Le démarrage de la première édition du Forum arabe des médias touristiques, organisé en partenariat avec l’Organisation Arabe du Tourisme et l’Union de radiodiffusion des Etats arabes (ASBU), et qui coïncide avec la 23ème édition du Festival arabe de la radio et de la télévision qui se déroule du 12 au 15 juin 2023, à la Cité de la culture Chedly Klibi à Tunis, a été marqué par la remise du Prix “Ibn Batouta”, à la Tunisie en la personne de Mohamed Moez Belhassine ministre tunisien du Tourisme et de l’Artisanat. Le prix a été également décerné au directeur général de l’ASBU Abderrahim Souleimen pour les efforts entrepris en vue de consolider la coopération avec l’Organisation pour tenir le premier forum des médias touristiques.
L’idée de la création de ce prix, décerné chaque année, à des personnalités arabes ayant contribué à développer le secteur touristique, est une initiative du royaume de Bahrein avec le soutien du Roi Hamad Ben Aissa El Khalifa. Il porte le nom de celui qu’on surnomme “Le Prince des Voyageurs”, l’explorateur marocain qui, deux siècles avant le navigateur et explorateur portugais de l’époque des Grandes découvertes, Fernand De Magellan, a parcouru 120 000 kilomètres, offrant un aperçu exceptionnel du monde musulman du XIVème siècle.
Ibn Batouta avait tout juste vingt-et-un an lorsque simple pèlerin en partance pour la Mecque, il quitta en 1325 son Tanger natal (Maroc). Après avoir traversé sans encombre et sans délai le Maghreb central (l’actuelle Algérie), il arriva à Tunis sous le règne du sultan hafside Abû Yahyâ Abû Bakr al-Mutawakkil au moment de l’Aïd el Fitr, qui marque la fin du ramadan, lit-on dans le récit d’exploration artistique “Sur les traces d’Ibn Batouta” porté sept siècles plus tard, dans le cadre du projet “Al Safar” soutenu par National Geographic, en partenariat avec l’UNESCO et le Misk Art Institute, et mené par le photographe et directeur artistique Yan Bighetti de Flogny et le réalisateur Damien Steck. En effet ils reconstituent dans le reportage commencé en mars 2018 au Maroc, pays de naissance d’Ibn Batouta, avant de se poursuivre dans le Maghreb moderne, le voyage légendaire de l’explorateur marocain du 14e siècle, Ibn Batouta, afin de témoigner en images de la diversité des cultures et des communautés d’Islam à travers 38 pays.
“Sur les traces d’Ibn Batouta: la Tunisie
Après le Maroc et l’Algérie, écrit Romy Roynard (Editorial Manager National Geographic France) dans une publication en date du 5mars 2019, l’explorateur musulman Ibn Batouta arriva à Tunis au moment de l’Aïd el Fitr. ” La fête de la rupture du jeûne eut lieu pendant mon séjour à Tunis. Je me rendis au moçalla (espace de prière), où les habitants étaient réunis en grand nombre pour assister à cette fête. Ils étaient sortis revêtus de leurs plus beaux habits et dans le plus pompeux appareil. Le sultan Abû Yahyâ arriva à cheval, accompagné de tous ses proches, de ses courtisans et des officiers de son empire, qui marchaient à pied dans un ordre merveilleux. ”
La fête de la rupture du jeûne, poursuit-elle, tombait en 1325 le 10 septembre. C’est là l’un des flous historiques posés par le récit que le grand voyageur rapporta au poète Ibn Juzayy. Comme le note Stéphane Yerasimos dans la traduction des Voyages parue aux éditions La Découverte, dans son Histoire des Berbères, Ibn Khaldoun place l’entrée du sultan à Tunis au mois de chawal (septembre-octobre), soit un mois après les dires d’Ibn Batouta. Ibn Khaldoun, né en 1332, n’était cependant pas un témoin direct des faits et l’arrivée coordonnée à Tunis des ambassadeurs et du sultan semble donner raison à Ibn Batouta.
Si plusieurs historiens mettent en cause la fiabilité du récit mis en forme par Ibn Juzayy – Ibn Batouta n’a a priori jamais pris de notes lors de ses pérégrinations et plusieurs passages des Voyages sont empruntés à des manuscrits antérieurs. Ainsi, lit-on encore “y découvrons-nous la description du sultan Abû Yahyâ Abû Bakr al-Mutawakkil, issu de la dynastie d’origine berbère masmoudienne qui gouverna puis régna sur un grand territoire d’Afrique du Nord appelé l’Ifriqiya, constitué au Moyen-Age du Constantinois, de la Tunisie et de la Tripolitaine (nord de l’actuelle Libye), entre 1207 et 1574. C’est sous l’impulsion de la puissante dynastie Hafside que Tunis gagna en importance, les souverains élisant domicile dans la ville”.
En hommage à ce grand explorateur, plusieurs prix ont porté également son nom pour ne citer que le Prix “Ibn Batouta de la littérature de voyage”, lancé en 2003, par le Centre arabe pour la littérature géographique et qui récompense chaque année les meilleures œuvres annotées et écrites en littérature de voyage. D’ailleurs, ce prix a récompensé parmi les 11 lauréats sur 20 le poète et traducteur tunisien Ayman Hassan, en marge du 27ème Salon international de l’édition et du livre (SIEL) en 2022.. Sans oublier en 2017, l’écrivain et romancier Kamel Riahi qui a remporté le prix Ibn Batouta de récit de voyage au titre de l’année 2017-2018 décerné annuellement par la Maison “Souidi” à Abou Dhabi, et ce, pour son manuscrit “Wahed sefr lil quatil”, un journal qu’il a écrit en 2010 lors de son séjour en Algérie.