La Fédération nationale de la chimie relevant de l’UTICA dénonce l’intention de la Direction générale de la santé végétale et du contrôle des intrants agricoles (ministère de l’Agriculture) de retirer certains pesticides agricoles du marché.
Les importateurs de pesticides et les responsables de la Fédération, réunis au siège de l’UTICA, mercredi 1er décembre, ont critiqué l’absence de concertation avec les professionnels du métier dans le traitement de ce dossier et la non communication des raisons derrière le retrait envisagé, alors que le secteur connaît plusieurs difficultés.
Ils appellent à prioriser et à retirer progressivement, sur deux années au minimum, les pesticides en question, tout en assurant les alternatives aux pesticides qui seront retirés.
Le président de la Fédération nationale de la chimie, Hichem Aounallah, assure que la décision de retrait est en cours d’étude au niveau du ministère de l’Agriculture, et que le dossier a été transféré à la commission chargée de l’homologation des pesticides pour statuer là-dessus.
Des pesticides dangereux interdits en Europe, toujours importés en Tunisie
Un rapport réalisé par l’Association de l’éducation environnementale pour les futures générations (AEEFG), en collaboration avec le Réseau international pour l’élimination des polluants (IPEN), rendu public en 2020, a montré qu’environ 33 pesticides dangereux sont toujours importés par la Tunisie, alors qu’ils sont bannis en Europe.
Ce rapport explique les conséquences de l’utilisation (et des importations) de pesticides extrêmement dangereux en Tunisie.
En Tunisie, 33 entreprises sont actives dans le secteur des pesticides, 215 matières actives de pesticides sont enregistrées et distribuées sur le marché national sous 493 marques commerciales. Mais les quantités réellement importées ne sont pas connues.
Le pays a importé, en 2018, 240,5 tonnes de pesticides à usage agricole bannis ou sévèrement restreints dans l’UE dont 35 000 kilogrammes de cyanamide, selon un rapport de PublicEye et Greenpeace sur la liste des pays importateurs des pesticides dangereux de l’UE. Il s’agit d’un engrais azoté utilisé en agriculture mais aussi comme herbicide ou défoliant (sur la liste tunisienne d’homologation des pesticides, il est cité sous la rubrique divers). Cet engrais pourrait être irritant et provoque des vomissements lors de son ingestion.
Aussi, en 2019, 19 autres pesticides interdits sur le sol européen ont pourtant fait l’objet d’une notification d’exportation à destination des trois pays du Maghreb dont la Tunisie.
Plusieurs pays africains et maghrébins continuent d’importer ces pesticides à usage essentiellement agricole, révèlent aussi des rapports de l’ONG suisse PublicEye, Greenpeace-UK et d’autres organisations non gouvernementales internationales, qui qualifient l’exportation de ces pesticides par les pays européens ” d’hypocrisie toxique “.
Le rapport de l’AEEFG cite, par ailleurs, de nombreuses lacunes dans la gestion des pesticides en Tunisie, le non respect des textes à plusieurs niveaux (commercialisation, stockage, application, résidus, protection, gestion des emballages vides), l’absence de procédures de contrôle post-approbation adéquates et pratiques, l’insuffisance des efforts de sensibilisation et d’encadrement des petits et moyens producteurs et utilisateurs agricoles sur les risques liés aux pesticides et à la protection des cultures, l’existence de marchés parallèles et l’absence d’un système de gestion écologique et rationnel des conteneurs de pesticides vides.