Doit-on se réjouir de voir un enfant de 2 ans exposé à un écran de Tablette ou de Téléphone pendant des heures ? Doit-on penser que des enfants scotchés à des écrans est synonyme de développement de leurs intelligences ? Doit-on pousser nos enfants dans ces univers numériques sans les protéger et les rappeler au monde Réel ?
Par Dr. Lobna Karoui
L’univers digital nous aide au quotidien dans nos vies professionnelles et sociales, ce même univers a su aussi nous ensorceler par la magie des réseaux sociaux, satisfaire notre curiosité et pour beaucoup le péché du voyeurisme en leur permettant d’entrer dans les vies des autres sans demander leur permission.
Récemment, j’ai été interpellée à plusieurs reprises par des questions de parents au sujet de l’impact des écrans sur leurs enfants. Des parents qui sont conscients de l’effet néfaste des écrans pour leurs enfants et d’autres ravis d’avoir des enfants occupés par ces outils. Des parents qui interdisent les écrans et d’autres qui encouragent leurs enfants à avoir des consoles, faire des vidéos Tiktok et utiliser Youtube sans contrôle ni restrictions.
Je vous avoue qu’en tant que parent, je comprends le dilemme et l’inquiétude des parents. Ce que je comprends moins c’est la réjouissance de certains parents face à l’addiction de leurs enfants aux écrans et leurs libres usages.
Par mon métier de Stratégiste en Intelligence Artificielle appliquée, je peux vous dire que ces univers digitaux ainsi que l’usage excessif de la Tablette ou la console peuvent créer une forme d’habitude, voire d’addiction. Donnons quelques chiffres pour faciliter la compréhension des parents.
L’addiction aux écrans : un danger réel pour le développement des enfants
D’après des études statistiques en Loire Atlantique en France, il a été souligné qu’une famille avec des enfants de 4 à 14 ans peut avoir en moyenne 10 écrans, que 47% des enfants de moins de 3 ans utilisent des smartphones et des tablettes et qu’un enfant de 4 à 6 ans reste en moyenne 2h22 minutes face à l’écran par jour. Ces chiffres sont alarmants étant donné l’impact négatif de cette addiction aux écrans dès le plus jeune âge.
Une forte corrélation entre le temps passé sur les écrans et des conséquences désastreuses sur la santé de nos enfants et adolescents
Des centaines de recherche pendant ces dix dernières années ont démontré une forte corrélation entre le temps passé sur les écrans et des conséquences désastreuses sur la santé de nos enfants et adolescents. Parmi ces derniers, je cite la baisse des capacités cognitives (manque de concentration, difficulté à réfléchir et établir un raisonnement, etc.), une augmentation de l’anxiété (causé par l’exposition à un contenu non adapté à l’âge de l’enfant ainsi qu’une masse d’informations en très peu de temps), augmentation des troubles relationnels (échanger sur un réseau social ne démontre pas du développement de la confiance ou de la capacité à créer des relations saines…) ; manque de sommeil voir risque de dépression ou d’obésité.
Il est fortement déconseillé d’exposer des enfants à des écrans avant leurs journées d’école. Un enfant a besoin d’interagir avec ses parents, ses camarades de classes, les enfants de son entourage et sa famille pour mieux appréhender le monde et construire ses mécanismes d’apprentissage et de défense. Cela se fait graduellement au fil des années depuis la naissance jusqu’à un âge inférieur à 10 ans. Exposer un enfant à ces écrans de façon excessive est source de danger pour son cerveau, sa confiance en soi, sa compréhension du monde qui l’entoure et sa capacité à développer ses relations avec le reste du Monde.
Mark Zuckerberg, n’a jamais exposé ses filles à un écran depuis leur naissance. Bill Gates a aussi imposé des règles strictes à ses enfants
Ces dangers touchent tant les enfants de 0 à 10 ans que les adolescents. Parmi les bonnes pratiques, des experts ont défini la règle de 3-6-9-12 qui consiste à interdire l’exposition d’un enfant de moins de 3 ans à l’écran sauf en usage accompagné de quelques minutes pour un dessin animé ou utilisation d’une application d’éveil (même l’usage très restreint est fortement déconseillé à cet age).
Entre 3 et 6 ans, l’écran n’appartient pas à l’enfant et son utilisation doit être contrôlé par le parent tant sur le contenu que sur la durée qui ne doit pas dépasser 1 heure par jour.
De 6 à 9 ans, il est essentiel de continuer la limitation des temps d’exposition mais il est fortement encouragé de commencer à utiliser le digital pour développer la créativité (créer des visuels, des vidéos, des animations, etc.) et commencer à comprendre le raisonnement algorithmique et le développement informatique via Scratch par exemple.
De 9 à 12 ans (que j’étendrais fortement à 15 ans minium), il est important de contrôler l’accès aux réseaux sociaux et protéger nos jeunes contre toute forme de cyber harcèlement et exposition à des contenus qui peuvent affecter leurs psychologies. Interdire les écrans dans la chambre, le matin, pendant les repas et avant le coucher est conseillé à tout âge pour nos jeunes.
Écrans et apprentissage : trouver le juste équilibre pour nos enfants
A ceux qui restent sceptiques face au contrôle des contenus numériques voir n’admettent pas la nécessité de certaines restrictions, je vous invite à réfléchir au fait que le créateur de Facebook, Mark Zuckerberg, n’a jamais exposé ses filles à un écran depuis leur naissance. Bill Gates a aussi imposé des règles strictes à ces enfants. Mais si toutefois, vous n’êtes toujours pas convaincu, je vous invite à regarder le documentaire de Netflix « The Social Dilemma » et d’en juger par vous-mêmes.
Alors que l’été arrive, je voudrais remercier les parents qui m’ont interpellée sur cette importante question pour nos enfants, nos familles et l’avenir de notre Nation « TUNISIE ».
Bravo à tous les parents qui travaillent dur pour l’éducation de leurs enfants et qui œuvrent tous les jours à les préparer pour un meilleur avenir. Je vous invite à vous armer de patience et à être vigilants quant à l’utilisation des écrans pour vos enfants et adolescents en limitant le temps d’exposition, en discutant de ce qui peut les choquer ou les interpeller, contrôler certaines sources d’information voire interdire certains contenus et les encourager à faire des activités physiques.