Depuis septembre 2021, des signes d’une relance générale commencent à se manifester, en dépit d’une conjoncture cafardeuse marquée, au plan économique et financier, par une crise aigüe. Cette crise est perceptible, entre autres, à travers les déficits jumeaux qui ont atteint des seuils insoutenables. Quatre indices illustrent, de manière éloquente, que la réduction de ces déficits n’est pas impossible.

Par Abou SARRA

L’aide bilatérale pour renflouer les caisses de l’Etat

Le premier indice concerne le bouclage du schéma de financement du budget de 2021, soit l’urgence de mobiliser une enveloppe de 7 à 9 milliards de dinars. Dans cette perspective, le gouvernement a tendance à privilégier la piste de l’aide bilatérale.

C’est du moins ce que vient d’indiquer le directeur général du financement et des paiements extérieurs à la Banque centrale de Tunisie (BCT), Abdelkrim Lassoued. Selon lui, cette aide pourrait être fournie par trois pays : l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Algérie, ajoutant que des discussions très avancées sont en cours avec les deux pays du Golfe.

Avec l’Algérie, la relance prévisible de la coopération bilatérale, à la faveur de la prochaine visite d’Etat que compte effectuer en Tunisie le président algérien, Abdelmajid Tebboune, constitue, à son tour, un probable facteur de relance.

A noter que ces négociations bilatérales se déroulent parallèlement à celles engagées avec le FMI pour mobiliser de nouvelles facilités de paiement.

Les voyagistes reprogramment la destination Tunisie

Le deuxième indice positif porte sur la reprise espérée du tourisme, après la décision d’importants pays émetteurs de touristes comme le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne de supprimer la Tunisie de la « liste rouge » et d’autoriser leurs ressortissants à visiter la Tunisie.

Cette relance intervient suite à l’intensification, ces dernières semaines, de la vaccination anti-Covid-19 (plus de 40% des Tunisiens sont désormais vaccinés) et à l’efficacité confirmée du protocole sanitaire spécifique au secteur touristique. Ce protocole a eu pour mérite de limiter la propagation du virus dans les établissements touristiques.

Mieux, outre la suppression de la Tunisie des listes rouges, le tour-opérateur mondial TUI a annoncé qu’il envisage de reprogrammer la Tunisie parmi ses destinations touristiques à partir de plusieurs pays européens, après une année et demie d’interruption. L’information a été fournie par le ministère tunisien du Tourisme et de l’Artisanat.

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De manière encore plus précise, TUI a annoncé qu’il relancera la commercialisation des voyages touristiques vers la Tunisie le 5 novembre 2021 en Grande-Bretagne et le 1er décembre 2021 en Belgique. Il a aussi indiqué qu’il a repris, il y a quelques semaines, la commercialisation des voyages touristiques vers la Tunisie en France et qu’il reprendra la commercialisation de la destination en Allemagne durant les semaines à venir.

A signaler également l’impact attendu de l’ouverture attendue des frontières avec l’Algérie, à la faveur de la prochaine visite du chef d’Etat algérien en Tunisie. Cette ouverture est à même de générer d’importants flux touristiques algériens qui vont relancer, aux côtés des touristes libyens, le séjour des Maghrébins en Tunisie.

La diaspora tunisienne augmente ses transferts

Le troisième indice, et non des moindres, a trait à l’augmentation des transferts des Tunisiens résidant à l’étranger (TRE).

D’après des statistiques fournies par la Banque centrale de Tunisie (BCT), ces transferts ont atteint, à fin septembre 2021, plus de 6 milliards de dinars (2,2 milliards de dollars ou 1,9 milliard d’euros) contre 4,4 milliards de dinars au cours de la même période en 2020 et 3,8 en 2019.

Pour mesurer l’importance de cet apport des TRE, leurs transferts ont ainsi représenté 3 fois les recettes touristiques au cours de la même période, soit 1,9 milliard de dinars et 5,5% du PIB contre 2,7% en 2010.

Augmentation des recettes fiscales

Le quatrième et dernier indice concerne l’accroissement des ressources fiscales. Selon des statistiques officielles fournies par le ministère des Finances, les recettes fiscales directes ont augmenté, jusqu’à fin juillet 2021, de 7 milliards de dinars, soit plus de 4,9% par rapport à la même période de l’année écoulée.

Elles sont réparties entre l’impôt sur les revenus (5,3 milliards de dinars) et l’impôt sur les sociétés (1,8 milliard de dinars).

Quant aux recettes fiscales indirectes, elles ont augmenté au cours de la même période de 24%, soit en valeur de 9,9 milliards de dinars. Cette augmentation a été réalisée essentiellement par les droits de douane (+21,6%, 790 MDT), la taxe sur la valeur ajoutée (+30%, 4,9 milliards de dinars), et la taxe sur la consommation (+18,8%, 1,75 milliard de dinars).

Nous aurions pu ajourer à ces quatre indices positifs la reprise de la production du phosphate. En effet, les responsables du secteur minier s’attendent, d’ici la fin de l’année, à une production de 3,9 millions de tonnes, soit la performance de 2019. L’idéal serait toutefois d’atteindre, en 2022, le volume de 6 millions de tonnes pour résoudre une bonne partie des problèmes de la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG), même si l’on est bien loin du record de 8 millions de tonnes d’avant 2010.

Par-delà ces bonnes nouvelles, on pourrait estimer que le gouvernement Najla Bouden a « la Baraka » et serait né sous une bonne étoile comme on dit. Car, l’amélioration de ces indicateurs ne fait que renforcer la confiance des partenaires étrangers en la Tunisie et en sa capacité de surmonter la crise multiforme dans laquelle elle se débat.