La Fifa a pour la première fois chiffré lundi les retombées attendues d’une Coupe du monde tous les deux ans, sans fixer d’échéance à ce projet.
“Il ne s’agit pas de déterminer une date, mais de prendre les bonnes décisions pour le football (…), donc nous prendrons le temps qu’il faudra”, a expliqué à la presse Gianni Infantino, le patron de l’instance, refusant de programmer un vote lors du prochain Congrès le 31 mars 2022.
A chacune de ses 211 fédérations membres, la Fifa a promis 19 millions de dollars (16,8 millions d’euros) supplémentaires par cycle de quatre ans, si elle parvient à doubler la fréquence de sa compétition phare au-delà de 2024.
Ce “financement de solidarité”, identique pour Andorre, les Iles Vierges, le Brésil ou l’Allemagne, quadruplerait donc pour passer d’environ 6 millions à 25 millions de dollars sur quatre ans, renforçant considérablement le rôle redistributif et le poids politique de la Fifa.
L’organisation s’appuie pour cela sur une étude du cabinet Nielsen, pour qui les recettes tirées du Mondial flamberaient de 4,4 milliards de dollars (3,9 milliards d’euros) sur quatre ans s’il devenait biennal, avec un bond de la billetterie, des droits TV et du sponsoring.
La Fifa ne dévoile cependant pas la méthodologie de cette étude, alors que la capacité des diffuseurs à payer toujours plus est discutée par les économistes du sport, et ne chiffre pas non plus les retombées sur les championnats et les compétitions continentales.
L’instance s’est seulement engagée à trouver “une solution qui bénéficie à tous, sans pénaliser quiconque”.
Quel impact sur la santé des joueurs, l’économie des compétitions domestiques, les clubs contraints de libérer leurs internationaux, les supporteurs qui économisent argent et congés pour accompagner leur sélection, et même l’audience d’autres sports et des JO d’été ?
Autant de questions âprement débattues cet automne, même si la Fifa insiste sur les chances accrues “de briller” qu’elle veut offrir aux joueurs, et sur la réduction du nombre de trêves internationales infligées chaque année aux clubs.
Mais à la tête du front du refus, l’UEFA a produit une étude assurant qu’un Mondial biennal diminuerait les revenus des fédérations européennes, d’environ 2,5 à 3 milliards d’euros sur quatre ans.
Le Forum mondial des ligues, qui représente une quarantaine de championnats professionnels, a de son côté estimé que les compétitions domestiques pourraient perdre jusqu’à 8,5 milliards de dollars (7,5 milliards d’euros) de revenus par saison.
“Les trajectoires historiques ne montrent aucune corrélation négative entre les revenus générés par les phases finales en sélection et les ligues”, a prudemment répondu la Fifa lundi, alors que les championnats demeurent la base de l’économie du football.
Si l’instance temporise, c’est qu’obtenir l’aval d’une majorité de fédérations ne la met pas à l’abri de ripostes des confédérations ou des clubs, susceptibles de bousculer tout l’édifice du football.
Vendredi, l’UEFA a ainsi confirmé “travailler” à une “Ligue des Nations commune” avec les sélections sud-américaines, qui regrouperait de fait les meilleures équipes nationales du monde au nez et à la barbe de la Fifa.
Par ailleurs, la puissante Association européenne des clubs (ECA) a exigé en septembre “une approbation conjointe du calendrier international” avec la Fifa, revendiquant donc un droit de veto.
Or les 247 clubs représentés par l’ECA disposent chacun d’un moyen de pression: ils sont les employeurs de la plupart des internationaux engagés dans les grandes phases finales, et peuvent contester en justice l’obligation de les mettre à disposition.