A l’occasion de la célébration du 66ème anniversaire de l’indépendance, le président de la République, Kaïs Saïed, a promulgué le décret-loi portant création des «charikat Al Ahlia», sociétés sociales à base communautaire expérimentée entre autres au Brésil et au Sultanat d’Oman, autrement dit dans un grand et dans un petit pays.
Composé de 25 chapitres, le nouveau texte, publié dans le JORT du 21 mars 2022, vient réglementer, légaliser et systématiser, en Tunisie, ce type de sociétés.
En voici l’essentiel.
Abou SARRA
Le nouveau texte définit la charika Al Ahlia comme une société visant l’encouragement de l’initiative collective et l’intérêt social. Dans son chapitre 6 (aliénas 2 et 3), le décret-loi insiste sur l’impératif d’accorder «la priorité à l’homme et à la valeur du travail collectif aux dépens du profit individuel et de la réalisation d’intérêts personnels à travers l’intérêt communautaire».
Créé par un groupe de personnes originaires et résidant dans une même localité ou région dans l’objectif de réaliser la justice sociale et la répartition équitable des richesses, ce type de société a pour mission de lancer des projets économiques répondant aux besoins des habitants et aux spécificités de leur localité ou de leur région.
La charika Al Ahlia va exploiter des terres collectives
Les charikat Al Ahlia sont habilitées à exploiter les terres collectives conformément aux lois en vigueur et à participer, au titre de la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE), au développement de leur localité-régional, allusion apparemment ici à l’expertise développée dans les oasis de Jelma.
La charika al Ahlia est une propriété collective indivisible ; elle est répartie, selon le champ d’activité, en entreprises locales et entreprises régionales.
Le décret-loi s’attarde sur la gestion interne des charikat Ahlia, particulièrement en ce qui concerne le nombre d’actionnaires (50 au minimum), le capital (au minimum 10 mille dinars pour les entreprises locales et 20 mille dinars pour les entreprises régionales), le vote (une seule voix pour chaque actionnaire), la distribution des bénéfices appelés chastement par le décret-loi «excédents», la constitution de réserves, l’adhésion et la sortie de ces sociétés…
Les actionnaires-adhérents doivent être impérativement originaires de la localité ou de la région dans laquelle est implantée la charika Ahlia concernée. Ils ne doivent pas exercer un métier concurrent à l’activité de ladite société…
Les activités interdites
Le décret-loi fait une mention spéciale aux activités interdites à ce type d’entreprises. Ainsi, il leur est interdit d’exercer des activités non conformes aux lois en vigueur, aux bonnes mœurs et aux réglementations de concurrence saine et loyale.
Il leur est également interdit de faire de la politique, de financer des mouvements politiques et de collecter des dons même à des fins caritatives.
Le décret-loi insiste beaucoup sur la transparence depuis la création de la société (publication de toutes coordonnées dans la presse…), la tenue d’une comptabilité, l’inscription obligatoire au Registre national des entreprises (RNE)…