Juristes et économistes se sont réunis, mardi, dans le cadre d’une conférence pour discuter de la présidentielle et de son timing. Pour eux, plus besoin de tarder encore. “L’heure est grave et le flou ne profite à personne”.
Invité au débat organisé par le collectif citoyen “Soumoud”, Sadok Belaïd, constitutionnaliste et ancien doyen des facultés de droit, a critiqué l’autorité en place. “Une autorité plutôt encline au jeu de la sourde oreille et du laisser-aller”.
Pour lui, c’est un choix du pouvoir. Face à une conjoncture socio-économique et politique sans lendemain où le pouvoir n’a plus de réponses à des questions encore en suspens, le silence est la solution d’ultime recours.
Une autorité plutôt encline au jeu de la sourde oreille et du laisser-aller
Selon Belaïd, l’autorité en place fait sciemment la sourde oreille, laissant le peuple affaissé sous les coups de boutoir d’une conjoncture socio-économique morose.
Dans son essence et quintessence, la démocratie c’est “le dialogue, le débat et la controverse”, a fait savoir Sadok Belaïd, estimant que “le temps en Tunisie est par excellence celui du silence”. Silence de la société civile ; silence des électeurs qui rechignent à participer aux élections et surtout “silence des Palais”, en allusion aux palais, de Carthage, de Bardo et de la Kasbah.
Pour Belaïd, la Tunisie fait face à “un dilemme de taille”. Elle est piégée entre le marteau d’un statu quo constitutionnel et l’enclume d’un avenir qui se dessine en pointillé.
Alarmiste, Sadok Belaid s’est exprimé en des termes clairs sur les dangers du maintien de ce statu quo. La politique du silence est somme toute délétère, a-t-il prévenu. Son maintien, sa persistance ouvre droit à une vraie tragédie, a-t-il regretté, affichant peu d’espoir en la capacité du régime en place à trouver une issue à la polycrise qui frappe le pays.
La politique du silence est somme toute délétère
Temps aux économistes, Hassine Dimassi, l’expert à la triple casquette de syndicaliste, d’économiste et de politicien a donné son avis sur la question.
Pour lui, il n’est plus question d’attendre encore. Il est impérieux que tous les Tunisiens se mobilisent pour “éviter le pire”, soulignant que la conjoncture économique et politique actuelle, si elle dure et perdure, va mener le pays au bord du précipice.
En bon connaisseur des indicateurs micro et macroéconomiques, Dimassi a fait état d’une détérioration croissante du niveau de vie des Tunisiens assortie d’un taux de croissance faible.
Ces indicateurs souvent au bas conduiront indéniablement à éreinter le trésor public et à réduire drastiquement les ressources budgétaires, notamment celles allouées au développement, rendant ainsi l’Etat en mal de pouvoir sécuriser et maintenir les réalisations et les infrastructures existantes, telles que les routes et les hôpitaux.
Selon Dimassi, la création de la richesse nécessite “des prérequis”, “des préalables”, “des ingrédients” difficiles mais possibles à trouver à l’heure actuelle.
Il est temps de trouver des alternatives et des solutions concrètes
“Outre la réalisation d’un taux de croissance de 2.5%, il faut qu’il y ait un président fort, aux mains propres et doté d’une solide expérience de la société tunisienne”.
“Aussi, un président, un Homme d’Etat, qui soit en mesure de pouvoir prendre décisions énergiques et tranchantes sans nulle réticence ou tergiversation”, a-t-il dit.
“Un président qui prend ses décisions après mûre et profonde réflexion. Un président qui sollicite l’avis des autres, apprécie, évalue en toute objectivité et décrète en temps opportun.
Ce président doit être capable de prendre des mesures à court, à moyen et à long terme. Un président qui ne tarde plus à relancer des projets vitaux et essentiels pour relancer l’économie”, a-t-il ajouté.
Pour Dimassi, il n’y a pas de miracle mais plutôt des alternatives et des solutions concrètes.
Pour ce faire, a-t-il recommandé, il est temps de trouver un financement alternatif de l’énergie, de procéder au dessalement de l’eau de mer, d’opérer la digitalisation de l’économie nationale, de renforcer le réseau routier, notamment les autoroutes et de parachever le projet du port des eaux profondes d’Enfidha tant attendu par les Tunisiens.