Les sociétés d’environnement, de plantation et de jardinage (SEPJ), créées en 2011 dans le bassin minier et dans les zones pétrolifères, traînent à tort la mauvaise réputation d’avoir favorisé des milliers d’“emplois fictifs“ au point que certains ont été amenés à qualifier la Tunisie de pays «champion des emplois fictifs». D’autres y ont perçu une forme de chômage déguisé sans aucune utilité sur le plan socioéconomique.
Cette qualification est en partie vraie dans le sens où les personnes qui y sont employées touchent un salaire sans rien faire. Néanmoins, à y regarder de près, les concepteurs-décideurs de ses entités n’étaient pas si bornés pour projeter bêtement la création d’emplois fictifs.
Avec le temps et compte tenu de l’ampleur que prend de plus en plus la dimension environnementale dans les économies, ces sociétés pourraient avoir un très bel avenir devant elles pour peu qu’on en assure la bonne gestion.
Les SEPJ créées selon l’exigence de la RSE
Il est vrai que pour acheter la paix sociale, les gouvernements qui se sont succédé à la tête du pays au cours des 10-11 dernières années avaient négocié, la corde au cou, la création de ces sociétés. Aujourd’hui, les temps ont changé et le pays s’est relativement stabilisé. Le moment est venu pour reprendre le dossier et expliquer à l’opinion publique pourquoi ces sociétés ont été créées.
En effet, ces entités n’ont pas été créées au hasard. Elles l’ont été selon le critère de la Responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) concrétisée au niveau réglementaire par la norme ISO 26000.
La RSE est perçue ici à la fois en un « devoir de l’entreprise de rendre compte de ses actes » et « d’en assumer les conséquences » (enjeu des actions en réparation et en prévention).
il serait logique que le groupement CPG-GCT répare les dégâts commis et soulage les communautés affectées
Dans le cas du bassin minier (Gafsa, Gabès, Sfax) où sont créées la plupart des sociétés d’environnement, de plantation et de jardinage (Gafsa, Mdhilla, Gabès, Skhira…), la Compagnie des phosphates de Gafsa (CGP) et le Groupe chimique de Tunisie (CGT) ont exploité le minerai du phosphate et sa transformation sans se soucier du développement qualitatif des communautés jouxtant ses usines, s’agissant particulièrement du droit au développement et à un environnement sain. La production du phosphate et de l’acide phosphorique étant connue pour être fort polluante et gravissime pour la santé (maladies cancéreuses et respiratoires…).
Pour la compagnie, la règle divine concerne les externalités positives de leurs activités (valeur marchande du phosphate et dérivés), tandis que les externalités négatives sont supportées par les habitants du bassin miner (pollution, maladies …).
La SEPJ sont des réparations justifiées
Sur la base de ces manquements et conformément à la norme ISO 26000, il serait logique que le groupement CPG-GCT répare les dégâts commis et soulage, un tant soit peu, les communautés affectées en créant ces SEPJ. Ce n’est que justice, diraient certains.
La même approche peut être appliquée dans les zones pétrolifères de Tataouine et de Kébili. Les compagnies pétrolières étrangères qui opèrent dans ces gouvernorats sont tenues également, conformément à la RSE – comme c’est le cas partout dans le monde d’ailleurs – d’assumer leur responsabilité dans l’accompagnement d’une partie du développement des communautés de ces régions.
la dépollution des gisements coûtera à la Tunisie la bagatelle de 500 millions de dinars, ce qui correspond à un demi-point de croissance.
A ce propos, il est regrettable de constater que les gouvernements ont accepté, passivement, les grandes compagnies étrangères, entre autres Eni, Shell, British GAS, EnQuest, Petrofac, Medco, Gulfsands Petroleum…, sans leur demander des comptes quant aux dégâts occasionnés à l’environnement.
D’après Radhi Meddeb, expert économique, la dépollution des gisements coûtera à la Tunisie la bagatelle de 500 millions de dinars, ce qui correspond à un demi-point de croissance.
Pour revenir aux SEPJ, nous pensons qu’elles pourraient avoir un bel avenir à condition d’ouvrir leur capital à des partenaires stratégiques privés, primo, et d’investir dans des les plantes ornementales à forte valeur marchande et dans des projets d’envergure éligibles aux critères des bailleurs de fonds en matière de décarbonation et d’adaptation au réchauffement climatique, secundo.
L’armée nationale a donné l’exemple en transformant, à Rejim Maatoug, un terrain désertique de 40 000 hectares en jardin fleuri.
Abou Sarra