Une mondialisation ‘’fragmentée’’ prend forme. Les relations internationales sont en chantier de transformation. Dans cette physionomie du monde en mouvement, la Tunisie va-t-elle reconfigurer ses relations économiques, sous la pression du poids de sa dette ?
Jeudi 13 juillet, l’IACE a organisé la 8e édition de Tunis forum. Pour l’édition 2023 ce fut un exercice de prospective, à partir de l’actualité brûlante de la nouvelle géopolitique.
Cette nouvelle donne contraint-elle la Tunisie à remodeler ses relations commerciales sous contrainte ? C’est plausible, soutient Taieb Bayahi. Et, le président de l’IACE de rajouter que cette fatalité pourrait être transformée en opportunité de rebond si les chefs d’entreprises entraient en scène.
Le monde se transforme
Dans son speech d’introduction Taieb Bayahi, rappelle que de nouvelles alliances sont en train de s’opérer. Des Blocs politiquement convergents se mettent en place. Il évoque, notamment, l’expansion du bloc des BRICS.
Ce dernier accueille de nouveaux entrants à savoir l’Arabie Saoudite, les EAU, l’Indonésie, l’Egypte et enfin l’Argentine, tout en recalant l’Algérie. Point besoin qu’il le précise mais tous ces pays ont en commun, de tenter d’échapper à l’injustice de l’ordre mondial actuel.
La dynamique de la nouvelle donne géopolitique, manquera-t-elle d’impacter la stratégie de politique étrangère de la Tunisie ? Le pays vivant, sous stress budgétaire et financier, tenu en standby par le FMI se trouve dans une dépendance financière étouffante du fait de l’explosion de sa dette publique.
La géopolitique n’est pas qu’une exclusivité des diplomates, les entreprises ont un rôle clé à jouer
L’espoir de relocalisation des IDE vers notre aire géographique à la suite de la crise sanitaire ne se confirme pas. Et voilà que survient la guerre en Ukraine et son lot de perturbations du marché du blé et de l’énergie. La dernière édition des Journées de l’Entreprise à Sousse avait traité de cet aspect rappelait, Taieb Bayahi. Il a bien été question du rapport de la sécurité des entreprises ainsi mises à mal et de la souveraineté nationale.
Cette même relation de causalité ne s’est pas démentie. Et le président de l’IACE, d’appeler l’attention sur le fait que la géopolitique n’est pas qu’une exclusivité des diplomates. Le pays serait bien inspiré de réserver un rôle important aux chefs d’entreprises. Cette catégorie d’acteurs, feront de sorte qu’au lieu de subir la nouvelle géopolitique le pays peut en tirer avantage. Il n’existe pas de réplique universelle, chaque pays est appelé à composer son propre menu. Que fera la Tunisie ?
Devoir regarder ailleurs
Zoubeir chaieb, commissaire de Tunis forum soutient que la nouvelle donne géopolitique s’ajoute à nos contre-performances économiques. Il considère que l’explosion de la dette publique ne manquera pas d’impacter notre politique étrangère étant donné la rigidité de la conditionnalité des prêteurs. Il faut avouer que cela nous maintient dans un état d’expectative contre-productive pour notre croissance économique.
Insensibles, nos partenaires traditionnels tel les États-Unis ou l’Union européenne restent de glace face à nos soucis de solvabilité financière. Tous lient leur éventuelle contribution à la conclusion d’un accord avec le FMI. Forcément il nous faudra regarder ailleurs. Mais est-ce que ce changement d’horizon doit être suivi d’effets structurants.
69% des Tunisiens jugent que l’avenir des relations internationales est inquiétant
Evoquant les résultats d’un sondage récent Zouheir chaieb soutient que l’opinion publique est très sensible à cette question. En effet ils sont 69% à juger que l’avenir des relations internationales de la Tunisie est inquiétant.
De même que 71% des Tunisiens considèrent que nos relations financières impacteront nos relations économiques. Ils sont 55 % à penser qu’on a intérêt à regarder davantage en direction de la Chine, des États-Unis ainsi que de l’Algérie.
Cependant Zoubeir Chaieb introduit deux nuances à savoir que les chefs d’entreprises, se préoccupent davantage que les citoyens du renforcement de nos échanges avec la Libye.
Ce qui est une preuve de discernement économique. Et que si le pays doit changer son fusil d’épaule, il ne doit pas renoncer à ses anciens partenaires. Il s’agit raisonnablement de rééquilibrer ses partenariats que d’en tailler de nouveaux.
Comment générer du financement malgré le déficit commercial avec la Chine et la Turquie ?
Les relations économiques et financières vont de pair
Manara Toukabri, economic researcher à l’IACE, faisant part des résultats d’une étude récente affirme que la sensibilité politique est moins active. Les relations économiques et financières vont de pair, et que cela ressort davantage en situation de crise de la dette.
Elle annonce une corrélation positive à hauteur de 75% entre la dette extérieure et l’intensité des flux d’échange commerciaux pour un pays donné. Elle considère que l’excédent positif de la balance commerciale est corrélé avec la dette. Cela se vérifie entre la Tunisie et la France.
La France est le premier du peloton des Top Five des pays prêteurs de la Tunisie avec un encours de 2 milliards de TND. Et la balance commerciale dégage un excédent en faveur de la Tunisie.
Madara Toukabri précise que ce sens de causalité se vérifie quand le ratio de la dette sur PIB dépasse 35%, ce qui est le cas de 66 pays dans le monde. La question, de notre point de vue, serait de savoir comment générer du financement à partir du déficit commercial notamment avec la Chine et la Turquie ?
Suite :