L’Etat a un rôle fondamental et central de régulateur de l’économie, et ne doit en aucun cas être un acteur économique faiseur, estime le vice-président de la Banque mondiale pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, Farid Belhadj.
“Aujourd’hui, dans la région, le dénominateur commun c’est le rôle extrêmement lourd de l’Etat dans l’économie. Nous voyons dans un certain nombre de pays des efforts visant à élargir la voie au secteur privé mais avec régulation”, a-t-il ajouté, au cours d’un webinaire organisé par l’IT Business School de Nabeul sous le thème ” L’économie tunisienne, où allons-nous ? “.
Pour ce faire, Belhadj recommande de garantir plus de transparence et une nouvelle gouvernance, mais également d’introduire un système judiciaire économique et social “régulatif” qui donne plus de confiance aux acteurs économiques.
Il rappellera par ailleurs que la BM a deux priorités en Tunisie:
- le volet social et les réformes liées à la compensation,
- les entreprises publiques et la masse salariale.
La BM ne conditionne pas son engagement…
Cependant, le responsable note que la Tunisie n’a besoin ni de la BM ni du FMI, mais plutôt de ses hommes et d’elle-même. “Le pays a besoin d’une réelle volonté politique de changer la manière avec laquelle il est géré”, a-t-il expliqué. ” Je parle ici de la dimension économique et sociale. Nous ne sommes pas dans la politique mais nous parlons plutôt de développement et de réformes “.
Pour Belhadj, les institutions multilatérales dont la Tunisie est membre ont un rôle important à jouer parce qu’elles peuvent apporter une valeur ajoutée, notamment en termes d’expérience internationale et de benchmarking … “Il s’agit d’une interaction entre les deux parties”, indique-t-il. “Il ne s’agit pas pour la BM de conditionner son engagement par des dimensions d’ordre politique et démocratique, car l’objectif est de trouver les moyens qui permettront à l’économie du pays de s’ouvrir davantage”, tient-il a préciser.
S’agissant de la conjoncture actuelle, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord qualifie la situation économique de la Tunisie de “chaotique, d’extrêmement préoccupante et sans direction claire”.
“A chaque fois qu’il y a un nouveau gouvernement dans tous les pays sur lesquels on travaille, la BM propose un livre blanc donnant des recommandations selon les données observées”, rappelle Belhadj, ajoutant que cette feuille de route comporte les points qui devront constituer des priorités.
Walid Ben Salah: Etat doit cesser d’être un obstacle…
Pour sa part, le président de l’Ordre des experts-comptables, Walid Ben Salah a souligné que l’Etat doit jouer un rôle dynamique selon une nouvelle approche et une vision claire afin de pouvoir être un régulateur, tout en libéralisant l’initiative du secteur privé.
L’Etat est considérée, aujourd’hui, comme un obstacle notamment avec les procédures administratives, le poids du budget de l’Etat sur l’économie nationale et les blocages au niveau de plusieurs secteurs essentiels, a-t-il fait savoir.
Il a rappelé par ailleurs que les vulnérabilités structurelles qui perdurent depuis plusieurs années et la crise de Covid-19 sont à l’origine de la situation économique chaotique.
Fadhel Abdelkefi: remettre le pays au travail…
De son côté, l’ex ministre et président du parti Afek Tounes, Fadhel Abdelkefi, a rappelé que la période post-révolution a été marquée par l’arrêt des trois principaux moteurs de la croissance : le budget d’investissement, le secteur privé et l’investissement international.
La Tunisie dispose d’énormes potentiels économiques, estime Abdelkefi, ajoutant que la seule porte de sortie de cette situation est de remettre le pays au travail et de créer de la richesse. La démocratie ne peut être consolidée que par la prospérité économique, a-t-il indiqué.
Il estime, dans ce cadre, nécessaire de mettre à niveau l’arsenal juridique du pays vu que les lois actuelles sont inapplicables, obsolètes et ne peuvent plus fonctionner dans une économie mondialisée. L’arsenal juridique qui touche l’agent économique tunisien et international doit être simplifié, pense-t-il.
Hedi Larbi: Des institutions économiques et politiques favorables au développement
Pour Hedi Larbi, conférencier à Harvard School of Goverment, le développement économique et social est un problème très complexe qui nécessite des réformes structurelles et non pas de petites réformes temporaires.
Ce développement est tributaire de la qualité des institutions économiques, politiques et sociales selon lesquels un pays se développe ou ne se développe pas.
Il met l’accent sur la nécessité d’élaborer une feuille de route et garantir la mise en place d’institutions économiques et politiques favorables au développement.
Il a appelé à l’élaboration d’un programme de relance et de sauvetage de l’économie et un programme d’investissement public de remise à niveau des services publics, de l’infrastructure et des entreprises et de la relance de la production.