La subvention accordée à travers le Fonds de transition énergétique (FTE) à l’acquisition et l’installation des équipements photovoltaïques (PV) à puissance installée dépassant 1,5 KW a été baissée de 1 200 dinars/KW à seulement 500 dinars/KW.
Cette baisse annoncée par l’Agence nationale de la maîtrise de l’énergie (ANME), le 26 mars 2021, n’a pas été appréciée par des acteurs de la filière, qui craignent un risque systémique sur les activités d’environ 400 entreprises du secteur et sur la promotion des énergies renouvelables en Tunisie, surtout la branche solaire PV.
Pour un grand responsable syndicale, cette mesure ne peut être que bénéfique pour le secteur.
“La filière pourrait se porter mieux et évoluer sans cette subvention “, affirme Ali Kanzari, président de la Chambre syndicale des intégrateurs en photovoltaïque “CSPV”, relevant de l’UTICA.
Dans un entretien accordé à l’agence TAP, le responsable, qui compte lui même parmi les grands entrepreneurs du secteur, a évoqué sa vision pour mettre en place une filière nationale solide des énergies renouvelables et a plaidé en faveur de la suppression de la subvention. Il a aussi proposé d’autres alternatives pour “fluidifier” le processus de transition énergétique.
Ainsi, pour bénéficier de la subvention, les intégrateurs en PV sont appelés à passer par plusieurs étapes qui commencent par un contrat-programme avec l’ANME ( à signer par le Ministre de l’Energie) et se terminent par la réception et la validation de conformité des projets énergétiques, ce qui équivaut à 7 ou 8 mois de va et vient, pour la signature du contrat programme.
Les goulots d’étranglement qui retardent les projets…
Tant d’étapes qui retardent la réalisation des projets et “empoisonnent”, les relations entres les divers acteurs et l’administration qui prend tout son temps pour assurer le raccordement des installations au réseau et la réception des projets installés.
Selon Kanzari, l’autre goulot d’étranglement réside dans la réception des installations sur les toitures par les agents STEG. Il est temps d’externaliser cette action, d’être plus “audacieux” et d’ouvrir de nouveaux horizons devant les sociétés, ainsi que pour les techniciens et les ingénieurs de la STEG.
“L’idée est de permettre, à travers l’essaimage, à ces techniciens de créer des entreprises spécialisées dans le contrôle de la réception, la validation des projets solaires photovoltaïques et le raccordement au réseau, pour faire gagner du temps aux sociétés, leur permettre d’accélérer le rythme des installations, ainsi que alléger le fardeau de la STEG, souvent critiquée avec l’ANME pour la lourdeur des procédures “, explique le président de la CSPV.
600 à 800 WC générerait des ressources gratuites aux populations vulnérables
En ce qui concerne la subvention, Kanzari a souligné que ” cette subvention accordée n’est pas un droit acquis pour les sociétés installatrices. Elle est plutôt destinée à baisser les coûts au profit des citoyens, donc il faut penser plutôt à accélérer la mise en place du programme économique et social, proposé par le gouvernement, ce qui pourrait toucher 1 million d’abonnés de la STEG, soit ceux, dont la consommation est de moins de 1800kwh par an et aussi les catégories vulnérables “.
Un système d’énergie solaire PV de 600 à 800 WC aiderait, selon lui, à alimenter les populations vulnérables en électricité gratuite. “Ceci pourrait aussi alléger le fardeau de la STEG et toucher les populations rurales “, a-t-il dit. Les ruraux pourraient ainsi, s’approvisionner en énergie solaire gratuite, ce qui de nature à permettre, à la STEG de pratiquer une tarification sans recours à la subvention.
Pour aider les sociétés à résister et à pérenniser leurs activités, il faut supprimer les taxes sur les modules photovoltaïques, onduleurs, les éoliennes et sur les batteries de stockage à lithium qui sont indispensables pour stocker l’électricité pendant la nuit.
Supprimer les taxes…
Il faut aussi rendre les entreprises de la filière plus performantes à travers l’amélioration de la qualité de leurs offres et services. “Nous avons de l’expertise, les qualifications requises et les conditions climatiques favorables pour ancrer une filière d’énergie solaire et accélérer le rythme de transition énergétique “, lance-t-il.
“L’Allemagne, qui ne dispose pas des mêmes conditions d’ensoleillement qu’en Tunisie, a réussi à installer 100 000 MW d’énergies renouvelables, alors que nous, nous peinons à avancer et nous sommes toujours à seulement 400 MW d’énergies renouvelables, dont 150 MW en photovoltaïque”, regrette Kanzari.
Il fait savoir que la Chambre syndicale est en train de travailler avec les parties prenantes et en coordination avec l’Institut de métrologie légale en Allemagne (PTB) et les partenaires locaux – le Centre technique des industries mécaniques et électriques (CETIME), l’INNOPRI (Institut national de normalisation et de propriété industrielle), le Centre technique des matériaux de construction, de la céramique et du verre (CTMCCV), l’ANME et l’Organisation de défense du consommateur (ODC) – pour la création d’un label confiance pour les entreprises de la filière solaire PV en Tunisie.
“Ce label pourrait aider à organiser le marché, à respecter les normes qualité et à préserver les droits de tous”.
Kanzari estime que le système ne doit plus être accablé par les paperasses de la subvention et les procédures administratives. ” Une fois fluidifié, ça va servir la STEG, l’ANME et tout le monde “.
Le panneau PV en Tunisie, le plus cher au monde
Il faut aussi faire sauter toutes les barrières douanières, réduire les délais de permis pour installer un système PV raccordé au réseau MT, réduire les paperasses au niveau de la STEG, l’ANME et le Ministère de l’Energie par la remise en place de la digitalisation.
Selon Kanzari, en Tunisie, le panneau solaire PV, en dépit de la baisse des coûts sur le marché international, est le plus cher au monde. ” Ceci n’aidera pas à promouvoir la photovoltaïque en Tunisie “, prévient-il.
D’après lui, la réalisation de l’objectif national 30% des énergies renouvelables en 2030, pourrait aider à gagner de 1 à 2 points de croissance pour le pays, parce que la filière des énergies renouvelables est un moteur de création d’emplois et de richesses, d’autant que produire de l’énergie renouvelable est désormais considéré comme une preuve de compétitivité d’entreprises à l’échelle internationale.
“Il faut introduire à outrance l’énergie renouvelable parce que c’est un facteur très important de compétitivité “, insiste le président de la CSPV.