Le dossier de la Justice transitionnelle est revenue cette semaine au premier plan de l’actualité suite à la publication du ” livre blanc “, par l’initiative du ” non-retour ” qui travaille en étroite collaboration avec la coalition civile pour la défense de la justice transitionnelle.
Cette initiative regroupe Avocats sans Frontières, le Forum tunisien des droits économiques et sociaux et l’organisation AlBawsala.
Le document contient des propositions et recommandations sur a réforme de la justice, de la sécurité et des libertés individuelles ainsi que sur la réparation des dommages, la bonne gouvernance des institutions publiques et la lutte contre la corruption.
Au cours d’une conférence de presse mercredi dernier consacrée à la présentation du ” livre blanc “, le représentant de l’Organisation contre la torture en Tunisie, Mondher Cherni, qui a supervisé l’élaboration du document a souligné que l’Etat est appelé d’appliquer les recommandations émises de l’Instance Vérité et Dignité (IVD), conformément à la loi.
Pour les membres d’Avocats sans Frontières, il existe beaucoup d’atermoiement et de lenteur au niveau du processus de la justice transitionnelle, malgré le fait que plusieurs responsables dans l’ancien régime (directeurs généraux) avaient été entendus par la Justice.
Les propositions contenues dans le ” livre blanc ” ont été élaborées sur la base de la réalité des chambres spécialisées en Justice transitionnelle opérationnelles, qui, depuis le 29 mai 2018, n’ont rendu aucun jugement dans les affaires de violation des droits humains et de torture. Khayem Chemli, chef de projet à Avocats sans Frontières a relevé, dans ce sens, que ajouté que 205 affaires portées devant la Justice attendent toujours d’être résolues.
Il a ajouté, dans une déclaration à l’agence TAP qu’aucun des 237 mandats d’amener émis n’ont été exécutés, tenant le chef du gouvernement qui assure l’intérim à la tête du ministère de l’Intérieur responsable de cet état d’impunité.
La police judiciaire fournit des alibis et arguments illogiques pour ne pas exécuter les mandats d’amener émis contre des membres de la police et des responsables, impliqués dans des affaires de torture, a-t-il regretté.
Ces obstacles qui s’ajoutent aux tentatives de prolonger le processus judiciaire en changeant à chaque fois de défense, a pour objectif de gagner du temps, en attendant la loi sur la réconciliation générale, a-t-il estimé.
Une réconciliation politique globale est de nature à menacer la paix sociale dans la mesure où les victimes de tortures qui appartiennent à toutes les familles politiques, y compris les islamistes n’accepteront pas cette solution.
Avocats sans Frontière précise que face à cs pratiques, les magistrats ont usé de tous les moyens prévus par la loi pour ne pas se contenter d’un mandat d’amener. En effet, l’article 142 nouveau du Code de procédure pénale prévoit que si l’inculpé se soustrait par la fuite aux poursuites dont il est l’objet, le tribunal peut décerner contre lui mandat d’amener ou mandat de dépôt et ordonner, en outre, sur conclusion du ministère public le séquestre de ses biens.
Chemli a mis en avant l’importance de cette mesure qui oblige les accusés à comparaître devant la Justice, faisant observer que sur les 1500 personnes concernés, 10% seulement ont comparu devant les tribunaux. La Justice peut rendre des jugements par contumace mais la révélation de la vérité et la reconnaissance des faits sont primordiales dans le processus de la Justice transitionnelle.
Il a fait observer que contrairement aux affaires de torture et des ” affaires de sang “, les personnes impliquées dans des faits de corruption (54 affaires) assistent souvent au procès. Il s’agit des affaires de ” Carthage Cement “, de l’ATCE (Agence tunisienne de la communication extérieure) ou encore du dossier n°31 qui concerne, pratiquement, tous les symboles de l’ancien régime.
L’organisation Avocats Sans Frontières est une composante de la Coalition civile pour la défense de la Justice transitionnelle. Elle travaille directement avec les victimes de violations.
L’organisation avait déjà présenté des recommandations sur la Justice transitionnelle dont ” le Libre blanc ” paru récemment et qui appelle à l’application des recommandations de l’Instance Vérité et Dignité.