Conduite par la cheffe du gouvernement, Najla Bouden, une forte délégation tunisienne participe, du 12 au 15 février à Dubaï, à deux rencontres, une régionale et l’autre internationale.
La première est le 7ème forum fiscal arabe sur le thème “la viabilité budgétaire dans le monde arabe au-delà de la pandémie de Covid-19: défis et opportunités”.
Y prennent part des ministres en charge des Finances des pays arabes et des gouverneurs des Banques centrales.
Quant à la seconde, elle est une rencontre au sommet, à savoir le Sommet mondial des gouvernements qui se tient les 13, 14 et 15 février à Dubaï sur le thème “Façonner les futurs gouvernements”.
Enjeu de l’appel de la directrice générale du FMI à la solidarité interarabe
A priori, ces opportunités pourraient aboutir à des résultats positifs pour la Tunisie. La délégation tunisienne, munie de nouvelles cartes voire de nouveaux atouts, pourrait mettre à profit ces deux occasions pour relancer le dossier de la Tunisie auprès du FMI et des pays du Golfe.
S’agissant du forum, la délégation tunisienne, composée entre autres de Marouane Abassi, gouverneur de la BCT, pourrait valoriser auprès des responsables des pays riches du Golfe l’appel lancé à l’ouverture de cette rencontre par la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva.
En effet, cette dernière a appelé, le 12 février 2023, les pays arabes à “faire preuve de solidarité” en vue de faire face au risque de déstabilisation auquel certains d’entre eux seraient confrontés. Pour la patronne du FMI, «le moment est venu de passer aux actes, d’autant que le monde arabe dispose d’une solide expérience en matière de coopération».
Décryptage: certains observateurs sont tentés de percevoir dans cet appel un feu vert du FMI pour que certains pays riches du Golfe viennent en aide aux pays arabes qui connaissent de sérieuses difficultés financières, la Tunisie et l’Egypte entre autres.
Ces derniers auraient même anticipé sur l’appel lancé par la directrice du FMI. C’est du moins ce que laisse entendre Moez Hadidane, expert en économie et marchés financiers, lors d’entretiens accordés à des médias de la place.
Selon lui, lors du Sommet sino-arabe pour la coopération et le développement, tenu en décembre 2022, à Riyadh, l’Arabie Saoudite aurait accepté d’accorder à la Tunisie un crédit mais le roi aurait exigé que cela ne se fasse pas sans contrepartie. Autrement dit, les Saoudiens voudraient que les Tunisiens leur offre des opportunités d’investissement dans leur pays. Depuis silence radio sur cette affaire.
Les conditionnalités du FMI satisfaites
Le Sommet mondial des gouvernements auquel participe Najla Bouden offre une autre opportunité à la Tunisie pour défendre sa cause.
La cheffe du gouvernement, qui a été invitée à ce Sommet par le Premier ministre émirati, Cheikh Mohamed Ben Rached Al Maktoum. pourrait également mettre à profit cette rencontre, après le Forum de Davos, pour s’entretenir avec la directrice générale du Fonds monétaire international, Kristalina Georgieva.
L’objectif serait de lui demander conseil au sujet d’une possible reprogrammation du dossier de la Tunisie pour la validation du crédit convenu le 15 octobre 2022 (1,9 milliard de dollars).
Il s’agit aussi de l’informer des efforts fournis par son gouvernement en vue de satisfaire les deux principales exigences qui ont été à l’origine de la déprogrammation, le 19 décembre dernier, du dossier de la Tunisie. Et pour cause.
Le problème concernant l’absence d’harmonie entre le président de la République et les réformes tracées par le gouvernement vient d’être résolu. La Tunisie dispose, aujourd’hui, d’une loi de finances 2023 signée en bonne et due forme par le chef de l’Etat. Signe que les choses sont rentrées dans l’ordre entre le chef de l’Etat et le gouvernement.
La seconde conditionnalité satisfaite concerne l’adoption, le 9 février 2023, en conseil des ministres -c’est-à-dire quatre jours avant le Sommet de Dubaï- d’un texte portant révision de la loi du 1er février 1989 concernant les participations et entreprises publiques. L’ultime but étant l’ouverture de la gouvernance des entreprises publiques sur le privé. Cette loi fait pourtant l’objet jusqu’à ce jour d’une vive divergence entre le gouvernement et la centrale syndicale.
Pour mémoire, l’UGTT) se dit fortement opposé à cet accord avec le FMI. Elle a tracé des lignes rouges concernant la privatisation de certaines entreprises publiques et la suppression de la compensation.
Il y a aussi un problème financier avec le FMI qui pourrait être résolu à la faveur de possibles négociations avec les pays du Golfe. Dans le schéma de financement des réformes, le montant accordé par le FMI n’est pas suffisant pour les financer totalement. Il faut d’autres apports de pays partenaires dont ceux du Golfe. Ces derniers conditionnent leur caution au démarrage des réformes et à l’octroi préalable du crédit du FMI. C’est en quelque sorte leur garantie.
Cela pour dire que la Tunisie, qui n’a pas bien préparé son dossier pour la validation du crédit du FMI, pourrait valoriser sa participation à ces deux rencontres pour se rattraper.
Abou Sarra