, a fait savoir le Forum tunisien pour les droits économique et sociaux (FTDES).
Dans son rapport mensuel sur les mouvements de protestation durant le mois de mai 2021, le forum estime que cette situation résulte de plusieurs facteurs liés à la faiblesse, à la confusion de l’Etat, à la tendance persistante à l’improvisation, au chaos dans la prise de décision et à l’absence de toute vision claire pour faire face ou atténuer l’impact des répercussions de la propagation du virus Covid-19.
Cet approfondissement a été traduit essentiellement par “la rébellion et la désobéissance aux décisions et mesures annoncées par le gouvernement au cours de la semaine de l’Aid El-Fitr, quand les commerçants, travailleurs dans les cafés et restaurants, et même les citoyens ont refusé de respecter le confinement total ou le calendrier de l’interdiction de la circulation pour forcer le président du gouvernement à sortir à nouveau et à modifier ses décisions”.
En effet, le mois de Mai, a connu une évolution notable du volume des mouvements de protestation et des revendications sociales, le résultat ayant bondi d’environ 25% par rapport au mois précédent, de sorte que le nombre de protestations est passé de 841 mouvements au cours du mois d’avril 2021 à 1 155 mouvements durant le mois de mai 2021.
La répartition des mouvements de protestation au niveau national a été caractérisée par une sorte d’” équité ” car le volume des protestations a été presque égal entre les régions de l’est et les régions de l’ouest de la carte.
Cette répartition, peut être expliqué, selon le FTDES, par le fait que tous les tunisiens partagent aujourd’hui les mêmes problèmes et préoccupations. La précarité économique, les problèmes sanitaires ou sociaux ou les défauts en infrastructures ne sont plus la particularité des régions Ouest du pays, lit-on de même source.
Le gouvernorat de Gafsa occupe toujours la première place dans le classement des régions les plus protestataires, enregistrant 242 soit plus de 20% du total des mouvements que le mois a connu, suivi du gouvernorat de Tunis avec 186 mouvements.
Quant à la troisième place, c’est le gouvernorat de Gabès qui s’y est positionné avec 89 mouvements, suivi du gouvernorat de Sousse avec 75 mouvements et qui a constitué un nouvel acteur qui n’a pas connu le même niveau de mouvements et de protestations les années précédentes.
La cinquième place est partagée à parts égales entre les gouvernorats de Kairouan et Tataouine avec 68 mouvements de protestation.
Les acteurs sociaux ont partagé leurs mouvements de protestation durant ce mois de Mai 2021 entre la protestation organisée avec environ 496 mouvements (42,9%) et la protestation instantanée et qui a été dans les limites des 659 mouvements de protestation (57,1%).
Globalement, les citoyens ont protesté dans une tendance d’escalade des manifestations anarchiques, puisque 933 mouvements anarchiques (80,8%) ont été enregistrés au cours du mois de Mai 2021, contre 222 manifestations non anarchiques (19,2%).
Selon le FTDES, la majorité des mouvements ont été sous forme de sit-in vu que le mois de Mai 2021 a enregistré environ 577 jours de sit-in (50%). Les grèves ont présenté 18% des formes de protestations, les rassemblements 10,9% et les fermeture 5,6%.
Comme les mois précédents, les mouvements dans leur ensemble ont pris une dimension économique et sociale puisque plus de la moitié (55% ) des mouvements de protestation en Mai 2021 ont porté sur des revendications sociales ou économiques visant principalement des secteurs publics (45%), contre seulement 15% pour les secteurs privés.
Le reste des revendications se sont orientées de manière équivalente entre le secteur environnemental, juridique (10%), le secteur éducatif (7%), le secteur de la santé (8%) et le droit à l’eau (6%).
La lecture genre des acteurs sociaux au cours du mois de Mai 2021 a révélé que la majorité des mouvements sociaux et contestataires ont été sous une forme mixte entre femmes et hommes, ils ont représenté 85% du volume total des mouvements face à 14% de protestations menées seulement par les hommes et 1% menées par les femmes.
Les espaces de travail et les institutions administratives et éducatives ont représenté les premiers cadres (27%) qui ont connu les mouvements de protestation relevés au cours du mois de Mai 2021, suivi de l’espace public comme des routes (13%) et l’espace virtuel – invisible -. Ils sont suivis des sièges de production, des municipalités et des gouvernorats. Les employés sont, dès lors, les acteurs sociaux qui ont le plus initié des mouvements avec 24% de l’ensemble des mouvements, suivis par les chômeurs avec 12%, les travailleurs avec 12% les jeunes avec 10% et les médecins avec 7%.
Le forum a, par ailleurs, mis en garde contre une nouvelle vague de mouvements de contestation sociale, l’émergence de mouvements liés à la soif et au problème d’approvisionnement en eau potable face à un cadre général et un climat politique, sanitaire, économique et social qui agiront comme répulsifs pour la jeunesse tunisienne et seront, selon la même source, une motivation pour son départ à la quête d’une meilleure alternative, que ce soit par la migration non-réglementaire ou dans un cadre réglementaire par la fuite des cerveaux et des cadres.