Dimanche 29 mai 2022, François Gabart arrivait à Tunis, après avoir parcouru les 455 miles qui séparent Marseille de Carthage à bord de son maxi-trimaran le SVR-Lazartigue. Accompagné de 4 équipiers, il a établi, avec cette traversée, un nouveau record avec un temps de 13 h 55’37’’, battant ainsi de 25 minutes le précédent record de Pascal Bidégorry en 14 h 20′ 34”, qui faisait partie de l’équipage et voit ainsi s’améliorer son propre record.
François Gabart n’est plus à présenter. Marin expérimenté, skipper confirmé, il n’en est pas à son premier exploit. Il a, en effet, remporté des courses prestigieuses comme, entre autres, la 7e édition du Vendée Globe en 2013, en établissant un nouveau record de la circumnavigation en solitaire, sans escale sur monocoque, en 78 jours 2 h 16 min 40 s., ou encore la Route du Rhum en 2014 et la Transat Jacques-Vabre en 2015 avec Pascal Bidégorry, encore. Détenteur de plusieurs records, il possède, notamment, encore à ce jour, depuis le 17 décembre 2017, le record du tour du monde en solitaire en 42 jours, 16 heures, 40 minutes et 35 secondes.
Alors, comment est né ce nouveau record en Méditerranée ? Comment est née l’idée de cette traversée depuis l’ancien sémaphore de Frioul au large de Marseille en direction du phare de Sidi Bou Saïd à l’entrée de la baie de Tunis. Comme souvent, dans la navigation, il est là encore une histoire de vent, en l’occurrence le mistral, mais pas seulement !
François Gabart raconte qu’il se trouvait en Méditerranée depuis un mois et qu’il devait se rendre avec son équipage à Tunis. Jugeant les vents favorables, et notamment un épisode de mistral qui se présentait justement avant le départ, le pari est pris de traverser en poussant le trimaran pour tenter un premier record à bord d’un bateau, sorti des chantiers navals en juillet dernier, et équipé des dernières innovations.
Le SVR-Lazartigue, baptisé le 20 septembre dernier à Concarneau par l’actrice Mélanie Laurent, est un bateau exceptionnel, par sa taille, 31 mètres de long et 23 de large, son design et ses foils (appendices latéraux). Grâce à ses appendices latéraux, le bateau peut littéralement voler sur l’eau. Dès qu’il dépasse les 15 nœuds, le trimaran commence à se surélever, grâce aux foils, pour, à partir de 30 nœuds, ne laisser plus qu’une traînée effilée au fil de l’eau.
La diminution des frottements de la carène sur l’eau et l’aérodynamisme de la plateforme, conçue pour avoir une pénétration d’air optimale, permettent de gagner en vitesse. Avec une plateforme originale et ses deux cockpits sous bulle transparente, intégrés dans la coque centrale, ce géant des mers, haut comme un immeuble de 12 étages, présente une allure futuriste et permet de naviguer avec un niveau de sécurité plus important pour les équipages.
A côté de ce concentré de technologies, le voilier a également été conçu pour économiser le maximum d’énergie. Sans minimiser l’impact environnemental de la construction de son trimaran, François Gabart explique le fonctionnement en autonomie, la production et la gestion de l’énergie à bord. Certes, dit-il, le bateau navigue avec le vent mais il utilise forcément de l’énergie. Tout a été pensé pour son autonomie, puisqu’on retrouve à bord du SVR-Lazartigue des panneaux solaires et des hydrogénérateurs qui produisent leur propre électricité.
Quant à la gestion des déchets, l’anticipation permet la réduction au minimum des déchets à bord, qui sont triés, empaquetés pour être finalement jetés à l’arrivée. La question de l’autonomie en eau se pose également et se trouve résolue par un désalinisateur, à bord, qui permet de filtrer l’eau de mer et la rendre douce et donc propre à la consommation. Vitesse, exploit, autonomie en énergies, ce bateau est une « révolution » sur les mers.
François Gabart, ce marin expérimenté, qui nous a tous fait rêvé au cours de son déjà long et brillant parcours, a réussi un pari et un exploit, en rapprochant la France de la Tunisie, à bord d’un voilier extraordinaire à bien des égards et soucieux de son environnement. Ce record signé par le SVR-Lazartigue est, nous l’espérons, le premier d’une longue liste, qui restera sous le signe de la Méditerranée, « une mer au milieu des terres » qui unit et rapproche les deux rives de la Tunisie et de la France.