A regarder la vidéo de l’audience que leur avait accordée, le 30 juin 2023, le président de la République Kaïes Saïed, le ministre du transport Rabie Majidi et le PDG de Tunisair, Khaled Chelly étaient, particulièrement, souriants et affichaient une grande satisfaction.
Et pour cause. Le communiqué publié par la présidence de la république à l’issue de cette audience nous informe que le Chef de l’Etat a non seulement approuvé le plan de restructuration du transporteur public que lui avait présenté les deux responsables mais également et surtout exprimé un refus net de la mise en place en Tunisie de l’open Sky traité sur le ciel ouvert.
Le Chef de l’Etat avait déclaré à ce propos : « le ciel doit être ouvert aux avions tunisiens et non envahi par des avions qui ne laissent pas de place aux nôtres dans leurs essaims ».
L’Open Sky une menace réelle pour les transporteurs aériens tunisiens
Cette déréglementation aérienne, objet d’une convention paraphée à la hâte, en 2017, par l’ancien premier ministre Youssef Chahed avec l’Union européenne (UE), était considérée par le transporteur public, tout comme les transporteurs aériens privés tunisiens, comme une sérieuse menace pour leur pérennité.
Pour les responsables du groupe Tunisair, la convention sur l’open Sky est un accord périlleux, pour deux raisons principales.
La première réside dans le fait que la Tunisie n’avait pas vraiment besoin de l’ouverture de son ciel en ce sens où ce ciel est déjà largement ouvert.
Selon les experts, les compagnies aériennes tunisiennes y compris le transporteur national Tunisair, à défaut de moyens financiers et logistiques conséquents, ne sont jamais parvenues, jusqu’ici, à exploiter totalement les 50% de part du marché qui leur revenait de droit. Elles sont actuellement à hauteur de 35%, laissant au total 65% (15% + 50%) de part du marché aux pavillons étrangers.
Mieux encore, en matière de charter, la Tunisie a libéralisé cette activité depuis les années 70. Ainsi, toute compagnie aérienne désireuse d’opérer en charter sur la Tunisie est autorisée à le faire quel que soit son pavillon d’origine et sans restriction de fréquences.
La deuxième raison serait que dans leur intérêt, les compagnies tunisiennes, confrontées constamment à un problème de remplissage de sièges (60% environ) seraient mieux inspirées en pensant plus à remédier à cette lacune qu’à ouvrir le ciel à des concurrents plus puissants financièrement, mieux nantis et mieux équipés pour occuper le terrain et imposer leurs prix.
Autre raison qui pousse le groupe Tunisair à se méfier de l’application de la convention sur l’Open sky. Celle-ci prévoyait pour le transporteur public deux conditions majeures : l’extension de l’aéroport de Tunis Carthage et la restructuration de Tunisair.
Malheureusement, au regard de la situation financière et sociale désastreuse dans laquelle se trouve le groupe (surendettement, pertes faramineuses, personnel pléthorique.), ces deux conditions n’ont pas pu être réunies dans les temps.
Quant aux retombées attendues de cette décision présidentielle, elles seront perceptibles à travers la déception de la Commission ultralibérale européenne, des compagnies aériennes étrangères et des professionnels du tourisme et organisations patronales locales. Ces derniers affirmaient dans leur argumentaire que l’Open Sky aller booster les flux touristiques, une thèse qui n’a jamais été confirmée, se sont heurtés, cette fois-ci à un chef d’Etat tunisien atypique certes mais soucieux de l’intérêt supérieur du pays et de ses entreprises publiques.
Last and not least, cette décision est pleine de bon sens lorsqu’on sait qu’au niveau de la méditerranée, à l’exception du Maroc, l’Open sky n’est pas appliqué dans les principales destinations touristiques concurrentes de la Tunisie, s’agissant entre autres de l’Egypte et de la Turquie.