“Les mots sont des pistolets chargés”, disait le philosophe français Jean-Paul Sartre. Avec cette belle image, Sartre montre que le langage est une arme puissante pour se battre contre les injustices et faire progresser le monde. Pour le philosophe existentialiste, le langage, cette faculté que les hommes possèdent pour exprimer leur pensée et communiquer entre eux, a la capacité d’exprimer des idées et convictions qui peuvent remettre en cause l’injustice.
Cette merveilleuse métaphore m’est revenue à l’esprit en écoutant, le 24 octobre 2023, le discours prononcé par le secrétaire général de l’ONU, António Guterres (Portugal), à l’occasion de la réunion du Conseil de sécurité sur la situation au Proche-Orient et dans la bande de Gaza.
Au moment où on donnait le plus haut cadre onusien pour défaitiste et démissionnaire face au génocide perpétré, depuis une vingtaine de jours, dans la bande de gaza, le portugais a eu les mots qu’il faut pour se rattraper et briller.
S’adressant au Conseil, il a déclaré qu’« était important de reconnaître que les attaques du Hamas ne se sont pas produites en vase clos et ne viennent pas de rien» ajoutant : « Le peuple palestinien a été soumis à 56 ans d’occupation étouffante ».
“Les mots sont des pistolets chargés”, disait le philosophe français Jean-Paul Sartre.
Et le leader onusien de poursuivre :« Je suis profondément inquiet concernant les claires violations du droit international humanitaire que nous voyons à Gaza. Soyons clairs : aucune partie à un conflit armé n’est au-dessus du droit humanitaire international. » ;
Et pour ne rien oublier, Antonio Guterres a estimé que « pour apaiser cette souffrance immense, faciliter la distribution de l’aide de façon plus sûre, et faciliter la libération des otages, je répète mon appel à un cessez-le-feu humanitaire immédiat ».
La pertinence du discours du secrétaire général de l’ONU
Ces quelques mots de rappel et cet appel lancé pour un cessez le feu ont été très vite hypermédiatisés et ont fait le tour du monde.
Par l’effet de leur pertinence et justesse, ces quelques mots ont fait mouche en ressuscitant dans l’opinion publique internationale, la foi dans la légalité internationale et le droit humain universel. Du reste, ils ne constituent guère une surprise quand on sait qu’Antonio Guterres était Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés de juin 2005 à décembre 2015.
« Son mandat à la tête de l’un des principaux organismes humanitaires du monde, lit-on dans sa biographie officielle, a été marqué par les vagues de déplacement sans précédent de ces dernières décennies. Les conflits en Syrie et en Iraq et les crises qui secouent le Soudan du Sud, la République centrafricaine et le Yémen ont obligé le HCR à multiplier ses activités alors que le nombre de déplacés ayant fui les conflits ou les persécutions passait de 38 millions en 2005 à plus de 60 millions en 2015 ». Morale de l’histoire, il sait ce qu’il dit.
“Je suis profondément inquiet concernant les claires violations du droit international humanitaire que nous voyons à Gaza”, a-t-il poursuivi.
Il va de soi que le discours d’Antonio Guterres n’a pas été du goût des Israéliens. Il a provoqué l’ire du ministre israélien des affaires étrangères qui se croyant, au-dessus du droit international, a demandé sa démission. Cette requête prouve que le discours légaliste du leader onusien a ébranlé l’édifice fasciste israélien et l’a décrédibilisé devant l’opinion internationale.
Ce discours prononcé par le 9ème secrétaire général de l’ONU sera inscrit dans l’Histoire de l’humanité comme une référence historique.
Quant Antonio Guterres relaie Michel Jobert
Il rappelle la petite phrase qu’avait prononcée le ministre français des affaires étrangères Michel Jobert pour justifier l’incursion des armées arabes dans le territoire de la Palestine occupée, lors de la guerre israélo-arabe, du 6 Octobre 1973.
Le diplomate français avait déclaré à l’époque : « Est ce que tenter de remettre les pieds chez soi constitue forcément une agression imprévue ».
Cette déclaration historique a été toujours citée pour rappeler que les véritables habitants de la Palestine sont les Palestiniens et non les colons israéliens.
“Il était important de reconnaître que les attaques du Hamas ne se sont pas produites en vase clos et ne viennent pas de rien”, a déclaré Guterres.
Cette vérité véhiculée par la petite phrase de Michel Jobert est de nouveau d’actualité. Elle s’applique parfaitement à la récente « attaque » de Hamas dans la Palestine occupée. Les combattants qui avaient mené l’attaque étaient, simplement, chez eux, comme l’avait insinué à son tour, Antonio Gutterres.
Cela pour dire que les déclarations faites par des personnages crédibles ont un immense pouvoir sur l’orientation de l’opinion publique. C’est ce que Jean Paul Sartre appelle la puissance des mots.