Le système de l’enseignement est fondé sur deux composantes, à savoir l’enseignant et l’élève. A ce jour, l’enseignant a toujours su préserver son rôle d’acteur principal de transmission de la connaissance à l’élève qui doit uniquement apprendre. Ces élèves vont à l’école pour acquérir des connaissances et développer des compétences sociales à fin d’obtenir des emplois.

Pendant des décennies, les systèmes éducatifs ont joué ce rôle dans la préparation à un ensemble défini et connu d’emplois.

Aujourd’hui, tout a changé. La pandémie Covid-19 a fait de notre environnement social un espace virtuel où les gens passent plus de temps à utiliser leurs appareils et applications électroniques pour socialiser. Cet espace virtuel nécessite une autre définition de règles, normes et politiques de l’environnement social.

Alors que les écoles continuent à préparer les jeunes aux métiers traditionnels, il y a de fortes chances que nombre de ces postes changent voire deviennent obsolètes dans 10 ans. D’après l’experte en éducation, Alexis Ringwald, CEO de LearnUp, «65% des enfants de nos jours vont avoir des métiers qui n’existent pas encore ».

Peut-on tolérer un système d’éducation périmé ? Quels sont les prémisses d’un nouveau mode d’enseignement ?

L’obsolescence des compétences

Les technologies exponentielles telles que l’intelligence artificielle, la robotique, les drones, l’impression 3D, la réalité virtuelle, les nanotechnologies, etc., impactent fortement nos entreprises, notre société et nos vies. Elles nous aident à bien des égards, mais en même temps, façonnent un nouvel avenir du travail avec des emplois qui ne sont pas encore définis ou imaginés.

En revanche, le système d’éducation reste figé ne sachant pas s’adapter ou évoluer pour préparer nos enfants à un nouvel avenir du travail, où la domination des technologies exponentielles et des plateformes sociales sera probablement la principale caractéristique.

L’OCDE mentionne, à ce propos, que l’obsolescence des compétences et le besoin d’en acquérir des nouvelles sont deux facteurs clés pour engager une réelle évolution du système d’enseignement.

L’OCDE rappelle que, en 1987, un travailleur pouvait avoir besoin d’adapter ses compétences 1 fois pendant toute une carrière comparée à un travailleur qui débute sa carrière en 2019. Ce dernier devra adapter ses compétences 8 fois le long de sa carrière avec une fréquence d’une fois tous les 5 ans.

Le World Economic Forum a partagé un chiffre inquiétant, précisant qu’à horizons 2030, 133 millions de nouveaux métiers seront créés et 800 millions d’emplois vont être perdus pour des raisons d’automatisation. Ces chiffres nous préviennent quant au gap important entre un système d’enseignement qui continue à former pour les mêmes métiers obsolètes et le marché du travail qui se métamorphose radicalement.

Un déphasage inquiétant sur lequel prévient l’Américain John Dewey, philosophe et expert en éducation : « Si nous enseignons aux élèves d’aujourd’hui comme nous enseignions à ceux d’hier, nous leur volons demain ».

A quoi ressemble l’avenir de l’éducation ?

Différentes organisations non gouvernementales travaillent à construire des scénarios et des feuilles de route pour l’éducation de demain sans clarifier en profondeur ses orientations. Parmi ces organismes, figure l’OCDE qui a publié un rapport, « Retour vers l’avenir de l’éducation : quatre scénarios de l’OCDE pour la scolarisation ».

Le Forum économique mondial avait inscrit ce thème sur l’agenda de Davos de janvier 2021 et a publié un article expliquant l’urgence de repenser l’avenir de l’éducation.

Le leader futuriste de l’éducation, Sir Ken Robinson, a expliqué les principaux problèmes du système de l’éducation publique actuel, suivi par des millions de personnes dans le monde qui ont visionné ses conférences TedX.

La quatrième révolution industrielle façonne rapidement une nouvelle façon de vivre et d’être. De nouveaux cursus scolaires devraient préparer les jeunes à s’intégrer dans le monde de demain et leur offrir les opportunités de développer des capacités cognitives flexibles.

D’un point de vue pédagogique, le système éducatif devrait concevoir de nouveaux outils et méthodologies qui renforcent la pensée critique « Critical thinking » et encouragent le développement de la réflexion.

Des compétences telles que la communication, le leadership et l’empathie sont essentielles à l’ère des technologies exponentielles. L’élève ou l’étudiant ne doit plus avoir un simple rôle d’apprenant et devra être contributeur dans la définition et l’évolution des modules à enseigner.

La culture du feedback et de la cocréation collective doit être renforcée. La promotion de l’apprentissage numérique peut prendre de nombreuses formes d’un point de vue technique, comme offrir aux étudiants et aux jeunes la possibilité d’apprendre à coder, de développer une pensée créative et de mieux comprendre la science des données. Les organisations à but non lucratif peuvent les soutenir en adoptant ou en concevant de nouvelles méthodologies pour développer des compétences de pensée exponentielle telles que la pensée critique, la résolution de problèmes, la créativité et l’empathie.

Au 18ème siècle, l’inventeur Sidney Pressey, avait attiré l’attention sur l’importance d’adapter l’éducation au terrain : « Il doit y avoir une révolution industrielle dans l’éducation dans laquelle la science de l’éducation et l’ingéniosité de la technologie éducative s’unissent pour moderniser les procédures grossièrement inefficaces et maladroites de l’éducation conventionnelle ».

A ce jour, les investissements et les efforts en matière d’enseignement sont restés insuffisants pour inventer un réel changement adapté au futur. Le système d’éducation est certainement dépassé tant sur les méthodologies que sur les contenus et l’évolution des technologies.

Dr. Lobna Karoui, Stratégiste en Intelligence Artificielle Appliquée pour des grands groupes internationaux, présidente de “AI Exponential Thinker”, contributrice à Forbes