Autoriser la Banque Centrale de Tunisie (BCT) à financer directement le trésor public n’aggravera pas l’inflation liée principalement à deux causes; à savoir la demande saisonnière et le cercle vicieux de la hausse des prix et des salaires, a indiqué le spécialiste en risques financiers, Mourad Hattab.
Pour rappel la commission des finances et du budget relevant de l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) entame, jeudi, l’examen d’un projet de loi autorisant exceptionnellement la BCT à accorder des facilités au Trésor public tunisien de l’ordre de 7000 Millions de dinars remboursables sur 10 ans avec une période de grâce de trois ans et sans intérêts.
Ce projet de loi a été adopté par un conseil ministériel tenu, le 25 janvier 2024.
Pour Hattab, ce type de financement permettra à l’Etat d’économiser au moins deux milliards de dinars par an, vu que l’encours des bons de Trésor souscrits par les institutions financières estimé à 27 milliards de dinars est soumis à un taux d’intérêt moyen de 9%, selon les dernières statistiques de la BCT.
Il a estimé que la nouvelle décision met fin à une époque qui a coûté très cher à la Tunisie au niveau de l’élargissement des dépenses du service de la dette intérieure, sous prétexte de l’indépendance de la banque centrale de Tunisie (BCT), et est de nature de régler la situation concernant la baisse du taux d’intérêt directeur.
Les prévisions montrent une possibilité d’une baisse progressive du taux d’intérêt directeur de 8% actuellement à 6% sur le court terme à cause de ses répercussions sur le coût de financement d’une façon générale en plus de l’impact de la décision sur le taux de change du dinar grâce aux efforts déployés pour maitriser l’inflation importée.
Hattab a rappelé que les facilités qui seront accordées par la BCT seront fixées par des normes comptables précises en adéquation avec le produit intérieur brut (PIB) et les ressources budgétaires.
Il a souligné l’impératif de poser des questions pertinentes concernant le bilan économique de la politique monétaire “indépendante”, après 7 ans de l’application de la loi n 2016-35, décidée et qui a causé le recours de manière accrue aux ressources d’emprunt intérieur à travers, notamment, les bons du trésor.
Pour l’expert, l’application de la politique d’emprunt interne a causé une hausse de l’endettement intérieur par rapport au PIB, lequel (endettement ) est passé de 19,4% à la fin de 2015 à 43,3% en 2023, avec des taux d’intérêt d’environ 9% par an, pour porter le service de la dette publique interne à environ 3636 millions de dinars, alors que le budget du ministère de la Santé est estimé à 3660 millions de dinars.
La modification du statut de la Banque centrale à travers l’institution du mécanisme de financement direct va de pair avec l’esprit de la loi n°90 de 1958 portant sur la création et la réglementation de la Banque centrale, a-t-il précisé.
Ladite loi stipule le financement de la trésorerie publique à moins de 10% du revenu fiscal de l’exercice en cours. Cette dernière va de pair avec la vision du président Kais Saïed, qui a déclaré lors de sa visite à la Banque centrale en septembre 2023 que la loi précitée est bien meilleure que son similaire actuel.
Le responsable a évoqué la révision des objectifs et des prérogatifs de la BCT qui devrait permettre d’établir une cohérence entre la politique économique de l’État et la politique monétaire.
Cette relation a conduit à plusieurs situations conflictuelles, d’autant plus que la politique monétaire est gérée à court terme, alors que la politique économique est formulée à moyen et long termes, selon Hattab.
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