Pour un coût total de 1,217 milliard de dinars et géré par le ministère du Transport, le RFR était considéré comme étant l’un des plus grands chantiers d’infrastructure sur le continent africain. L’est-il encore ?
Financé par l’État tunisien à hauteur de 40%, il a été soutenu par plusieurs bailleurs de fonds sous forme de prêts ou de dons : l’AFD en tant que chef de file (50 M€), la Banque européenne d’investissement (177 M€), la Banque allemande pour la reconstruction (KFW – 70 M€) et l’Union européenne (28 M€). Soit une enveloppe totale d’environ 1,082 milliard de dinars.
Publiés par l’AFD (1), ces montants sont toutefois différents de ceux cités par des sources officielles tunisiennes qui citent respectivement les chiffres de 33,6 M€ provenant de l’AFD, 119 M€ de la BEI, 47 M€ de la KFW et 28 M€, soit l’équivalent de près de 760 MDT.
Mais plus que les fonds consentis pour la réalisation d’un tel projet, le plus important aujourd’hui est le lancement effectif des lignes du Réseau ferroviaire rapide (RFR) pour la désaturation du réseau routier, la fluidité du transport terrestre dans des zones très peuplées et la réduction de la pollution atmosphérique. Autant de profits pour le pays si ce n’est que 12 ans après, le démarrage du RFR est toujours bloqué pour des raisons, le moins qu’on puisse dire, absurdes.
En premier, le retard enregistré dans le retrait des échéances du prêt de la BEI traduit par le report de la livraison des véhicules par le fournisseur coréen non réglé avec pour conséquence une pénalité de retard de l’ordre de 5 millions de dinars.
La deuxième raison est encore plus grave, elle tient aux risques encourus que les équipements et les stations soient vandalisés ou pillés.
Résultat des courses : de nouveaux frais vont peser sur le budget du projet.
L’Etat tunisien serait-il devenu incapable de protéger ses infrastructures de transport ?
Le projet de la ligne Moknine – Mahdia n’a pas encore démarré
Un des projets dépendants, dont le chef de file est le ministère du Transport, est celui de la ligne Moknine/Mahdia dont les délais contractuels sont de 4 ans (9/11/2017-31/12/2021), avec un montant d’investissement de 319 MDT. C’est la BIRD (Banque internationale de reconstruction et du développement) qui en assure le financement à hauteur de 160 M€.
Le projet de la ligne Moknine/Mahdia n’a pas encore démarré, seul 1% du fonds imparti a été retiré. Il vise à renforcer la capacité de la seule ligne existante en ajoutant une voie ferrée et en électrifiant la deuxième ligne tout au long du tronçon de 25 km, la signalisation de la ligne entre Monastir et Mahdia sur une longueur de 50 km, l’implantation d’une centrale électrique à Moknine, la réalisation de travaux de clôture et l’aménagement de couloirs et des installations techniques ainsi que l’acquisition de 4 véhicules.
A ce jour, les seules réalisations se résument à l’étude de l’infrastructure, la préparation d’un dossier pour le lancement de l’appel d’offres relatif à l’acquisition des équipements, l’affectation d’un expert spécialisé dans les appels d’offres conformément aux exigences du bailleur de fonds et la présentation du calendrier comprenant le programme des marchés publics en rapport avec la réalisation du projet.
L’une des raisons du retard accusé dans l’avancement du projet touche aux constructions anarchiques de certains habitants de la région de Mahdia et de Teboulba sur les terrains appartenant aux chemins de fer, ce qui nécessite l’intervention des autorités régionales pour les évacuer.
Le récit de la ligne Moknine/Mahdia n’est pas très différent de celui du tronçon Tunis-Zaghouan-Siliana-Le Kef-Kasserine, dont le coût est de 330 MDT et qui est financé par la BIRD et la BEI à hauteur respectivement de 160 M€ et 2 M€ avec un montant de retrait de 1%.
Le projet est budgétisé depuis 2012. Une partie des travaux a été achevée pour un coût d’environ 66 MDT. 25 km ont été aménagés et la construction des stations a démarré.
Les équipements nécessaires ont été acquis pour rénover 135 km de voie ferrée. A ce jour seulement 30 Km ont été rénovés. L’une des principales entraves est d’ordre foncier, ajoutée aux lenteurs administratives habituelles (sic).
Sans une profonde réflexion, un plan d’action réaliste, réalisable et la véritable volonté de l’Etat pour trouver des solutions définitives à ces problèmes trop handicapants pour tout projet, nous pourrions atteindre le 22ème siècle en gardant des infrastructures du 19ème siècle.
Amel Belhadj Ali
Lien : Communiqué RFR
Lien : Projet RFR AFD