Le Crowdfunding (ou financement participatif) est un type de financement qui a du potentiel en Tunisie, mais dont l’opérationnalisation doit être bien étudiée afin d’éviter un démarrage trébuchant et de minimiser les risques y afférents. C’est la conclusion à laquelle a abouté un séminaire sur “Le Crowdfunding, quel apport pour le financement des entreprises?”, organisé jeudi 16 février 2023 à Tunis par la Chambre de commerce et d’industrie tuniso-française (CCITF).
Il constitue “un levier citoyen de financement de projets et peut être l’un des facteurs pour doper la croissance inclusive”, a affirmé le DG de l’Agence de Promotion de l’Industrie et de l’Innovation (APII), Amor Bouzaouada.
“Une étude de la Banque mondiale de 2016 a estimé le potentiel de collecte par le crowdfunding pour les pays en développement et émergents à 96 milliards de dollars. En Tunisie, s’il est correctement mené à bien, le crowdfunding permettrait d’envisager une collecte de l’ordre de 2,5 milliards de dinars dans les 5 à 10 premières années. Ce chiffre mérite une actualisation vu l’évolution exponentielle de cette activité de par le monde”, a-t-il ajouté.
Les 4 parties prenantes nécessaires
Bouzaouada a expliqué que l’activité de crowdfunding nécessite l’existence de 4 parties prenantes à savoir un opérateur de plateforme internet spécialisé, qui mettra en relation le public avec les sociétés et les projets dont les porteurs désirent obtenir un financement ; le contributeur, c’est à dire toute personne physique ou morale résidant ou non résident qui contribue au financement d’une société ou d’un projet à travers le crowdfunding.
A ces deux opérateurs, il faut ajouter le porteur de projet, c’est-à-dire toute personne physique ou morale désirant obtenir un financement à travers le crowdfunding et les autorités de régulation (Conseil du Marché Financier (CMF), Banque Centrale de Tunisie (BCT) et Autorité de Contrôle de la Microfinance (ACM)).
Il a rappelé la promulgation en aout 2020, de la loi n° 2020-37 du 6 août 2020, régissant le Crowdfunding, et la publication en octobre 2022, de trois décrets d’application concernant les trois types de Crowdfunding, à savoir l’investissement en valeurs mobilières, le Crowdfunding en prêts et le Crowdfunding en dons et libéralités.
Déjà des avancées en matière de réglementation
” Le cadre réglementaire global régissant le Crowdfunding étant prêt, l’opérationnalisation de ce type de financement nécessitera la publication par les trois autorités de régulation concernées de notes expliquant les conditions d’exercice, les modalités et les conditions d’octroi des agréments.
“Le CMF a déjà publié la note relative au Crowdfunding en investissement dans les valeurs mobilières, les deux autres autorités, à savoir la BCT et l’ACM, sont en train de finaliser les notes relatives à l’activité de prêts (BCT) et celle des dons et libéralités (ACM) “, a-t-il encore précisé.
Toujours selon lui, ” l’APII veillera à coordonner les efforts des différentes parties intervenantes et à mettre en place les garde-fous nécessaires pour optimiser l’opérationnalisation de cette activité en Tunisie. Elle assurera également, le suivi nécessaire pour remédier aux lacunes réglementaires et procédurales qui pourrait surgir au fur et à mesure de la mise en œuvre de ce processus “.
L’APII organisera également, une conférence nationale dédiée au Crowdfunding en mai prochain et mettra en place un site web qui rassemblera toutes les informations utiles concernant cette activité.
Pour Bouzaouada, “les avantages du Crowdfunding sont énormes étant donné qu’il s’agit d’un moyen rapide et sécurisé pour lever des fonds sans garanties personnelles. ” Des risques de liquidité et de non sérieux de certains projets pourraient exister mais sans prendre les risques on ne pourra pas avancer”.
Rapidité de mise en place, ciblage de l’opération…
De son côté, Mehdi Ben Mustapha, chef du département de la communication au CMF, a indiqué que ” le crowdfunding est une industrie en grande évolution de par le monde. Mais c’est une activité qui prend du temps pour donner ses fruits. C’est également une activité qui représente des risques puisque uniquement 20% des projets réussissent “.
“La rapidité de mise en place de l’opération, le ciblage de nouveaux apporteurs de fonds, le financement de certains projets à taille réduite sont, selon ce responsable, les principaux avantages liés à cette activité. Mais des risques sont également, à prendre en considération. Il s’agit essentiellement des risques d’échec du projet, d’arnaque ou de manque d’information et d’illiquidité des investissements”.
Pour sa part Mehdi Boukari, adjoint au directeur du suivi du risque de crédit a affirmé l’engagement de la BCT à achever le cadre réglementaire relatif au crowdfunding en prêts avant la fin du 1er trimestre de 2023, en finalisant les circulaires relatives à ses conditions d’exercice.