Le gouvernement d’Ahmed Hachani semble prendre goût aux amnisties pour renflouer les caisses de l’Etat. A preuve, au moins deux ministères, ceux des finances et des affaires sociales ont annoncé, pour 2024, des amnisties sociale et fiscale.
Le ministre des affaires sociales, Malek Zahi a annoncé, le 31 janvier 2024, lors d’une conférence de presse une amnistie sociale. Cette dernière consiste en l’abandon des pénalités de retard des créances des entreprises privées auprès des caisses sociales et ce à partir de mars 2024. Le ministre a révélé que cette nouvelle amnistie sera limitée dans le temps. Elle durera six mois et ne sera pas renouvelable. Dépassé ce délai, les infractions de ces entreprises ne seront plus tolérées.
L’amnistie serait une belle affaire pour les caisses de sécurité sociale
Le ministre a laissé entendre lors de cette conférence que la décision de cette amnistie n’aurait pu voir le jour que parce que celle décidée en 2022 a donné de bons résultats. Par les chiffres de l’amnistie de 2022 a permis de mobiliser selon lui « des ressources financières considérables au profit des caisses sociales ». Par les chiffres, le montant mobilisé s’est élevé à 500 MDT en 2022. Mieux, d’après le rapport sur les entreprises publiques annexé à la loi de finances 2024, le déficit de la CNSS, à titre indicatif, s’est réduit de 24,5% pour atteindre 961,5 MDT contre 1,2 Milliard de dinars en 2021.
Morale de l’histoire : l’amnistie est devenue un mécanisme constructif et positif pour atténuer la problématique du déficit des caisses de sécurité sociale.
“L’amnistie est un outil pragmatique pour renflouer les caisses de l’Etat et soutenir l’économie.” – Ahmed Hachani, Premier ministre
Concernant l’amnistie fiscale, l’article 58 de la loi de finances pour l’année 2024 institue une amnistie fiscale à des fins de régularisation de la situation des personnes au titre des créances fiscales constatées, des amendes et condamnations pécuniaires et des déclarations fiscales non déposées ou minorées.
Conditions à remplir pour bénéficier de l’amnistie fiscale
Au sujet des créances fiscales, sont abandonnés, les pénalités de retard, de recouvrement et frais de poursuite, pour :
– Les créances fiscales constatées dans les écritures des receveurs des finances avant le 1er janvier 2024,
– Les créances fiscales non constatées dans les écritures des receveurs des finances avant le 1er janvier 2024, ayant fait l’objet d’un arrangement avant le 20 juin 2024 ou la signature d’une reconnaissance de dette ou ayant fait l’objet d’une notification d’arrêtés de taxation d’office avant cette même date,
– Les créances fiscales exigibles en vertu de jugements prononcés en matière de contentieux de l’assiette de l’impôt et constatées avant le 1er juin 2024.
Cette régularisation de la situation devrait se faire sous certaines conditions. Il s’agit de la souscription d’un calendrier de paiement dans un délai maximum ne dépassant pas le 30 juin 2024, du paiement intégral de la première tranche, du règlement des montants restants dus par tranches trimestrielles sur une période n’excédant pas 5 ans.
“L’amnistie sociale est une bouffée d’oxygène pour les entreprises en difficulté.” – Malek Zahi, Ministre des affaires sociales
Abandon des amendes
Concernant les amendes et condamnations pécuniaires et les amendes fiscales administratives, sont abandonnées les amendes et condamnations pécuniaires constatées dans les écritures des receveurs des finances avant le 1er janvier 2024 dont le montant restant ne dépasse pas 100 dinars pour chaque amende, ainsi que les frais de poursuites y afférents.
Aussi, sont abandonnés, 50% du montant des amendes et condamnations pécuniaires (en vertu de la législation pénale, fiscale, civile ou autres) et des amendes relatives aux infractions fiscales administratives constatées avant le 20 juin 2024 ainsi que les frais de poursuites y afférents.
Là aussi, pour bénéficier de ces mesures d’amnistie, il y a des conditions à remplir. Celles-ci consistent en la souscription d’un calendrier de paiement dans un délai maximum ne dépassant pas le 30 juin 2024, le paiement intégral de la première tranche et le règlement des montants restants dus par tranches trimestrielles sur une période n’excédant pas 5 ans.
L’article 58 précité précise que les présentes dispositions ne s’appliquent pas aux amendes et condamnations pécuniaires prononcées en matière de chèques sans provision et les crimes en matière de lutte contre le terrorisme et la répression du blanchiment d’argent.
Déclaration fiscales non déposées, abandon des pénalités
S’agissant des déclarations fiscales non déposées et dépôt de déclarations fiscales rectificatives, sont abandonnées, les pénalités exigibles en vertu des dispositions des articles 81, 82 et 85 du code des droits et procédures fiscaux et ce pour les déclarations fiscales, y compris les actes, écrits et déclarations relatifs aux droits d’enregistrement, échues avant le 31 octobre 2023, non prescrites et déposées à partir du 1er janvier 2024 au 30 avril 2024 à condition de payer le principal de l’impôt exigible, selon le cas, lors du dépôt de la déclaration ou lors de l’accomplissement de la formalité de l’enregistrement.
Une seule condition à remplir pour bénéficier de cette mesure. Il s’agit de payer le principal de l’impôt exigible, selon le cas, lors du dépôt de la déclaration ou lors de l’accomplissement de la formalité de l’enregistrement.
“L’amnistie n’est pas une solution miracle, mais elle peut contribuer à améliorer la situation économique.” – Observateur social
Cette mesure s’applique aux déclarations en défaut ainsi qu’aux déclarations rectificatives même déposées après l’intervention de l’administration fiscale ou après la notification des résultats d’une vérification fiscale.
Les impôts liés aux déclarations échues après le 31 octobre 2023 ne peuvent bénéficier de l’amnistie des pénalités que lorsqu’ils sont payés en situation de contrôle fiscal après notification des résultats du contrôle fiscal ou taxation d’office.
Abstraction faite de ces éclairages utiles, nous pensons que le recours du gouvernement Hachani aux amnisties sous certaines conditions vient illustrer, certes, le pragmatisme de l’équipe gouvernementale en place mais surtout l’engagement de l’Etat à respecter son rôle social dans l’impulsion des entreprises privées et l’amélioration des recettes des caisses de sécurité sociales.