La 8ème édition de Tunis Forum 2023, organisé par l’IACE fut un exercice de prospective, à partir de l’actualité brûlante de la nouvelle géopolitique.
Rafaa Tabib, universitaire, expert en Relations Internationales, décrit un environnement chaotique dans notre voisinage immédiat. Il est vrai que la méditerranée représente 35 % des flux mondiaux du commerce mais notre prolongement continental vit sous un recul de l’Etat.
C’est notamment le cas en Libye, au Mali, au Niger, en Maurtianie. La pression chinoise dans le cadre de son initiative ‘’Collier de perles’’ destinée à sécuriser ses approvisionnements à partir du Moyen Orient et de l’Afrique compliquent la donne.
Dans cette profondeur saharienne du continent on ne sait avec quel opérateur traiter, Rafaa Tabib s’appuie sur la thèse d’Alexandre Douguine, politologue, conseiller de Valdimir Poutine qui appréhende le ‘’Sud Global’’ et l’état de confusion économique qui y règne.
Rafaa Tabib se sert de l’exemple de Kasserine pour illustrer les possibilités de redéploiement sur terrain. Doit-on faire de cette ville une impasse économique, un ‘’mur’’ disait-il ou une plateforme vers l’au-delà continental.
Hamza Meddeb, co-directeur du programme d’économie politique au Carnegie Middle East Center, abondant dans le sens de la causalité entre sécurité économique et souveraineté nationale. Rebondissant à partir de l’exemple de Kasserine il dira que la Tunisie apparait comme déboussolée. Il la voit hésiter entre son interdépendance et une volonté de diversification économique sensée lui apporter une autonomie de décision et de choix de ses partenaires.
Et cette interdépendance ne vaut pas que pour la composante financière, pointant du doigt la dépendance envers le gaz algérien. Et Hamza Meddeb d’appeler le leadership tunisien à prendre position sur la question.
L’économie ‘’ driver’’ d’alliance géopolitique ?
Aslan chikhaoui membre du Board du WEF, soutient que l’économie n’est plus le ‘’driver’’ des alliances géopolitiques. Le ferment en la matière est la quête d’indépendance économique. Et celle-ci pourrait conduire à une relation de coopération partagée.
Aslan chikhaoui, rappelle que le World Economic Forum a parlé de la MediterrAfrique. Le Continent détient 90 % des métaux précieux de la IT tel le Lithium et le Strontium que l’Union Européenne convoiterait comme des ‘’Terre rares’’. L’UE consommerait à horizon de 2030 près de 12 fois sa consommation actuelle de lithium.
Et l’expert d’espérer convertir ce Soft Power africain en smart Power, garant d’une meilleure intégration du continent à l’économie de l’UE. Brahim Oumanour, expert international, intervenant par Skype, recommanderait à la Tunisie d’observer un état de neutralité afin de ne pas compromettre ses futurs partenariats. La neutralité n’est pas synonyme de diplomatie passive mais de diplomatie discrète. Et pour sa part Abdelaziz Medjahed, DG de l’Institut national de stratégies globales en Algérie ne veut pas s’embarrasser de précautions pointillistes telle la neutralité. Chaque pays doit suivre sa pente naturelle, à savoir ses intérêts.
Les choix de la Tunisie
Les interventions des experts nous laissent sur notre faim car beaucoup d’entre elles se sont écartées de la relation entre rapports économique et financier. Et par conséquent elles n’ont pas aidé à répondre de façon directe à la question de savoir comment la Tunisie pourrait se redéployer à l’international sans subir la pression de sa dette.
Le débat a parfois manqué de cohérence car il y a eu confusion de genres entre données politique et économique. L’exemple des BRICS en est l’illustration. On a beau présenter ce bloc comme une force en devenir avec la perspective de représenter près de la moitié du PIB mondiale à horizon de 2050. Cela reste une spéculation.
La Chine a avancé à pas de géant sur le plan économique. Cependant même son essor en IT ne saurait occulter sa dépendance technologique pour les puces et les micro-processeurs. On a en mémoire comment le Vice-gouverneur de la Banque Centrale de Chine courtisait Chedly Ayari alors gouverneur de la BCT pour accepter le Rinminbi (Yuan) dans le panier tunisien des devises.
John B. Alterman expert US intervenant par Vidéo, disait que la Tunisie représentait le ‘’dessus du panier de la région’’ et qu’elle était ‘’capable du meilleur’’. Cela ne donne pas de réponse au thème du Forum mais nous laisse espérer une sortie par le haut.
Récemment le baromètre EY laissait entrevoir une possibilité de rebond de nos entreprises à international via, entre autres pistes d’avenir, la transition écologique. C’est à n’en pas douter, un élément de résilience rassurant qui vient conforter la Thèse de Taieb Bayahi quant à la pertinence du rôle des chefs d’entreprises.