La nouvelle est affolante. Le parlementaires tunisiennes intiment l’ordre au gouverneur la Banque centrale de Tunisie pour financer la dette et les déficits budgetaires.
Une mesure qui met en branle la planche à billet, qui augmente la masse monétaire immédiatement, sans qu’il ait une raison économique à une telle mesure. Pis encore, les gains de productivité sont quasiment négatifs dans la plupart des secteurs économiques. Une mesure « exceptionnelle » qui inquiète les experts pour ses conséquences sur l’inflation ou la valeur du dinar.
Le 6 février, le Parlement tunisien a adopté un amendement qui permet le financement direct du budget par la Banque centrale de Tunisie (BCT), une « exception » selon le gouvernement dont les conséquences sur l’inflation ou la valeur du dinar inquiètent les experts.
L’Assemblée des représentants du peuple a approuvé à une majorité de 92 voix sur 133 un amendement à la loi garantissant l’indépendance de la BCT, qui lui interdit de financer le Trésor public. Ce texte de loi autorise la BCT à prêter « à titre exceptionnel » à l’État 7 milliards de dinars (2 milliards d’euros), remboursables sans intérêts en dix ans après une période de grâce de trois ans. Ces fonds serviront à combler partiellement le déficit budgétaire de 2024 (28,7 milliards de dinars) dont 16 milliards d’emprunts extérieurs sur lesquels dix milliards n’ont pas été trouvés.
Pendant le débat précédant le vote, la ministre des Finances Sihem Boughdiri Nemsia a assuré que ces fonds ne sont « pas destinés à financer des dépenses courantes ». Trois milliards de dinars (900 millions d’euros) serviront à rembourser d’anciennes dettes étrangères mais « une partie (du prêt) sera utilisée pour financer des investissements publics », selon la ministre. Certains députés ont critiqué « une solution de facilité ». « Nous n’avons pas pu avoir des emprunts à l’extérieur, alors nous empruntons à l’intérieur », a dit Hichem Hosni, député indépendant.
Effets potentiellement négatifs Le recours à la BCT « est la conséquence directe de la fermeture des portes » dans les négociations avec le FMI sur un prêt d’environ deux milliards de dollars.
Une aide rejetée avec fracas au printemps dernier par le président Kaïs Saïed, au motif que les réformes à mener en contrepartie ne seraient pas soutenables pour les Tunisiens. Le recours à la planche à billet est surtout la suite logique d’un refus de réformer l’Etat, une fin de non-recevoir pour les impératifs demandent de couper dans le gras de la fonction publique et de mener une chasse aux gaspillages et aux rentes de situation.
Le gouverneur de la BCT, Marouane Abassi, dont le mandat arrive à expiration à mi-février, a averti que le prêt de la BCT allait entraîner « une baisse des réserves en devises » avec des effets indéniablement négatifs sur le dinar tunisien.
Les autorités « demandent une exception de 7 milliards mais rien ne garantit qu’en 2025, il n’y aura pas une autre exception, puis une troisième, une quatrième et une cinquième », s’inquiètent aussi de nombreux économistes avertis. Le prêt BCT risque, à ses yeux, de stimuler une inflation déjà forte (environ 8%), car « vous aurez une quantité de monnaie en circulation sans contrepartie en termes de biens et de services » générés.
En outre, « cela va encore retarder les réformes nécessaires », ajoute-t-il, en citant les dépenses publiques à réduire ou les entreprises publiques déficitaires à restructurer. Le vote parlementaire constitue un coup de couteau dans la valeur du dinar et de facto dans le pouvoir d’achat des citoyens. Le dinar perdrait selon des macro économistes une perte de 14% en 2024 et une plus de 38% d’ici 2028.
Economics for Tunisia Avec AFP