Le Festival du cinéma méditerranéen Manarat connait actuellement des conflits entre le comité d’organisation et l’Association ” Manarat Cinéma pour tous “, partenaire, d’une part, et le ministère des Affaires Culturelles représenté par le Centre national du cinéma et de l’image (CNCI), de l’autre.
Le désaccord entre le CNCI qui organise Manarat depuis sa création en 2018 et son nouveau partenaire a été révélé au grand jour, après la publication récente d’un communiqué annonçant le retrait du comité d’organisation du festival, en plein préparatifs en prévision de la prochaine édition.
Il est à rappeler qu’en raison de la crise sanitaire du Covid-19 ayant entraîné l’annulation ou le report de plusieurs festivals et manifestations culturelles et artistiques d’envergure, Manarat n’a pas eu lieu pour deux années consécutives, 2020 et 2021.
Le comité d’organisation a annoncé, en mars dernier, le retour du festival cet été. Manarat est programmé dans sa troisième édition du 1er au 7 Juillet 2022, sur les plages de La Marsa, Hammam Lif, Nabeul, Bizerte, Monastir et Kerkenah. Cependant, l’association et la direction du festival ont décidé, fin avril, de se retirer de l’organisation de cette édition.
Ce retrait est “en raison de la suspension par le ministère des Affaires Culturelles de la convention de partenariat entre le CNCI et ladite association “, lit-on dans un communiqué, publié le 28 avril, sur le réseau social du festival, qui rappelle un partenariat régit par un cadre juridique et ce ” conformément aux articles 3 et 9 du décret n° 2013-5183 du 18 novembre 2013 “.
Le texte du communiqué est signé par la Directrice du Festival Manarat, Dora Bouchoucha, productrice, et la Présidente de l’Association Manarat Cinéma pour tous, Chiraz Laatiri, ancienne ministre des Affaires Culturelles (2020) qui était également à la tête du CNCI (2017-2019).
L’association indique ” une décision unilatérale et sans motif juridique ” du ministère des Affaires Culturelles qui avait suspendu la convention ” depuis le début du mois d’Avril pour une durée non déterminée “. La décision du comité organisateur intervient ” après de nombreuses tentatives restées vaines de trouver des solutions ”
Cette situation a ainsi contraint la direction du festival et l’association de se retirer, disant être dans ” l’impossibilité de mettre en place une édition digne des précédentes à deux mois de la date prévue “.
Le bureau de l’association ainsi que la direction et l’équipe du festival qualifient une annulation indépendante de leur volonté tout en présentant leurs excuses au public tunisien et aux invités du festival (réalisateurs, producteurs, comédiens et professionnels de l’industrie et bailleurs de fonds).
” Soucieuse de la pérennité du festival, la direction du festival de cinéma méditerranéen Manarat s’engage à faire la passation de toute la programmation artistique et professionnelle à la direction générale du CNCI “, lit-on encore.
Suite à la publication de ce communiqué, le ministère des Affaires Culturelles a révélé les motifs de la suspension de l’accord en question. Elle a fait savoir, ce dimanche 1er mai, que l’accord été provisoirement mis en parenthèse en vue de vérifier les questions d’ordre organisationnel et juridique en lien avec le festival aussi bien que l’accord lui-même qui fait l’objet d’un suivi en vue de trouver une solution adéquate “.
Le ministère a rappelé que le CNCI est le véritable créateur du festival tout en qualifiant un tel retrait d’hâtif et non justifié ce que personne ne tolère faissant allusion à ses répercussions sur la réputation du cinéma tunisien à l’intérieur et en dehors du pays.
Le ministère qui veut ” honorer ses engagements avec tous les partenaires, et rappelle sa longue expérience dans l’organisation de ce genre de manifestations d’envergure.
” En dehors de tout partenariat avec le tissu associatif, les éditions précédentes du festival ont été réussies, estime la même source ce qui constitue, à son avis, un acquis important pour le CNCI habilité à poursuivre l’organisation du festival dont il était à l’origine de sa création et son développement à travers le soutien de tous les partenaires.”
Le ministère revient également sur le cadre juridique qui régit la relation entre le CNCI et l’Association en question et les obligations dont chacun des deux partenaires est tenu à respecter. Le désistement du partenaire ne signifie pas que le Centre va abandonner son rôle et sa responsabilité à la tête du festival dont il supervise l’organisation depuis sa création aussi bien que dans le choix de ses partenaires, ajoute la même source.
Il a encore dénoncé ” une compagne diffamatoire contre son orientation réformatrice qui a commencé par la suppression du nom du ministère de l’affiche officielle du festival.
A cet effet, le ministère rappelle la création récente de l’Association ” Manarat Cinéma pour tous ” qui a été baptisée en 2021, au nom du festival Manarat -alors qu’il est inscrit au nom du CNCI. Il fustige une action sans coordination préalable avec les parties concernées, de la part de l’association qui a inclus l’organisation de Manarat dans ses objectifs.
Manarat constitue un événement cinématographique annuel d’envergure qui s’est ancré dans le paysage cinématographique et culturel tunisien. Le festival est aussi un rendez-vous populaire qui offre la possibilité au public tunisien de découvrir gratuitement de nouvelles créations notamment sur les plages et propose une plateforme d’échanges entre pays ayant la Méditerranée en partage.
Durant ses deux premières éditions, le festival a accueilli de nombreux professionnels internationaux, et permis de nouer des échanges fructueux entre les acteurs du secteur du monde arabe et entre ceux d’Europe et de la région méditerranéenne.
Habituellement, Manarat est doté d’une compétition internationale. Le line-up est composé de longs métrages de fiction et documentaires présentés entre la compétition officielle et la section panorama. Des films (10) issus des deux rives de la Méditerranée concourent pour les deux prix du festival : le Manar d’Or, prix du meilleur film de la Méditerranée et le prix d’interprétation.
La productrice Dora Bouchoucha était à la direction artistique de Manarat depuis sa création en 2018 par le CNCI qui était alors sous la direction de Chiraz Laatiri, présidente de l’Association Manarat Cinéma pour tous, nouveau partenaire du festival.
Lancé il a près de cinq ans, sur le pavillon tunisien au festival de Cannes, ce jeune festival est le fruit d’une coopération active entre le Centre national du cinéma et de l’image (CNCI), le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) et l’Institut français de Tunisie.