La Banque centrale de Tunisie (BCT) se penche actuellement, en collaboration avec les ministères des Finances et de l’Economie, sur la mise en place d’un plan de stabilisation macroéconomique visant à faire face à l’aggravation du déficit public, aux pressions inflationnistes et aux différentes difficultés financières et économiques que traverse le pays. C’est ce qu’a fait savoir le gouverneur de la BCT, Marouane El Abassi, jeudi 21 octobre 2021.
” La sortie de la crise actuelle ne sera ni facile ni imminente. Nous avons tellement perdu en termes d’investissement et d’épargne que la conjugaison des efforts de toutes les parties prenantes est plus que jamais nécessaire pour préparer le terrain à la relance de l’investissement “, a-t-il souligné lors de la 42ème assemblée générale de la Chambre tuniso-allemande de l’industrie et du commerce (AHK).
Discussion avec le FMI et la BM et financement bilatéral
“Ce plan de stabilisation macroéconomique fait aussi l’objet de discussion avec les principaux bailleurs de fonds, notamment le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale “, a précisé El Abassi, ajoutant que ” contrairement à ce que véhiculent certains médias, les discussions avec le FMI ne se sont jamais arrêtées “.
Parallèlement à la mise en place de ce plan, le gouverneur de la BCT met l’accent sur la nécessité, à court terme, ” de l’activation du financement bilatéral pour boucler le schéma de financement. Il faudrait par la suite, mettre en Å“uvre un plan de relance économique qui permettra à l’économie tunisienne de créer de la richesse et de sortir de cette crise aiguë “.
A moyen terme, il estime que la mise en place des réformes structurelles (climat des affaires, caisse de compensation, difficultés des entreprises publiques …) est une nécessité pour sortir de cette situation.
La BCT poursuivra son appui à l’activité économique
S’agissant de la BCT, El Abassi a indiqué qu’elle continuera, en perspective de la période post-COVID-19, à jouer son rôle en matière de maîtrise des prix et de consolidation de la stabilité financière, outre l’appui à l’activité économique.
” Des réflexions sont engagées avec les autorités concernées sur la mise en place d’un gros fonds de restructuration et de retournement qui permettrait de financer autrement les entreprises touchées par les difficultés des dernières années “, a-t-il encore fait savoir.
Capitaliser sur certaines évolutions positives…
Pour sortir de la crise, Marouane El Abassi appelle aussi à capitaliser sur les quelques évolutions positives qui ont eu lieu malgré la conjoncture toujours difficile. Il s’agit, selon lui, de l’amélioration de la situation sanitaire et de l’amélioration progressive de la situation économique, notamment, à partir du deuxième trimestre en relation avec la reprise graduelle de l’activité des secteurs les plus touchés par la crise sanitaire.
Il s’agit également des perspectives économiques positives dans la zone euro, l’amélioration de la situation politique et sécuritaire dans les pays voisins, particulièrement en Libye, outre la reprise de la production des hydrocarbures en 2021 par les gisements de Nawara (31,5% de la production nationale de gaz naturel) et Halk El Manzel (14,2% de la production nationale de pétrole brut), et les efforts engagés en matière d’énergie renouvelable.
Optimiste El Abassi
En ce qui concerne la balance des paiements et en dépit des difficultés du financement extérieur, le premier responsable de l’Institut d’émission considère que la situation reste soutenable avec une prévision du déficit courant de moins de 7% pour l’année 2021 et des niveaux de réserves de change aux alentours de 130 jours d’importations.
Par ailleurs, ” malgré les chocs qui affectent la soutenabilité de la dette publique, les risques sont atténués à cause de l’importance des financements multilatéraux et bilatéraux dans la dette publique tunisienne et qui sont caractérisés par des maturités longues et des taux faibles ” a-t-il enchaîné.
Etat des lieux
Malgré son ” optimisme de combat ” qu’il a maintes fois exprimé lors de cette conférence, le gouverneur a, également, rappelé la conjoncture difficile que traverse la Tunisie, évoquant ” une reprise lente de la croissance économique en 2021 (environ 3%) après une année de crise sanitaire exceptionnelle : baisse de 9,2% des échanges aux prix constants et de 2,5% aux prix courants (une première depuis 1962) impactant le marché de l’emploi (taux de chômage de 17,4%), la situation financière des entreprises et des ménages et les équilibres macroéconomiques notamment les finances publiques (déficit de 9,6% du PIB)”.
Le gouverneur a aussi rappelé l’impact de la crise sanitaire sur les secteurs stratégiques comme le tourisme et le transport, les problèmes de financement du budget liés au tarissement des ressources extérieures, le retour des pressions inflationnistes en septembre 2021 (6,2% septembre en glissement annuel) en raison notamment de l’orientation haussière des cours des matières premières sur les marchés mondiaux, malgré la baisse de l’inflation moyenne au cours des neuf premiers mois de 2021 (5,4% contre 5,8%).