Le phénomène de la migration, ses enjeux socio-économiques et ses répercussions sur la société a fait l’objet d’une série de formations à Sfax organisées récemment au profit des acteurs de la société civile, des agents municipaux et des journalistes, et ce dans le cadre d’actions financées par l’Union européenne et la Coopération suisse et soutenu par le Centre international pour le développement des politiques Migratoires (ICMPD).
En effet, les 11, 12 et 13 mai 2022, la ville de Sfax a abrité, à l’initiative de l’IADH (Institut arabe des droits de l’Homme), de l’Association Afrique Intelligence et des Municipalités de Sfax et Tunis, quatre sessions de formation pour le renforcement des capacités en matière de techniques de communication et de compétence interculturelles au profit des agents municipaux travaillant dans différents postes de l’administration de la municipalité de Sfax (dont les guichets et services accueillant les migrants) et des représentants d’associations de la société civile et de leaders de communautés de migrants (de pays d’Afrique subsaharienne).
Le choix de Sfax et Tunis se justifie par le fait que la plus grande concentration des flux migratoires est constatée dans ces deux métropoles accaparant près 80% des migrants, soit environ 21 000 personnes (d’après les statistiques de l’INS au titre de l’année 2021), a fait remarquer Wafa Kanzari, coordinatrice du Programme Migration à l’IADH.
Ces même formations seront dupliquées à Tunis dans deux semaines, a tenu à préciser le directeur exécutif d’Afrique Intelligence, Franck Yotedje, qui ajoute que “l’objectif de ces formations est de promouvoir une politique communale inclusive dans la gouvernance de la migration et d’approfondir les connaissances des bénéficiaires en matière de compétences interculturelles de communication liée à la question migratoire et de les doter d’éléments supplémentaires inhérents à un traitement plus juste de l’information à travers un narratif alternatif et à la mise en place d’une politique communale inclusive dans la gouvernance de la migration”.
Pour sa part, l’adjoint au maire de Sfax, chargé de la coopération décentralisée et point focal Projet MC2CM, Wajdi Aydi, a mis en garde contre ” l’absence d’une vision en matière de migration chez les pouvoirs publics et l’inexistence d’une vraie volonté de mettre en place une politique publique et une législation en la matière”.
Il a évoqué, à cette occasion, les initiatives entreprises par la municipalité de Sfax en vue de favoriser la prise en charge des migrants comme habitants de la ville et leurs besoins sociaux, culturels, sanitaires et d’état civil, notamment durant la période de crise du Covid-19.
A rappeller que l’organisation “Terre d’Asile Tunisie” a organisé, il y a une semaine, en partenariat avec la municipalité de Sfax, une formation au profit des journalistes et correspondants de la région autour du thème “Le contexte migratoire et le traitement de la situation des migrants en Tunisie”.
Animée par le juriste expert en migration Oussema Ben Younes, cette formation s’intègre, en effet, dans le programme ” Migration Ville à Ville en Méditerranée ” (MC2CM) financé par l’Union européenne et la Coopération suisse et mis en œuvre par International Centre for Migration Policy Development (ICMPD).
Ce programme a pour objectif l’amélioration de la gouvernance et la coordination autour de la thématique migratoire à l’échelle locale et régionale à travers la sensibilisation, le renforcement des capacités et la coordination des autorités locales, médias et des OSC de la ville de Sfax.
L’objectif spécifique de la formation étant de ” renforcer les capacités des médias en vue d’une couverture médiatique inclusive, et non-stigmatisante, sur les questions migratoires en Tunisie “, indique la coordinatrice du Bureau Terre d’Asile Tunisie à Sfax, Yosra Allani, lors de l’ouverture de la session.
Elle ajoutera que la formation ambitionne de renforcer les capacités et sensibiliser les professionnels de l’information sur la question migratoire et spécifiquement sur les profils et les droits des migrants, améliorer la connaissance sur les définitions et les cadres juridico-politiques liés à la migration en Tunisie et élargir les connaissances de la cartographie d’acteurs sources de l’information en cette matière.
La formation a mis en évidence les éléments et facteurs expliquant la montée très remarquable du nombre des migrants en Tunisie et particulièrement à Sfax au cours des dernières années et leur protection et volet développement et assistance juridique et sociale.
Elle a également permis d’étudier les problématiques liées à l’absence du cadre juridique et de stratégie en matière de gestion de la migration et de sa bonne gouvernance ainsi que l’absence de statistiques sur les migrants, leurs nationalités et leurs profils de façon générale.
Les volets protection des droits humains, le développement économique et l’assistance juridique et sociale ont été, aussi, au centre des échanges lors de la formation.
Les participants ont évoqué, lors de cette rencontre, les difficultés auxquelles sont confrontés pour mener des enquêtes plus approfondies et communiquer une information correcte, claire et non stigmatisante à cause de l’absence d’études et de ressources fiables sur les migrants en Tunisie.Les difficultés rencontrées par les médias sont également expliquées par l’insuffisance des moyens alloués au travail journalistique, le manque d’expertise sur les politiques migratoires et la complexité du terrain.