Véritable guide et document de référence sur les musées en Tunisie, leur histoire, la gestion muséale et les politiques nationales en matière de patrimoine, ” Musées … patrimoine et politiques culturelles en Tunisie ” de Soumaya Gharsallah-Hizem est le premier livre de cette architecte-muséologue.
Cet ouvrage de 241 pages, est fraîchement paru au mois de novembre 2021 en mille exemplaires, chez Nirvana, l’un des éditeurs les plus en vogue dans le secteur en Tunisie. Sa parution a coïncidé avec la tenue de la 36ème Foire internationale du Livre de Tunis (FILT) organisée du 11 au 21 novembre.
Cet opus a fait l’objet d’une rencontre tenue au stand de Nirvana, en présence de l’éditeur Hafedh Boujmil.
Dans l’univers livresque fantastique, la TAP a eu une interview filmée avec l’auteure qui est une diplômée de l’Ecole d’Architecture et d’Urbanisme de Tunis est Doctorante en Sciences de l’information et de la communication de l’Université d’Avignon et en Muséologie, médiation et patrimoine de l’Université du Québec à Montréal.
Un opus de Sept chapitres
Pour Soumaya Gharsallah, le choix de se faire éditer chez Nirvana émane surtout de motivations, quelque part personnelles, d’une lectrice fidèle des livres édités par Nirvana, qui, dit-elle, mise sur un contenu de qualité et met en avant la riche histoire de la Tunisie et son patrimoine.
Sept grands chapitres traitent de la question de l’histoire et de la gestion des musées en Tunisie, du rôle du secteur privé dans le développement des musées, des publics, la question de l’identité des musées et l’architecture muséale.
Les 7 chapitres abordent l’aspect social, économique, historique, architectural et technique des musées dans ce travail qui est le résultat d’années de recherche, depuis 2009. Souamaya Gharsallah indique avoir “commencé à rédiger des petits bouts de papier et des textes pour parvenir à cet ouvrage”.
L’auteure parle d’ “un livre scientifique pour les spécialistes, rédigé comme un travail de recherche”. Elle y dresse un bilan exhaustif sur les lacunes qui handicapent la marche d’un secteur aussi vital qu’est celui des musées et du patrimoine en général et propose quelques solutions “en s’inspirant d’expériences faites dans des pays voisins”.
Outre le texte qui forme la majeure partie du livre, des photos prises dans divers musées ornementent les pages en plus des graphiques, des cartographies et des données chiffrés.
Le livre est basé sur une large bibliographie dont des articles parus dans les médias tunisiens, classiques et en ligne, des documents de recherche édités par les institutions spécialisées et des publications antérieures de l’auteure même.
La couverture porte la photo d’objets en céramique, faisant partie de la riche collection exposée de pièces archéologiques et historiques, dans la salle de Tunis au Musée du Bardo à la Capitale.
Les photographies dans le livre sont fournies par l’auteure qui les a acquis auprès de ses amis. Fine connaisseuse des musées et en médiation muséale, elle les a rassemblées dans un livre qui combine expérience professionnelle avec connaissances académiques.
Cadre législatif et communication muséale et patrimoniale
Dotée d’une bonne expérience dans des projets de musées et de réglementation, l’auteure préconise l’adoption d’un cadre législatif et juridique pour réussir à avoir gestion adéquate dans nos musées publics et privés.
“Le ministère des affaires Culturelles dispose d’un projet de loi mais qui n’a toujours pas été voté à l’Assemblée des Représentants du Peuple”, rappelle cette experte dans le patrimoine qui souhaite l’adoption de textes de loi qui permettent d’organiser l’institution muséale et d’autonomiser les grands musées.
Elle cite l’exemple des musées du Bardo ou celui de Carthage, actuellement fermés, qui sont devenus difficiles à gérer car ils ne dont pas autonomes. Actuellement, leur gestion et stratégie de communication est partagée entre l’INP, l’Amvppc, le ministère de tutelles et le musée lui même.
Cette multiplication des intervenants a “compliqué un peu la communication surtout en l’absence de stratégies claires, de services adaptés”.
Pour tous les avantages qu’offrent le projet de loi, l’auteure tire la sonnette d’alarme sur un l’état d’un secteur qui va mal et en faveur duquel “ça devient urgent de promulguer cette loi”.
Les divers volets de communication, -interne, avec le public, sur les réseaux sociaux et avec les médias-, est un autre chantier dont elle préconise l’organisation selon une stratégie culturelle dans les musées.
Soumaya Garsallah porte plusieurs casquettes dont celles de formatrice, enseignante, auteure d’articles et recherches sur les musées, le patrimoine et la culture en Tunisie mais aussi consultante pour plusieurs projets culturels dont celui de Tfanan du programme Europe créative Tunisie.
Le secteur du patrimoine n’a donc pas de secret pour cette experte dont l’ouvrage puise dans un cadre propice à la recherche et l’observation de cette richesse nationale mal exploitée.
Elle lève le voile sur les principaux handicaps et lacunes qui touchent à tout le secteur culturel, mettant en cause une politique culturelle qui ne coïncide avec les besoins réels du secteur des musées et du patrimoine en général.
Parmi les lacunes constatées, elle cite “l’absence de textes juridiques permettant d’organiser cette institution”. Et d’ajouter que même “le code du patrimoine qui date des années 90 est devenu aujourd’hui obsolète et ne permet pas de couvrir tous les aspects liés au patrimoine”.
L’identité des musées et l’apport du musée dans l’acquisition d’une identité, sont au cÅ“ur des questions abordées par l’auteur qui préconise aussi “la nécessité de sensibiliser le citoyen à son histoire ou à son patrimoine et de rapprocher le musée de l’école”. Dans son approche, elle pointe du doigt la “quasi-absence de coopération entre le ministère des affaires culturelles et celui de l’Education.
Outre ce côté critique, elle dit avoir “essayé de mettre en exergue le potentiel que présentent nos musées et notre patrimoine”. Ces secteurs peuvent, dit-elle, tel est le cas dans d’autres pays, de manière spectaculaire, contribuer au PIB au même titre que d’autres secteurs économiques importants”.
Dans un volet assez technique du livre, elle traite de l’architecture muséale, de la muséographie et des besoins des musées tunisiens en tant qu’institutions qui ont leur propres exigences, autres que celles adoptées ailleurs.
La reforme et la refonte des stratégies en matière muséale et patrimoniale semblent être une urgence pour entamer la gestion des musées qui est aussi une question de manque de moyens”, affirme l’auteure.