Le “Jardin de l’Afrique” à Zarzis, près de Médenine au sud-est tunisien, est un jardin pas comme les autres où poussent des fleurs odorantes et des plantes parfumées comme l’ambrette et le jasmin.
Dans ce jardin luxuriant, sont plantés certaines arbres sacrées dans les référentiels de l’Islam et du christianisme; cinq oliviers symbolisant les cinq piliers de l’Islam et 12 figuiers au nombre des Apôtres qui sont les disciples de Jésus.
A priori, ce jardin unique en son genre n’a rien de particulier. En y pénétrant, on découvre un lieu où reposent les cadavres sans noms de toutes les personnes ayant perdu la vie dans leur périple en Méditerranée, cette mer devenue un cimetière à ciel ouvert…
Plus de 2 500 mètres carrés pour des gens à la recherche d’un avenir meilleur et une vie décente que le destin a réunis. Ces victimes de la migration irrégulière ont fini par se retrouver sous cette terre d’Afrique du Nord, un lieu de passage assez fréquenté pour les clandestins des routes maritimes.
Un cimetière et une noblesse humaine
L’artiste plasticien algérien, Rachid Koraïchi, 74 ans, a aménagé ce jardin pour en faire un temple et la demeure finale de ces immigrés dont les corps sans vie ont été éjectés par les eaux sur les cotés tunisiennes. Un geste de noblesse humaine pour préserver la dignité humaine de ces malchanceux au sort tragique dont la vie n’est pas facile et la mort non plus.
Ce cimetière, dont la construction a pris 3 ans, abrite plus de 600 tombes. La maquette des lieux est conçue avec une belle esthétique et un parterre en céramique et des couleurs en vert et blanc.
Avec les vagues migratoires constamment en hausse, le nombre des tombes risque de se multiplier surtout que le mouvement des eaux en Méditerranée converge vers les cotes de Zarzis. Devant ce constat, l’artiste algérien oeuvre à l’élargissement de la capacité d’accueil du cimetière sans pour autant vouloir dévoiler les coûts de ce projet à portée humaniste.
Un encouragement et une rencontre…
Sa fille, activiste à Londres, l’avait motivé à rejoindre Zarzis en 2018 où il a eu une rencontre avec le président du Croissant rouge tunisien (CRT). Ce dernier lui avait facilité la tâche pour achever la construction de ce cimetière qui préserve la dignité de ces personnes mortes dans l’anonymat total loin de chez eux.
Des milliers de migrants ont quitté un monde où ils avaient enduré la pauvreté, la haine et le racisme dans leurs traversées périlleuses, entre desserts et mers.
Lors de sa visite, mercredi 9 juin 2021, à Zarzis, la directrice générale de l’Unesco, Audrey Azoulay, a offert un “Arbre de la paix” à Rachid Koraïchi qui est destiné à son Jardin de l’Afrique.
L’Arbre de la paix est une sculpture d’Hedva Ser, artiste de l’UNESCO pour la paix et Ambassadrice de bonne volonté de l’UNESCO pour la diplomatie culturelle. Cette œuvre réunit, dans un entrelac de branches nouées et de colombes envolées, les valeurs de paix promues par les Nations Unies.
Le Jardin d’Afrique est le cimetière des migrants sur les terres d’Afrique vers l’eldorado européen. Il raconte des histoires inavouées sur le sort de migrants qui sont nés et ont vécu méconnus dans leur propres patries pour finir un chiffre sur une plaque commémorative.
Leur vie est réduite en ces effets vestimentaires qui ont été inscrits dans l’espoir de pouvoir un jour aider leurs proches éventuels à les identifier.