Production de la Télévision Tunisienne en 2021, la série télévisée “Harga” (Le Chemin du Paradis) signée par le réalisateur Lassaad Oueslati vient de remporter le Premier prix de la toute première édition du Festival international des séries télévisées “Matera Fiction” (1er-4 juin 2023) à Matera, au sud de l’Italie, dans la région de Basilicate.
Outre les productions télévisées de l’Amérique Latine, Matera Fiction a fait un Focus sur la Méditerranée avec la participation de plusieurs pays dont la Turquie, l’Algérie, le Maroc, l’Italie, la France ainsi que la Tunisie avec la série dramatique “Harga” diffusée au mois du Ramadan 2021. Ce feuilleton qui a rencontré un large succès en Tunisie vient ainsi de rafler une distinction internationale dans un festival qui vient d’être lancé mais qui aspire à devenir la vitrine des séries télévisées internationales en provenance de pays où la production de séries TV y est déjà très développée et constitue une nouvelle destination du star-system aussi importante que pour les fictions et les films cinématographiques.
Organisé par GFG Media Associates, avec le parrainage de la Région Basilicate, la Municipalité et la Province de Matera et en collaboration avec Rai Fiction, Mediaset et TV Globo, cette première édition vient couronner la Tunisie au top du classement parmi des productions de pays où ce genre de séries est une véritable industrie en perpétuelle prospérité.
Donnant à voir pendant quatre jours des histoires, des récits de vie et des regards croisés sur le monde où nous vivons, par le format de séries télévisées qui attirent l’attention du monde entier, cette édition de Matera Fiction marquée par la participation de grands noms comme Nino Frassica, Carlo Verdone, Elena Sofia Ricci, quelques chefs de structure de Rai et Mediaset, réalisateurs et producteurs du Brésil, d’Argentine et de Turquie, ainsi que du directeur de la photographies Barbara Tarricone Hamilton journaliste de Sky, vise à ouvrir une fenêtre sur l’industrie mondiale des séries télévisées qui ont connu un succès au cours de la dernière décennie en se référant notamment au nombre des consommateurs suite à leur diffusion sur les plateformes numériques. Pour le cas de “Harga”, déclinée en deux saisons (40 épisodes), les chiffres évoquent un pourcentage de 93 % des utilisateurs de Google qui ont réagi positivement lors de sa diffusion dans le cadre de la programmation de la Watania 1 spécial Ramadan 2021, et en streaming gratuit sur la plateforme tunisienne Artify et sans publicité.
Mettant en avant la série télévisée abordée en plusieurs journées d’étude entre projections, témoignages, expositions thématiques, visites de lieux de tournage, cette première édition, écrit Senal News qui a fait le point également sur la production de l’Amérique latine, a invité les producteurs et réalisateurs de TV Globo, l’une des principales sociétés de médias au monde, produisant environ 2 400 heures de divertissement par an au Brésil qui, à travers son réseau, couvre 98,6% du territoire brésilien. Avec 122 chaînes diffusant à plus de 183 millions de personnes, TV Globo peut atteindre 99,5 % de l’audience potentielle au Brésil, ce qui représente la quasi-totalité de la population brésilienne.
De l’autre côté, la Turquie est en train de devenir le premier pays producteur de séries télévisées dans le bassin méditerranéen avec entre autres des scénaristes et acteurs d’Ay Yapin, l’une des principales sociétés de production turques, qui diffuse dans le monde entier, selon les propos de Giuseppe Papasso, organisateur de Matera fiction, rapporte le même journal.
Le panel rassemblant des intervenants de Turquie, d’Algérie et de Tunisie vise également à aligner la production télévisuelle en Méditerranée et à offrir de nouvelles perspectives de collaborations pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord. “Une industrie intéressante de la série télévisée se forme en Tunisie et en Algérie, qui n’avaient pas de tradition dans la production télévisuelle”.
Avec cette distinction, la Tunisie peut ainsi saisir l’opportunité d’ouvrir de nouvelles pistes de coopération et d’échange dans le cadre de cet événement qui a rassemblé également les professionnels italiens avec des représentants des principaux acteurs de l’industrie Rai, Mediaset et Sky.
Dans son volet ciné-tourisme, Matera Fiction a par ailleurs été une occasion pour effectuer des visites sur une série de lieux de tournage à Matera où les sociétés de production ont déniché des lieux intéressants et un cadre inspirant pour les auteurs, les acteurs et les réalisateurs italiens et internationaux au fil des ans, pour ne citer que Pier Paolo Pasolini, les frères Taviani, Francesco Rosi, Mel Gibson et Patty Jenkins ainsi que Roberto Rossellini, qui a choisi en 1968, la Tunisie pour le tournage de son drame “Actes des Apôtres”, devenant ainsi parmi les premiers réalisateurs (Luitz Morat, Georges Lucas etc) , après les Frères Auguste et Edouard Lumières dans les années 50, à immortaliser dans leurs bobines les premiers clichés des paysages multiples de la Tunisie, un plateau de tournage idéal pour le tour de manivelle d’œuvres de tout genre: fiction, romance, légende, histoire… et dont la plupart ont été classées comme des films à grand succès au box-office mondial.
L’intitulé “Harga”, qui est un mot en dialecte tunisien définissant l’aller simple dans des embarcations de la mort en partance de la Tunisie à travers la mer Méditerranée vers l’Europe, nouvel Eldorado aux yeux de ces immigrés, a placé la question des migrations dites irrégulières au cœur des débats, lors du mois de Ramadan 2021.
Soutenue par l’OIM Tunisie, la série a été utilisée par l’Organisation dans le cadre d’un projet plus large : dissuader contre la migration irrégulière, grâce à des fonds européens.
Dans sa rubrique “En Clair”, en datte du 11 Mai 2021, la plateforme podcast “Inkyfada” avance que sur la plateforme Artify, où elle est disponible en streaming, les 20 épisodes de Harga cumulent près de 10 millions de vues, sans compter l’audience enregistrée par la chaîne de télévision (données indisponibles). Avec ce feuilleton ramadanesque, la question de la migration s’est retrouvée au cœur des débats, précise Inkyfada.
Sa production aura coûté 2.6 millions de dinars selon la Télévision nationale, rapporte la même source. Et si la série a eu de nombreuses réactions positives, l’Organisation internationale de la Migration (OIM) en a lancé une campagne de dissuasion à la suite de ce récit dans Harga: une mère à la recherche de son fils disparu, des migrant·es qui déchantent après une traversée mouvementée et une politique européenne des frontières globalement occultée dans un casting principal qui réunit Wajiha Jendoubi, Riad Hamdi et Mhadheb Rmili.