Face aux difficultés rencontrées, jusqu’ici, pour obtenir le prêt de 1,9 milliard de dollars, objet d’un accord technique conclu le 15 octobre 2022, avec le Fonds monétaire international (FMI), et confrontée à une crise financière inédite qui ne cesse de s’aggraver, la Tunisie serait encline à adopter d’autres alternatives pour sortir de la crise. Plusieurs indices militent en faveur de cette thèse.
Le premier consiste en l’engagement de l’Union européenne, premier partenaire de la Tunisie, à mettre de côté, provisoirement, ses inquiétudes quant à l’évolution de la situation politique en Tunisie, depuis le coup de force constitutionnel du 25 juillet 2021, et à mettre la main dans la caisse pour apporter une aide exceptionnelle à la Tunisie, à la seule condition que cette assistance se fasse conformément au plan des réformes négociées avec le FMI.
Engagement européen à apporter une aide supplémentaire
Dépêché le 27 mars 2023 à Tunis, pour évaluer la situation, Paolo Gentiloni, commissaire européen à l’Economie, a assuré que « la Commission est prête à envisager une aide macrofinancière supplémentaire si les conditions nécessaires sont réunies. La première condition est l’adoption par le FMI d’un nouveau programme de décaissement. Il est primordial que ceci puisse avoir lieu dans les meilleurs délais ». Il a insisté pour dire que « la Tunisie ne sera pas abandonnée ».
Dont acte.
Mention spéciale pour deux pays membres de l’UE qui ont pris la décision d’aller plus loin dans leur soutien à la Tunisie, à savoir nos deux premiers partenaires commerciaux, l’Italie et la France en l’occurrence.
En effet, l’Italie a décidé, le 20 mars 2023, de fournir, en dehors de l’accord avec le FMI, 110 millions d’euros aux petites et moyennes entreprises tunisiennes par l’intermédiaire de l’Agence italienne pour la coopération au développement (AICS).
Plus intéressant encore, l’Italie a fait une proposition concrète à l’UE pour aider la Tunisie. «L’idée, d’après le vice-président du Conseil des ministres et ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, est de commencer par aider la Tunisie sans condition. Puis poussons-la à entreprendre des réformes. Accordons-lui 300 millions d’euros tout de suite, puis 300 millions d’euros de plus quand nous serons certains que les réformes ont été accomplies, ensuite 300 millions d’euros supplémentaires».
La France s’est engagée quant à elle, le 25 mars 2023, à soutenir la Tunisie et à couvrir tous les besoins financiers supplémentaires de la Tunisie, au titre de 2023 et 2024, à la seule condition d’appliquer les réformes convenues avec le FMI.
Une initiative inédite algérienne à l’horizon
Le deuxième indice est perceptible à travers l’émergence de nouveaux soutiens non conventionnels à la Tunisie, et ce parallèlement à une éventuelle finalisation de
l’accord avec le FMI et aux promesses européennes, qui constituent une nette évolution de la position européenne à l’endroit du pouvoir en place en Tunisie.
Ainsi, la presse algérienne, plus précisément le quotidien francophone indépendant, El Watan, a révélé dans sa livraison du 27 mars 2023 une “Initiative financière algérienne pour venir en aide à la Tunisie”.
En vertu de cette initiative, l’Algérie, dont le président a apporté, récemment, un soutien indéfectible à la cause tunisienne face à l’Occident, pourrait prendre l’initiative d’organiser, durant le mois de ramadhan, une réunion des pays arabes donateurs pour venir en aide à la Tunisie.
A priori, « les bonnes relations du président avec les pays clés du Golfe (Qatar, Arabie Saoudite et EAU), écrit le journal, le rendent éligible à cette initiative qui marquera un tournant dans les relations financières internationales ».
Selon El Watan, « on estime que 3 ou 4 milliards de dollars pourraient être rapidement mobilisés sous forme d’aides financières multiformes pour pallier “le chantage” des institutions financières internationales qui ont arrêté les négociations avec la Tunisie pour des raisons politiques ».
Le journal algérien voit dans « cette initiative en direction de la Tunisie dans sa situation précaire actuelle un fait sans précédent qui marquera un tournant précurseur ».
Des pays asiatiques peuvent aider la Tunisie à sortir de la crise
Au regard des bonnes relations qui la lient aux pays du sud-est asiatique (Chine, Japon, Corée du sud), la Tunisie pourrait également obtenir de ces nations amies une aide significative.
La Tunisie, qui a abrité, les 27 et 28 août 2022, dans des conditions exceptionnelles et controversées, la huitième Conférence internationale de Tokyo pour le développement de l’Afrique (TICAD8), pourrait bénéficier d’une partie des 30 milliards de dollars d’investissements affectés par le Japon à l’Afrique sur une période de deux ans.
La Tunisie serait ainsi récompensée pour son courage d’avoir accepté la participation, à la TICAD8, le président de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) et secrétaire général du Front Polisario, Brahim Ghali.
Cela pour dire in fine que parallèlement à une éventuelle obtention d’un prêt du FMI, qui serait du reste insuffisant pour subvenir aux besoins énormes de la Tunisie, la mobilisation de ressources extérieures parallèles est possible.