L’Institut arabe des chefs d’entreprise (IACE) appelle le gouvernement à mettre en place d’urgence une cellule de crise pour identifier les alternatives en ce qui concerne les sources d’approvisionnement en céréales, suite à la guerre en Ukraine, pays qui était jusque-là un fournisseur privilégié de la Tunisie.
Dans une note intitulée “la guerre en Ukraine : impacts et mesures à prendre”, l’IACE a également, mis l’accent sur la nécessité de trouver les mécanismes de financement requis dans la mesure où “la solvabilité des clients va devenir un critère important dans la priorisation de l’approvisionnement par les fournisseurs”, or la Tunisie a aujourd’hui un risque de solvabilité élevé.
Fortement dépendante en matière de céréales, important 84% de ses besoins en blé tendre, environ 40% pour le blé dur et 50% pour l’orge, la Tunisie souffre actuellement, d’une insuffisance chronique au niveau des capacités de stockage, limitées à 3 mois.
Le niveau des cours actuels du blé et des autres céréales pourrait conduire à une charge supplémentaire en matière de compensation de l’ordre de 1,3 milliard de dinars, à comparer à la charge initialement, prévue au budget de l’Etat de 2,2 milliards de dinars pour la compensation des produits de première nécessité.
Sans compensation, estime l’organisation, les cours actuels des céréales sur le marché mondial provoqueraient une augmentation du prix des pâtes alimentaires estimée de 160 millimes le kilogramme, soit une augmentation de 20% par rapport aux prix actuels.
Cette augmentation pourrait atteindre 200 millimes au kilogramme si les prix continuent à évoluer au même rythme. Par conséquent, l’Institut a jugé indispensable de communiquer sur la réalité de la situation et son impact afin de faire prendre conscience aux populations des difficultés à affronter et changer les habitudes alimentaires (notamment en évitant le gaspillage), en insistant sur la nécessité de prioriser l’intérêt général sur les intérêts particuliers.
Il a insisté aussi sur la nécessité d’orienter nos ressources hydriques agricoles exclusivement vers les cultures céréalières pour améliorer autant que faire les perspectives de la récolte à venir.
Inquiétudes face à l’envolée des prix de pétrole
Outre l’augmentation des cours de blé, l’organisation a également exprimé ses inquiétudes face à l’envolée des prix de pétroles, surtout que le budget 2022 de la Tunisie a été établi sur la base d’un prix du baril à 75 dollars.
Or, le prix actuel, avec une hausse de près de 50 dollars, représenterait, selon elle, ” une charge supplémentaire pour la caisse de compensation de 7 milliards de dinars “.
Selon la même source, une telle charge est insoutenable pour le budget de l’Etat qui aura pour conséquence une augmentation inéluctable des prix à la pompe, qui pourrait atteindre 1,2 dinar le litre environ, tous produits confondus, et jusqu’à 2 dinars et plus le litre si les prévisions les plus pessimistes sont atteintes.
Les deux tiers concerneraient les carburants routiers et un tiers la consommation industrielle ce qui va avoir un impact sur le prix de l’électricité et par conséquent la compétitivité des entreprises tunisiennes. Toutefois, cet impact direct sera en partie compensé par une réduction de la consommation due au ralentissement de l’activité économique.
L’IACE a, dans ce contexte, exhorté le gouvernement à mobiliser les ressources financières, aussi faibles soient-elles, vers les approvisionnements en produits essentiels au détriment des produits ” secondaires ” et à obtenir le déblocage immédiat de l’aide de l’Union Européenne au titre de l’appui budgétaire de 300 millions d’euros.
Elle a, en outre, souligné l’impératif d’accélérer les négociations avec le FMI et la Banque mondiale pour obtenir une aide exceptionnelle d’urgence de 1 à 1,5 milliard de dollars pour l’année 2022.
Elle a également, appelé à envisager de négocier le rééchelonnement de la dette tunisienne (hors marchés financiers), pour transférer les ressources dédiées au service de la dette vers le financement de l’approvisionnement en produits de base, d’autant que les institutions financières bilatérales et multilatérales seront dans l’obligation d’assouplir leurs positions vis-à-vis des pays vulnérables tels que la Tunisie.
Nécessité de cibler les touristes de l’Europe occidentale
L’IACE a évoqué aussi la nécessité de considérer la possibilité d’une aide d’urgence aux familles nécessiteuses moyennant le déblocage d’un montant de 300 millions de dollars (environ 880 millions de dinars) à l’instar de ce qui a été fait en 2021 avec l’appui de la Banque mondiale.
Concernant l’impact sur le tourisme et sur les entrées touristiques en Tunisie pour l’année 2022, l’organisation a estimé que les prix du transport aérien pourraient enregistrer une augmentation, ce qui aura un impact sur les prix offerts par les tours opérateurs et découragerait de nombreux touristes européens à visiter la Tunisie.
Selon la même source, Il est fort probable qu’il n’y aura pas de touristes russes cette saison du fait de la forte dévaluation du rouble qui affecte le pouvoir d’achat des populations, sans compter l’impact de la déconnexion de la Russie du système SWIFT qui va compliquer les transactions avec les partenaires russes.
Ainsi, l’organisation a appelé à engager les actions nécessaires pour maintenir les objectifs de la saison touristique 2022 en ciblant les touristes d’Europe occidentale.