L’expert international en énergie, Hamed Materi et l’ex-ministre de l’Industrie et de l’Energie, Mongi Marzouk ont appelé, samedi, à une réforme intégrale du secteur de l’énergie en Tunisie à travers un profond amendement du Code des hydrocarbures et le lancement d’un vaste programme national d’auto-production d’énergie renouvelable dans l’Industrie, le tourisme, le commerce, l’administration et les logements.
Les deux intervenants, qui s’exprimaient lors d’un débat organisé par l’Ordre des ingénieurs tunisiens (OIT) sur le thème “politiques énergétiques en Tunisie, les solutions pour assurer la sécurité énergétique”, ont passé en revue, à cette occasion, les faiblesses et les performances du secteur énergétique en Tunisie, lequel souffre d’un déficit énergétique qui ne cesse de s’aggraver pour atteindre près de 60% du déficit commercial général (2022).
Hamed Materi est revenu, dans ce contexte, sur le plan de réforme de l’activité de recherche des hydrocarbures et leur production en Tunisie à travers la communication avec toutes les parties intervenantes. L’objectif, d’après lui, est de réduire la pression sur le secteur et développer et valoriser les réserves nationales d’hydrocarbures.
Ce plan devrait être basé, entre autres, sur la restructuration du secteur pour le faire sortir de sa stagnation et le déblocage de la situation pour promouvoir la compétitivité du site Tunisie.
L’expert a suggéré le lancement d’un dialogue national social avec toutes les parties prenantes dans les régions et les entreprises du secteur pour discuter de leur responsabilité sociétale et environnementale et mettre fin aux politiques d’emplois précaires et fictifs.
Pour développer le domaine d’exploration, l’expert a fait valoir qu’il est possible de découvrir des gisements de pétrole dans de nouveaux et anciens sites à condition de mieux organiser, juridiquement, l’activité de recherche et d’exploration.
“Il est aussi possible de conclure des contrats de partenariat avec des entreprises spécialisées pour réévaluer le potentiel dans les grands champs tunisiens”, a encore indiqué l’expert, appelant à promulguer une nouvelle loi sur les hydrocarbures qui serait plus attractive pour les investisseurs étrangers et qui prendrait en compte la restructuration du secteur.
Il a également proposé un régime contractuel unifié de recherche et d’exploration et l’adoption d’un contrat-modèle pour tous les prochains contrats pétroliers.
D’après lui, le secteur des hydrocarbures dispose d’un vrai potentiel de développement, “néanmoins, il a besoin d’une nouvelle vision pour booster l’investissement et devenir une locomotive pour l’économie nationale”.
L’ex-ministre de l’Industrie et de l’Energie, Mongi Marzoug a, pour sa part, insisté sur la nécessité de lancer un vaste programme national d’auto-production et d’auto-consommation des énergies renouvelables dans les secteurs de l’Industrie, du tourisme, du commerce, de l’administration et des logements pour alléger le fardeau sur le budget de l’Etat et réduire le déficit énergétique dont souffre le pays.
“L’énergie renouvelable joue un rôle primordial dans le développement durable, quand elle est axée sur les énergies propres peu consommatrices d’eau, dont l’éolien et le solaire. Le pays gagnerait, aussi, à investir dans l’hydrogène vert qui est perçu actuellement comme l’énergie du futur”, a-t-il dit.
Marzoug a proposé la digitalisation du secteur énergétique et l’exploitation des datas pour rationaliser la consommation d’énergie et tirer le meilleur profit des nouvelles technologies dans ce domaine.
De son côté, le président de l’Ordre des ingénieurs tunisiens (OIT), Kamel Sahnoun a fait remarquer que la Tunisie qui a été un pays exportateur d’énergie depuis 2000, est devenu un pays souffrant d’un déficit énergétique qui a atteint près de 60% du total du déficit commercial en 2022.
“C’est un indicateur alarmant et préoccupant d’autant plus qu’il pèse de plus en plus sur l’économie nationale”, a-t-il prévenu.
Le responsable a rappelé la baisse de la production pétrolière en Tunisie de 12% entre 2021 et 2022 et de celle du gaz naturel de 7% contre une augmentation de la consommation d’électricité de 5% par an.
Face à cette situation qu’il a qualifiée de “catastrophique”, Sahnoun a souligné la nécessité de trouver les solutions possibles pour éviter une aggravation du déficit énergétique et préserver les équilibres financiers du pays.
Le premier responsable de l’OIT a mis l’accent sur la promotion des énergies renouvelables en tant que véritable alternative pour réduire le déficit énergétique, critiquant le faible taux d’intégration des ER dans le mix énergétique qui ne dépasse pas, jusqu’à ce jour, 3% alors que l’objectif national est d’atteindre 30% en 2030.
Il a appelé à adhérer aux orientations internationales vers la promotion de l’hydrogène vert, en dépit du coût élevé de sa production, compte tenu du positionnement stratégique de la Tunisie, de sa proximité de l’espace européen et de sa capacité d’exporter cette énergie alternative.