La possibilité d’utiliser des cellules souches prélevées sur des cellules matures pour venir à bout de la « non-cicatrisation » des plaies chroniques, notamment les ulcères diabétiques, c’est réalisable et c’est en Tunisie. Cette technique est la première à être adoptée en Afrique et au Moyen-Orient. Elle vise le pied diabétique, les escarres, les ulcères de jambe, les brûlés, les plaies récalcitrantes et les lésions post-radiothérapie.
Les formations sur ces nouvelles techniques ont été élaborées par le président de l’Association tunisienne de plaies et cicatrisations (ATPC), Pr Ramy Ben Salah, spécialisé dans la chirurgie esthétique et plastique, ainsi que dans la chirurgie des plaies des pieds.
La formation aura lieu dans un centre de formation pilote à Tunis, unique sur le continent africain. Son lancement a été annoncé vendredi 10 février en présence de Ali Mrabet, ministre de la Santé, Nasreddine Nsibi, ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelles, et d’invités africains de haut niveau venus de 14 pays dont le ministre de la Santé de la Gambie et la secrétaire d’Etat à la Santé du Tchad.
«Ce centre, a déclaré à l’ouverture de la conférence Pr Ramy Ben Salah, apportera une réponse adéquate à un besoin pressant et énorme, en particulier pour les patients souffrant des pieds diabétiques, escarres et brûlures. C’est un centre particulier parce que le programme de formation élaboré est indexé sur le patient et la réalité socioéconomique africaine. Les workshops se font sur des patients réels, ce qui permettra de développer le concept de caravane inversée, mais ils se font aussi par simulation car les formateurs sont en train de développer les réalités mixtes et inversées ».
Mais il n’y a pas que cela, la qualité des enseignants est aussi importante car ce sont ceux qui ont cumulé le plus d’expertise dans le domaine du traitement des plaies en Tunisie et en Afrique qui conduiront la formation des professionnels de santé.
Pr Ramy Ben Salah ne compte pas s’arrêter en si bon chemin, il est décidé à développer la recherche et à recourir à l’intelligence artificielle et la robotique pour une meilleure prise en charge des malades du diabète.
Le diabète, un véritable problème de santé publique
L’épidémie du diabète en Tunisie est un véritable problème de santé publique. Selon des études, la prévalence du diabète en Tunisie avoisine les 19,8% de la population.
Les prévisions statistiques évoquent 27% à l’horizon 2027 pour atteindre plus d’un quart de la population. La proportion de Tunisiens diabétiques a atteint 15,5% des personnes âgées de plus de 15 ans en 2016. «Les projections futures sont aussi alarmantes, avec 2,125 millions de diabétiques en 2027, soit une augmentation de 300% en 30 ans. Par ailleurs, les études ont montré qu’un meilleur contrôle du diabète réduit le risque de complications cardiovasculaires (CV) et microvasculaires, et que la qualité de soins des diabétiques a un impact important sur le contrôle à court, moyen et long terme e coût de la maladie explose avec la prise en charge des multiples complications qui nécessitent dans la plupart du temps des hospitalisations récurrentes. Ces dernières sont nécessaires chez les patients dont le taux de glycémie est déséquilibré. Le coût de la prise en charge est faramineux et supporté par la collectivité publique» *.
Ali Mrabet réalise-t-il l’ampleur de la problématique ? Il s’est, en tout cas, félicité, lors de cette conférence, du choix de la Tunisie pour abriter le Centre de formation pilote et a exprimé sa satisfaction du plus qu’ajouteront les programmes qui seront dispensés au sein dudit centre aux compétences des médecins pour une meilleure prise en charge du diabète et surtout la réduction du nombre d’amputation des membres de patients diabétiques.
La plaie du pied est une complication particulièrement grave dans la mesure où 5 à 10 patients diabétiques sur 100 risquent une amputation de membre inférieur si les mesures de prévention ne sont pas mises en œuvre à temps.
Le « Centre d’excellence LR en cicatrisation » permettra de mettre les médecins tunisiens et africains au diapason des avancées technologiques dans ce domaine, de prodiguer les meilleurs soins aux patients, de réduire le taux d’amputation des membres inférieurs et de limiter les dépenses de santé.
«C’est à travers la médecine régénérative et les cellules souches que nous pourrons assurer la prise en charge complexe des plaies liés aux diabètes. Nous sommes conscients que ce n’est qu’en travaillant la main dans la main les uns les autres et en ayant confiance en nos moyens que nous pourrons réduire le taux d’imputation chez nos patients, améliorer les taux de guérison et réduire les dépenses de santé dans ce domaine», a déclaré Pr Ramy Ben Salah, appelant ses partenaires africains à participer activement aux programmes de formation et à profiter des nouvelles techniques médicales qui y seront dispensées.
Les participants africains, dont beaucoup découvrent la Tunisie pour la première fois, n’ont pas tari d’éloges sur la qualité de l’organisation assurée par l’ATPC.
Nasreddine Nsibi, ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, qui a répondu présent dès que les dirigeants de l’Association l’ont sollicité, a assuré de son appui pour toute action de formation qui sera dispensée par l’ATPC et de l’accompagner dans ses ambitions de faire de la Tunisie un site de référence dans la recherche médicale relative aux plaies des diabétiques.
La journée de lancement du centre de formation a été appuyée par Lehmann & Rauscher (L&R), leader mondial dans le domaine des dispositifs médicaux et des produits d’hygiène de pointe de qualité, des bandages classiques aux systèmes de soins et thérapeutiques les plus modernes.
Salim Bouzidi, Managing Director Middle-East & Africa des Laboratoires Lohmann & Rauscher (voir entretien) a pour sa part exprimé la prédisposition de la firme à investir dans la recherche et développement en Tunisie d’autant plus que les nouveaux cadres réglementaires incitatifs et encourageants y sont favorables.